« C’est un temps que les moins de vingt ans », etc. et bla-bla-bla, refrain connu. Je me souviens d'un dessin de Konk, lors du fameux premier Sommet de la Terre, à Rio, en 1992. On voyait des gens lever le nez vers une armada traversant le ciel. « Qu’est-ce qu’ils font ? », demandait l’un en cramponnant son cabas. « Ils vont à Rio lutter contre la pollution », répondait l’autre. À l’époque, tout le monde béait et bêlait d’admiration devant cette initiative internationale. Lui en décryptait déjà l’hypocrisie.

Ces jours-ci, les grands financiers de la planète sont rassemblés dans la très chic station de Davos, dans les Grisons suisses. S’y tient comme chaque année le Forum économique mondial où, comme dit la semaine passée, on se penche sur "une “remoralisation” de la mondialisation". Sans rire. Et l’on s’y penche aussi, bien sûr, sur les maux de la planète et "le réchauffement cause du froid polaire", comme titrait la presse cette semaine (pensez, le thermomètre descend à -5 °C et il neige en janvier !).

Et pour lutter contre le réchauffement, il faut, mauvais élève que vous êtes, éteindre votre télé, baisser le radiateur, acheter des chaussettes chaudes et manger froid, éviter les haricots blancs et les artichauts pour ne pas lâcher de méthane dans l’atmosphère, ne plus faire d’enfants et calculer votre bilan carbone quand vous achetez des carottes du Poitou.

Les plus beaux crânes d’œuf de la planète se sont donc réunis pour étudier tout cela et nous contraindre, s’il le faut, par des mesures coercitives, histoire de remoraliser la mondialisation. Et comment sont-ils arrivés à Davos, ces braves gens ? En avion, bien sûr.

Cette année a vu le record de jets privés. On peut lire, dans Capital, que "selon les constatations d'Air Charter Service, relayées par le quotidien anglais The Guardian, les politiques et les patrons ont opté cette année pour des jets privés plus grands et plus chers. Le nombre de déplacements en avion privé a augmenté de 11 % sur l'ensemble de l'année dernière".

On nous annonce 1.300 vols recensés, et pas question de faire du "coavionnage" : chacun le sien. À ce jeu-là, les plus mauvais élèves sont, paraît-il, les Allemands, les Français, les Russes, les Américains et les Saoudiens.

En avril 2017, la Cour des comptes épinglait ainsi Noël Le Graët, le président de la Fédération française de football (FFF), qui se déplace souvent en jet privé. Montant de la note d’affrètement d’avions pour la FFF : 9.000 euros en 2013, 313.000 en 2015 ! Le monsieur estime qu’il le vaut bien. N’aime pas les avions de ligne, sans doute.

François Fillon a fait mieux encore, dépensant 50.000 euros de jets privés en deux semaines de campagne, du 7 au 21 avril 2017… Comme il disait déjà : « Il n’y a rien d’illégal là-dedans. » Explication de son porte-parole : « C’était une période épouvantable, où chaque déplacement était perturbé. » […] « Il avait peur de tout. Il a beaucoup utilisé l’avion pour être sûr de ne pas croiser la presse, un opposant ou simplement des Français. »

Et encore, on n’était pas au temps des gilets jaunes…

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25 janvier 2019 à 14:27

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