La mort de nos deux militaires au Mali met nos dirigeants face à leurs responsabilités

Avec la mort au Mali, le 21 février dernier, du maréchal des logis-chef Émilien Mougin et du brigadier-chef Timothée Dernoncourt, tous deux appartenant au 1er régiment de spahis basé à Valence, c'est la déjà trop longue liste de nos militaires tués en OPEX qui s'allonge encore. Sur les dix dernières années, ce sont près de 700 soldats qui ont été blessés, et plus de 150 qui ont été tués, dans le cadre des missions qu'ils menaient pour le compte de la France sur les théâtres d'opérations extérieurs.

Les deux derniers spahis qui ont été tués - un troisième ayant été blessé - étaient à bord d'un véhicule blindé léger du groupement tactique désert blindé (GTD-B), engagé dans le cadre de l'opération Barkhane. Leur véhicule a été frappé par un engin explosif improvisé alors qu'il se trouvait en opération contre les groupes armés terroristes qui sévissent dans la région de Ménaka.

Même si la mort au combat fait partie des risques acceptés par nos militaires, elle ne doit pas occulter les graves difficultés que traversent actuellement nos armées. Et le différend qui a opposé, il y a peu de temps, le président de la République, chef des armées aux termes de l'article 15 de la Constitution, et le chef d’état-major des armées, le général Pierre de Villiers, est révélateur du malaise idéologique et opérationnel qui sépare, aujourd'hui, les politiques et les militaires.

Ce malaise rebondit, d'ailleurs, à l'occasion du débat qui s'engage sur le "nouveau" service national universel. L'un des principaux points d'achoppement réside incontestablement dans la paupérisation de nos forces armées. Ainsi, si la relation entre les pertes en vies humaines enregistrées sur les zones de combat et la vétusté de nos matériels ne peut, faute d'études objectives et indépendantes, être affirmée, elle peut néanmoins, au vu des informations disponibles, en être facilement déduite.

Les restrictions budgétaires qui ont touché la Défense nationale au cours de ces dernières années ont été réelles et constantes. Elles ont largement contribué à obérer la capacité opérationnelle de nos unités, et considérablement exposé nos soldats. Parmi les matériels atteints d’obsolescence, nos véhicules blindés figurent en bonne place. Âgés de plusieurs dizaines d'années pour certains d'entre eux - nos véhicules de l'avant blindés (VAB) remontent à 1975 -, ils ne sont plus, de l'aveu même de nos parlementaires spécialisés dans ces questions, "au niveau des exigences actuelles de protection". Alors que, toujours selon nos parlementaires, "les engagements actuels sur la bande sahélo-saharienne exigent des matériels robustes et efficaces, aptes à faire face à des pics de violence et à intervenir dans des situations marquées par la difficulté d'identifier les belligérants".

Les faiblesses de nos matériels sont donc connues du pouvoir politique en place. Pourtant, chaque année, des discussions interminables s'engagent sur la nécessité de renforcer un budget qui, en fin de compte, sert souvent de variable d'ajustement budgétaire se traduisant par des achats de matériels neufs repoussés, voire tout simplement annulés. Combien faudra-t-il donc de morts pour que nos politiques comprennent que la vie de nos soldats n'est pas moins précieuse que la leur ?

Deux spahis viennent de tomber. Conformément à la devise de leur régiment, et forts d'une tradition séculaire, ils ont "fait face". À ceux qui nous dirigent, maintenant, de faire face et d'assumer enfin leurs responsabilités afin que tous ces morts ne l'aient pas été pour rien.

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Olivier Damien
Conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, Commissaire divisionnaire honoraire

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