C’est vrai qu’on se pose la question, à force. Combien de fois a-t-on entendu les bonnes consciences qui saturent les antennes publiques se plaindre du machisme dans le milieu politique ? Difficile, pour une femme, d’y réussir. Mais on ne cite jamais, dans ces cas-là, l’exemple de Marine Le Pen. N’est-elle pas une femme ?

L’argument a repris du poil de la bête après le meeting raté de Valérie Pécresse à Villepinte. L’inénarrable Alain Minc avait ouvert la voie : si personne n’a vibré, c’est la faute du machisme ordinaire des Français. Pourtant, au meeting de Marine Le Pen à Reims, pas un mot, pas une critique de ce type. Marine Le Pen n’est-elle pas une femme ? Marlène Schiappa a estimé les reproches adressés à Pécresse « durs » et « un peu sexistes ». « On en attend toujours beaucoup plus des femmes en politique que des hommes. J'ai trouvé que, en général, quand il s'agit de femmes politiques, que ce soit Valérie Pécresse, Anne Hidalgo ou d'autres, on concentre les analyses et les commentaires sur les questions de forme, de voix, d'attitude, et beaucoup moins sur le fond. » Tiens ! Pécresse, Hidalgo mais pas Marine Le Pen... N’est-elle pas une femme ?

Michel Barnier reprend le même argument : « On ne peut pas demander à une femme le même ton qu'un homme », explique-t-il sur BFM. On ne l’avait jamais vu si précautionneux avec… Marine Le Pen. N’est-elle pas une femme ? Valérie Pécresse a elle-même évoqué à l’antenne de BFM TV un « phénomène machiste ». Mais ils sont moins méchants avec Marine Le Pen… N’est-elle pas une femme ? Pécresse cite un exemple : « Quand Emmanuel Macron fait son premier meeting de sa première campagne il y a cinq ans, il y a un moment où il fait sa mue en direct, où il se met à crier, rappelle Pécresse. Est-ce qu'il a eu les mêmes critiques que moi ? La vérité est toute simple, quand c'est un homme, c'est une erreur de jeunesse. Quand c'est une femme, c'est une faiblesse. ». La vérité est encore plus simple : il y a eu des critiques, les réseaux sociaux se sont moqués de ce passage, ils ont ridiculisé la saute de voix du candidat des mois durant. Les risques du métier.

Valérie Pécresse, encore : « On a des candidats hommes qui sont les favoris des médias ! Ils ne sont pas forcément les favoris des sondages, mais les favoris des médias parce qu'ils représentent ce qu'ils attendent », estime-t-elle, assurant que les femmes « ont des manières de penser différentes, des manières de parler différentes ».

À cet égard, Pécresse a sans doute raison. L’art oratoire, dans la politique, prend racine sur les tréteaux de villages, avant l’apparition du micro. On voit de vieilles photos dans lesquelles Lénine, Jaurès et bien d’autres haranguent la foule massée à leurs pieds. Il fallait alors un coffre et une faconde qu’un Le Pen père et un Mélenchon sont sans doute seuls à posséder aujourd’hui. Mais l'époque a changé et bien des femmes s’imposent en politique. Christiane Taubira sait être lyrique à l’occasion, Nathalie Artaud impose sa gouaille, Anne Hidalgo pourrait faire mieux mais n’a pas ce ton gêné, Christine Lagarde a fait une belle carrière sans être une oratrice, Marine Le Pen sait tenir un pupitre. N'est-elle pas une femme ? Hors de nos frontières, Angela Merkel ou Mme Thatcher n’étaient pas de grandes oratrices, elles n’en sont pas moins des monuments de la scène politique moderne en Europe. A contrario, souvenez-vous, l’orateur Zemmour de la Convention de la droite était particulièrement mauvais, ânonnant son texte et butant sur les mots, sans souffle et sans puissance. Depuis, le candidat a fait des progrès. Mais voilà, Zemmour était sauvé par la qualité de ses textes.

Valérie Pécresse doit simplement travailler l’art du discours et privilégier des contextes d’expression qui servent mieux sa personnalité. Elle doit surtout reconnaître que l’échec de son meeting tient infiniment moins à sa diction qu’à son texte, particulièrement mauvais, sans colonne vertébrale et sans personnalité. Prononcé d'une voix de stentor, il aurait transformé une étuve surchauffée en igloo. Or, un bon texte n’est en rien l’apanage des hommes. Marine Le Pen a bien su enflammer ses troupes à Reims. N'est-elle pas une femme ?

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16 février 2022 à 20:40

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46 commentaires

  1. Heureusement, Éric Zemmour n’a rien d’une femme, lui c’est un « vrai homme » et c’est pour cela qu’on l’aime !.

  2. Tiens, M. Baudriller reconnaît quelques qualités à MLP, mais il stoppe vite. Perso, je la trouve excellente dans ses meetings, et je suis loin d’être le seul. Discours charpentés comme sa voix, présence tranquille et bonnes réparties face à ses contradicteurs et journaleux – voir sur LCI avec les Macronistes Pujadas et Elkrief et 5 intervenants du peuple bien choisis – un vécu et un constance qui sont loin d’être les qualités première du thaumaturge Zemmour.

  3. Je pense que VP fait de l’autosabotage, la preuve en étant son lapsus sur le cinéma hier. Autosabotage volontaire (la french american association lui ayant ordonné de s’effacer devant son condisciple Macron) ou involontaire (elle ne s’y voit pas)? Objectivement, son dernier discours était le pire de sa carrière.

  4. Si Valérie Pécresse était victime de machisme elle ne serait pas présidente de la région Ile de France.

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