[Point de vue] Crise énergétique : la course à l’abîme de l’Union européenne

Ursula_Von_der_Leyen_-_April_2022

C’est un étrange phénomène qui s’est répété tout au long de l’Histoire sans qu’il ait été possible d’en comprendre véritablement les causes. Au début des années 1980, l’historienne américaine Barbara W. Tuchman lui avait consacré un livre intitulé The March of Folly. De la chute de l’antique cité de Troie à la guerre du Vietnam, elle s’interrogeait sur les raisons de la déraison qui conduit des gouvernements à mener des politiques contraires à leurs intérêts. Non pas à se tromper, ce qui n’aurait rien de très original ni de très intriguant, mais à persister consciemment dans des politiques dont les effets sont clairement contre-productifs voire désastreux. Une sorte de course folle vers l’abîme que rien ne pourrait arrêter, surtout pas ceux qui l’ont déclenchée.

La guerre économique engagée par l’Union européenne contre la Russie semble bien relever de cette catégorie. Depuis le mois de mars, il n’a pas fallu attendre très longtemps pour comprendre qu'il n'était pas aussi évident d'atteindre l’effet recherché. Certes, l'économie russe n'est pas au mieux mais on se souvient de l'édito de François Langlet sur RTL, le 30 août dernier : « La Russie n'a jamais gagné autant d'argent avec ses exportations de pétrole et de gaz. » Dans le même temps, l’Europe a subi un effet boomerang sur son économie déjà fragilisée par la pandémie. Les perspectives ont été, dès le départ, des plus alarmistes : inflation, récession, pénuries et craintes de déstabilisation politique.

Inutile de revenir sur les prophéties de Bruno Le Maire, notre Nostradamus du Quai de Bercy, qui, à l’époque, annonçait que les dix plaies d’Égypte allaient s’abattre sur la Russie. Il restera dans l’Histoire comme le symbole d’une Europe arrogante et bornée. Car la « folie » des dirigeants de l’Union européenne tient au fait que, non seulement ils ne changent pas de stratégie, mais ils revendiquent le fait de l’accélérer et de l’amplifier. Comme si les passagers d’une voiture qui fonce droit dans un mur se félicitaient de voir le conducteur appuyer sur l’accélérateur. Étrange phénomène.

Le 6 décembre dernier, le think tank The Shift Project rendait publique une étude consacrée à la problématique de l’approvisionnement en gaz, étude relayée par Le Monde. Les conclusions sont des plus pessimistes. Pour compenser l’abandon du gaz russe, les Européens ont été contraints de se tourner vers les pays exportateurs de gaz naturel liquéfié (GNL), ce qui a généré une explosion des tarifs sur le marché mondial. Les conséquences sont connues : augmentation des factures, risques de coupures d’électricité du fait d’une production en partie dépendante des centrales à gaz, menaces de délocalisations.

Or, le plus inquiétant ne tient pas au seul problème du coût mais surtout à la question de la disponibilité de cette offre alternative : « En cas d’arrêt durable des livraisons russes à l’Union européenne, la demande mondiale de GNL risque de subir des déficits d’approvisionnement endémiques et sévères », note l’étude. N’imaginons pas qu’il s’agit d’une difficulté temporaire. 40 % des besoins en gaz de l’Union européenne en 2025 reposent, à ce jour, sur « des sources d’approvisionnement non identifiées ». Traduction : ils pourraient ne pas être pourvus. Car nous ne sommes pas les seuls demandeurs sur le marché. L’Asie est, avec l’Europe, le plus gros importateur mondial de gaz naturel et la demande chinoise ne cesse de croître. Le think tank s’inquiète alors du « spectre d’une guerre économique » pour les approvisionnements en raison de la croissance attendue des besoins asiatiques.

Autre difficulté : quand bien même l’approvisionnement en GNL suivrait, se poserait alors le problème d’un nombre suffisant d’infrastructures de regazéification et d’une capacité de transport et d’acheminement satisfaisante. « Des pans entiers de l’industrie européenne » sont menacés, indique l’étude. Gardons cependant le meilleur pour la fin : le développement du recours au GNL va aggraver les émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne.

Concernant le pétrole, les perspectives ne semblent guère plus réjouissantes. Le think tank doute, en effet, de la capacité de l’Union européenne « à mettre en œuvre de manière rigoureuse le boycott annoncé du pétrole russe ». Il est donc clair que l’Union européenne ne dispose pas d’alternatives crédibles au gaz et aux hydrocarbures russes susceptibles de couvrir la totalité de ses besoins. En attendant, la présidente de la Commission européenne présentait, le 7 décembre dernier, un neuvième paquet de sanctions contre la Russie. Une obstination qui relève bien de cette « marche de la folie » décrite par Barbara W. Tuchman et, surtout, qui annonce le crash planifié des économies européennes.

