[Point de vue] Devinez ce que reproche l’académicien François Sureau au RN…

françois sureau

L'Académie française a toujours été traversée de tensions politiques. On se souvient du long veto de De Gaulle à l’élection de Paul Morand, qui n’y entra qu’en 1968, des protestations de Maurice Druon à l’idée qu’elle accueille Giscard, en 2003. Vieille institution conservatrice naguère moquée et boudée par la gauche, elle a désormais des charmes pour cette même gauche. Une gauche qui a renoncé à son fantasme révolutionnaire et qui, parfois par amour sincère de la France et de sa littérature (Alain Finkielkraut), a rejoint l’Académie. Mais elle attire aussi une gauche purement politique, sans titre de gloire littéraire, une gauche embourgeoisée et avide de pouvoir. L’élection probable de Laurent Fabius en serait le symbole. Après avoir détricoté l’identité et la souveraineté de la France depuis 1981, la gauche vient donc prendre sa retraite dans ce dernier asile d’amour de la France, l’une des dernières institutions que la monarchie a léguées à la République. Ironie de l’Histoire.

François Sureau, benjamin de l'Académie élu en 2020, est-il de gauche ? Il fut, en tout cas, l’un des premiers compagnons de route d'Emmanuel Macron, en rédigeant les statuts de son parti En marche dès 2016. Mais il a aussi souvent pris position, ces dernières années, contre les régimes d’exception et les restrictions de liberté imposées par Emmanuel Macron (en 2019, la proposition de loi visant la répression contre les gilets jaunes). On aurait donc pu attendre de lui la même distance critique quand, cette semaine, sur le plateau de Quotidien, on lui demande de livrer son analyse de l’ascension du RN et sa possible arrivée au pouvoir.

Sur les reproches à faire au RN, il est d'abord d'une lucidité que l'on aimerait mieux partagée dans le cercle de la raison. Incompétence ? Non, bien sûr, quand on voit les prouesses réalisées par les autoproclamés « compétents » : dette abyssale de 3.000 milliards, école et système de soins aux abois, etc. Immoralité ? La comparaison avec les partis au pouvoir n'est pas non plus à leur avantage. Son souverainisme ? Non, cela se défend. Mais alors ? Ceci : ils ne croiraient plus en la France, ils auraient peur. Et François Sureau le dit « en tant que patriote »... On n'a pas eu droit à l'accusation de poutinisme, à peine celle de pétainisme. Mais voilà à quoi en est réduite l'intelligentsia macronienne : un procès en déficit de patriotisme. Mauvaise foi ? C'est, en tout cas, consternant pour un intellectuel qui nous avait habitués à plus de sagacité : s'il y a bien un reproche, là aussi, à faire à tous les autres, mais justement pas au RN, c'est bien celui-là. Il fut longtemps le seul parti à crier au loup sur les dangers d'une submersion migratoire que toute l'Europe subit désormais, le seul à ramasser dans le ruisseau le drapeau sur lequel la gauche crachait et que la droite et le centre s'efforçaient de cacher derrière celui de l'Union européenne.

Tout aussi consternante, son analyse du droit des étrangers en France, comme le lui reproche Jean-Yves Le Gallou, sur X : « Dire que le droit pénal et le droit de l’immigration ont évolué de manière restrictive depuis trente ans est une contre-vérité absolue. »

L'Histoire nous a appris que les intellectuels de droite et de gauche pouvaient lourdement se tromper dans l'analyse du réel. François Sureau aussi.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

28 commentaires

  1. Ou peut-on passer et obtenir un diplôme d’intellectuel ? Je cherche une école pour mon fils, il parait que cela paie très bien sans obligation de résultats.

  2. RN, l fut longtemps le seul parti à crier au loup sur les dangers d’une submersion migratoire …..est-il affirmé dans l’article.C’est inexact,c’est Zemmour qui portait seul ce thème.Autant Le Pen père déplorait les vagues migratoires,autant sa fille a longtemps délaissé ce sujet,,y compris durant les présidentielles,prétendant qu’il n’était pas prioritaire.Mais depuis quelques semaines,le RN mariniste a soudain ouvert ses oeillères,jusqu’à faire croire qu’il avait toujours été le seul à en parler.

  3. Complément ; et je viens de lire que ce monsieur à fait l’armée, fini à la légion étrangère laquelle me couvrait en Algérie dans mes patrouilles de nuit. Les bras m’en tombent.. mais pas longtemps. Un ennemi intérieur de plus.. L’avenir de la France s’assombrit.

  4. Comme quoi ce monsieur qui se revendique patriote dénie au RN, dont bien des sympathisants on mis leurs peau au bout de leurs idées en s’engageant pour la France , à t’il fait de même. Poser la question est y répondre. Mépris total . Mais je continue de lire nos historiques académiciens.

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