Mélina Boughedir, dont la défense tellement prévisible et usée jusqu'à la corde ne pouvait pas convaincre, a été condamnée à la perpétuité par la justice irakienne pour son association avec Daech. Comme d'habitude, ses avocats s'indignent et relèvent appel de cette décision. Comme d'habitude, les mêmes voix critiques à l'égard de la rigueur nécessaire de notre justice ordinaire s'émeuvent de la sévérité sanctionnant l'implication dans le terrorisme islamiste. Comme d'habitude, on feint de confondre les crimes et les délits, une triste et déplorable banalité de notre pays, avec le caractère atypique des monstruosités terroristes.

Et on oublie tout et on n'apprend rien.

Nous ne sommes pas éloignés de Montfermeil, malgré les apparences.

Qu'on me permette une comparaison avec la Recherche, de Marcel Proust. Elle n'a rien d'offensant. Le duc de Guermantes se réjouit de partir pour une soirée prometteuse quand on lui annonce, à plusieurs reprises, que son cousin est au plus mal et que cela empire. Le duc rejette ces annonces avec désinvolture pour que son désir de fête ne soit pas gâché. Enfin, on lui fait part de la mort de son cousin. Et le duc : "Il est mort ! Mais non ! On exagère, on exagère !"

À Montfermeil, il me semble que les trois élus Front de gauche qui ont considéré comme une provocation le fait d'indiquer que le colonel Beltrame avait été "victime du terrorisme islamiste" en donnant son nom à un parvis sont tombés dans le ridicule et l'indécence proustiens.

Le maire Xavier Lemoine n'a pas attendu les crimes du terrorisme islamiste pour alerter lucidement sur les potentialités dangereuses, dans certaines cités, de la coexistence entre des musulmans de plus en plus en autarciques et des habitants de plus en plus inquiets. Il a répondu qu'il s'agissait d'une "réalité factuelle", ce qui est une évidence puisque le colonel Beltrame a bien été assassiné dans le Super U de Trèbes, le 23 mars 2018, par un tueur islamiste.

Il paraît que Robert Ménard avait déjà rendu hommage, à Béziers, au colonel Beltrame en mentionnant la culpabilité du terrorisme islamiste. Pour le Front de gauche, cela aurait suffi pour discréditer le libellé de Montfermeil ! C'est absurde. Un jour, Robert Ménard dira qu'il peut faire beau en été et on dira qu'il neige !

Il est pitoyable, après tant de crimes commis par le terrorisme islamiste, depuis les massacres Merah jusqu'aux plus récents qui ont endeuillé la France, de continuer à discuter ainsi du sexe des anges en développant ce sempiternel argument sur le risque d'amalgame. Alors que c'est le contraire qui se produira si on ne se réfugie pas dans l'hypocrisie. C'est en nommant précisément le terrorisme islamiste - forcément visible, monstrueusement ostensible : il a fait mourir au nom d'un islam sanglant et haineux - qu'on parviendra à sauvegarder la concorde avec la majorité de musulmans français qui, s'ils ne protestent pas assez, ne sont pas complices de ces horreurs. Cibler clairement le mal, c'est sauver le bien.

Ces trois élus du Front de gauche, dans une France qui déjoue des attentats mais a peur d'être frappée à nouveau, s'abandonnent par idéologie et complaisance à une irresponsabilité délétère.

Je n'ose imaginer le sombre contentement qui aurait été le leur si on avait dû apposer, pour une tuerie, une plaque incriminant le FN, les identitaires ou, pourquoi pas, le fascisme. Ils n'auraient pas eu l'ombre d'une réticence.

Que fallait-il graver à Montfermeil ? Le colonel Beltrame assassiné ? Le colonel Beltrame victime ? Le colonel Beltrame tué par mégarde ? Le colonel Beltrame exécuté à cause d'une déviation de l'islam ? Le colonel Beltrame qui a eu tort d'agir comme un héros ? Le colonel Beltrame qui n'a pas su dialoguer ?

Tout cela est infiniment saumâtre et nauséabond.

Quand on proclame que le colonel Beltrame a été victime du terrorisme islamiste, on n'exagère pas.

Mais la République énonce une tragique vérité.

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04 juin 2018 à 10:02

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