La réélection triomphale de Vladimir Poutine et de Viktor Orbán a ébahi les Occidentaux.

Il ne manque naturellement pas de commentateurs pour invoquer des irrégularités, pour crier à la dictature.

Pourtant, les sondages internationaux l’attestent : ces résultats reflètent l’authentique popularité des intéressés.

Ils sont cruels, évidemment, aux dirigeants occidentaux qui ont tant de mal, en France en particulier, à se faire réélire. Leur popularité chute presque toujours de manière vertigineuse peu après leur élection et on peut aujourd’hui dire que la plupart des pays dits démocratiques sont dirigés par des hommes ou des femmes que leur peuple rejette.

Il n’y a pourtant pas de mystère dans ce contraste.

Il montre tout simplement que le moyen principal, voire unique, d’être légitime, c’est de jouer national.

Nous disons bien national, pas nationaliste, ni encore moins fasciste ou pire, comme l’insinue la presse occidentale. L’assimilation du patriotisme au fascisme est une absurdité historique et morale.

C’est une absurdité historique que d’assimiler le patriotisme (fait naturel) au fascisme ou au nazisme : d’abord, parce que le vrai patriotisme n’exclut pas l’amour des autres peuples ; il va même généralement avec : il faut « aimer son prochain comme soi-même », ce qui est difficile à ceux qui ne s’aiment pas ou n’aiment pas leur pays. Ensuite, parce que le nazisme était un projet idéologique et mondialiste à caractère pathologique, pour lequel le sort des Allemands réels comptait peu, comme l’a montré l’issue apocalyptique de l’aventure.

C’est aussi une absurdité morale car le premier rôle de tout chef d’État est de défendre les intérêts de son pays, et donc de son peuple. Il en est ainsi depuis les tribus de la préhistoire et cela est toujours d’actualité. C’est ce que ressentent, hors de toute philosophie, les peuples. Dès lors qu’un chef d’État n’a pas d'autre objectif, il est naturellement ressenti comme légitime.

Les maires de villes le savent d’instinct : ils ont la charge de défendre les intérêts de leur ville et ils le font généralement sans états d’âme, ce qui n’exclut d’ailleurs pas l’allégeance à des entités supérieures : région ou État.

En revanche, le sentiment national se trouve aujourd’hui disqualifié en Europe occidentale, surtout en France, dès qu’il s’agit de l’État central : invoquer l’intérêt national, c’est, pour les médias, nauséabond, dans les cabinets ministériels, ridicule et passéiste. Depuis l’Antiquité, le zèle à servir sa patrie avait toujours été hautement honoré au sein de la Cité ; aujourd’hui, il est disqualifié. Étrange dénaturation.

Et que font ceux qui refusent d’être patriotes ? Ils sont subordonnés à des entités supranationales dont les intérêts priment sur les intérêts proprement nationaux : Union européenne, OTAN. Ou bien ils sont assujettis à une idéologie internationaliste et universaliste. Ils ne sont donc plus disponibles pour servir les peuples qui les ont mandatés ; ils deviennent de simples exécutants et les peuples ne tardent pas à s’en apercevoir.

Assujettissement et idéologie vont généralement de pair.

Une grande puissance peut, elle aussi, être soumise à une idéologie. Ce fut le cas de l’URSS au temps du communisme. Ce n’est justement pas le cas de la Russie de Poutine, lequel ne sert que son pays, pas une utopie mondialiste. Ceux qui ne font pas la différence n’ont rien compris. Il se peut que Trump ait pris un avantage décisif sur Mme Clinton le jour où il a dit : "Je ne suis pas candidat comme vous à la présidence du monde, je suis seulement candidat à la présidence des États-Unis."

La raison de la profonde perte de légitimité des hommes politiques occidentaux, et spécialement des Européens, est là : dès lors qu’ils servent en priorité d’autres intérêts (idéologiques ou supranationaux), ils n’apparaissent que comme des commis de l’étranger et non les chefs de leur peuple, ils ne sont plus reconnus.

Le père Gaston Fessard avait, sous l’Occupation, fait brillamment la théorie de la légitimité du prince, inséparable (selon lui) de son indépendance.

Comment s’étonner de la difficulté à constituer un gouvernement légitime en Allemagne, en Italie, en Espagne, en Belgique et, par là, de la dégénérescence de la démocratie dans ces pays ? C’est là l’aboutissement de cinquante ans de « construction européenne » et, donc, de la perte de légitimité des partis et des hommes politiques qui en ont fait leur priorité.

Macron, dont l’essentiel du programme est la transposition des normes européennes à la France (par exemple en matière ferroviaire), la promotion d’une Europe supranationale et l’assujettissement sans murmure à l’OTAN et aux États-Unis, espère-t-il sérieusement être réélu ?

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20 avril 2018 à 9:27

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