Il y a bien un point sur lequel les commentateurs sont d'accord pour le résultat du premier tour des régionales : s'il y a un vrai perdant, c'est bien LREM. LR, RN et gauche regardent, dépités, leur verre à moitié plein à moitié vide. Mais le Jupiter d'or du grand perdant a bien été décerné, dimanche, à Emmanuel Macron. Et toute l'équipe du film a reçu un Jupiter particulier, avec des mentions spéciales pour les premiers rôles des Hauts-de-France Gérald Darmanin et Éric Dupond-Moretti, respectivement ministre de l'Intérieur et garde des Sceaux.

Il n'est pas inutile de rappeler ces derniers détails au moment où l'on vient d'apprendre que ceux qui étaient encore candidats sur la même liste, dimanche, et toujours ministres du même gouvernement, à l'heure où nous écrivons, se sont véritablement « lâchés », quelques minutes avant le début du Conseil des ministres, mercredi. Titre du Figaro : « Règlements de comptes en série à l'Élysée avant le Conseil des ministres ». L'élimination de leur liste dès le premier tour, avec un humiliant 9 % à se partager à cinq ministres, a visiblement libéré la parole et les aigreurs.

En fait, d'après les sources bien informées citées par le journal, c'est M. Dupond-Moretti qui a ouvert les hostilités en allant chercher son collègue et en l'accusant de « trahison » pour avoir apporté son soutien à Xavier Bertrand, son ex-camarade de LR arrivé en tête, dimanche, qu'il a qualifié d'« ami ». Gérald Darmanin lui a immédiatement répliqué : « Commence déjà par gagner une élection. » Et le transfuge LR a tenu à se démarquer des losers de la Macronie : « Je suis le seul ministre à avoir fait deux fois de suite, aux municipales et aux départementales, plus de 50 % au premier tour. […] Sur notre canton, on fait six fois mieux que la liste [LREM] Pietraszewski. » Est-ce une façon de se présenter comme le meilleur élève de la Macronie ou de poser des jalons pour la quitter ? En même temps...

Très intéressant : on a l'impression de revoir M. Darmanin quand il a quitté le bateau LR qui coulait en 2017. Désormais, il semble s'accrocher à la remorque Bertrand. « Trahison » : le mot de Dupond-Moretti est assez juste. Mais comment pourrait-il en être autrement au sein d'une majorité (mais est-ce encore le bon mot ?) constituée de traîtres LR et PS ?

Cette altercation à la table même du Conseil des ministres est un nouveau signe de la déliquescence du macronisme. Un garde des Sceaux qui sort de ses gonds. Deux ministres régaliens qui s'écharpent pour des combines électorales alors que les domaines dont ils ont la charge appelleraient une énergie et une détermination sans faille. Ils n'ont pas eu la dignité de la démission, ils ne gardent même plus celle de la fonction.

Et après, vous vous demandez encore pourquoi les Français se sont abstenus et ont coulé le parti présidentiel ?

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24 juin 2021 à 13:05

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