Frédéric Martin-Lassez
Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

Vos commentaires

56 commentaires

  1. On ferait bien aussi d’aller enquêter du côté de Leyen et son mari à propos des vaccins Pfizer commandés par milliards sans pouvoir récupérer les sms qu’elle a échangé avec le laboratoire. Scandaleux !

  2. Selon Le Canard Enchaîné, en 2022, la France a acheté à la Russie 290 tonnes d’uranium en pleine guerre en Ukraine pour alimenter nos centrales nucléaires.
    C’est prés de 3 fois plus qu’en 2021.
    Et cet uranium nous a couté cette année la coquette somme de 345 millions d’euros selon les révélations du palmipède.

  3. L’U.E. est une organisation qui degringole tous les jours un peu plus. Le FREXIT se profile à l’horizon et devient une nécessité pour sauver les nations et surtout la France qui la compose. Notre souveraineté est annihilée par cette union présidée par des fantoches. Notre président pro européen s’y voit président à vie mais nous ne sommes pas en République bananiere et il est temps que lui aussi aille voir ailleurs.

  4. Des sanctions qui font le bonheur des USA, ils nous vendent leur pétrole et leur gaz, en plus avec cette idiotie d’indexation du prix de l’ électricité sur le gaz, nos PME sont au bord du gouffre . Un tel , que des entreprise envisagent d’aller au USA ! Merci à ces » zélites » à l’image de Van der Leyen , cette va t en guerre , qui si on l’écoutait nous amènerait à envoyer des troupes en Ukraine, avec toutes les conséquences induites .

  5. c’est Poutine qui doit se régaler de voir toutes les difficultés de l’Europe ! il les avait prédit mais comme toujours nos élites le prenne pour un débile ! en attendons c’est nous qui payons l’addition !

  6. A croire que plus on fait d’études, que plus on a des postes politiques de responsabilité, plus on est con et se déconnecte de la réalité. Mais regardez la, elle a de plus en plus la tête de Folcoche et se rapproche de la folie pure et simple. A éjecter au plus vite avant qu’elle et ses comparses dérangés ne nous détruisent complètement.

  7. Le gaz , le pétrole , et l’uranium traité que la France achète à la Russie pour alimenter ses centrales nucléaires , on en parle ?

  8. Nous pourrions aborder également le thème de la rémunérations des zélites. Nous pourrions appeler cela le syndrome de la sangsue. Tant que l’oligarchie progressiste n’aura pas ses billes en jeu, elle continuera à faire n’importe quoi. L’artisan, l’entrepreneur sont rémunérés directement en fonction de la valeur qu’ils produisent. Un commissaire européen…..

  9. Je ne comprends toujours pas pourquoi cette femme n’a pas encore été virée de son poste Non seulement c’est une malade mais en plus elle se croit utile

  10. … « Certes l’économie russe n’est pas au mieux… », ça c’est faux, c’est ni plus ni moins que de la désinformation.
    Regardez donc vers quels marchés l’économie russe s’est tournée, c’est ouverte ces six derniers mois et avec succès : la Chine, les marchés asiatiques, l’Inde… Et ce en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.
    Et pendant ce temps là, comme dirait l’occupant de l’Élysée, le généreux donneur de preservatifs aux mineurs, comme si rien n’était plus important, et bien pendant ce temps là, la France, l’Europe s’enfoncent dans une crise inouïe, et entraîne leur ressortissants dans la misère, le froid, et la faim !
    N’est-ce pas plutôt le modèle européen de l’économie qui est à bout de souffle ?

  11. « la « folie » des dirigeants de l’Union européenne » se voit rien que sur la photo en haut de l’article.
    Article excellent, d’ailleurs.

  12. Toutes ces sanctions vont très certainement, à leur plein effet, avoir des répercussions sur l’Asie, laquelle pourrait se retourner contre l’Europe. Non seulement nous aurons à subir les effets de ces sanctions en conséquences collatérales mais nous aurions aussi à répondre aux mouvements d’humeurs des asiatiques. En face, les USA se frottent les mains, Poutine observe, patient, dur à l’usure. Nous avons pourtant quelques expériences à nous frotter aux Russes : Les guerres napoléoniennes, les ambitions d’Hitler. Ils nous entrainent toujours dans leur chute pour mieux se relever, à nos dépends. Pour leur Noël offrons à nos dirigeants « La gestion pour les nuls ».

  13. Il est quand même capital de punir cette atroce russie et apparemment elle souffre, pas assez à mon gré, mais suffisamment pour qu’hitler se plaigne.
    Cela vaut la peine de faire des sacrifices si cela peut contribuer à faire saigner ces bourreaux>

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