[Livre] La com’ a-t-elle tué la politique ?

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L’Institut Diderot, le cercle de réflexion de tendance libérale créé par le philosophe André Comte-Sponville, a confié au publicitaire François Belley la rédaction d’une note intitulée L’Homme politique face aux diktats de la com’, sujet éminemment actuel.

La communication politique a toujours existé, rappelle l'auteur, mais elle s'est sophistiquée avec la rencontre de la démocratie parlementaire et de la société de masse. Elle a évolué par phases. La première, que l’auteur appelle « 1.0 », consacre le modèle du « one-to-many » : un émetteur du message parle à une multiplicité de récepteurs. Avec, pour support, le papier au XIXe siècle, vite concurrencé au XXe par le cinéma, puis la radio et, enfin, la télévision. Dans cette « messagerie propagandiste » à sens unique et de haut en bas, l’émetteur est tout-puissant, mais ce pouvoir est réservé à une classe dirigeante limitée à quelques politiques, intellectuels et journalistes de premier plan.

La com’, fabrique des guignols de la politique

La télévision a participé à ce phénomène, mais elle a instillé progressivement de la séduction dans un message autrefois tout en puissance. Elle a logiquement consacré le savoir-faire indéniable en la matière d’un Kennedy ou d’un de Gaulle. Mais la « télé » envahissant les foyers a aussi permis une personnalisation et, donc, une segmentation des messages, ouvrant grand la voie aux publicitaires et autres gourous du marketing.

Cette évolution, qui a accompagné l’émergence de la « société du spectacle » de l’après-1968 décrite par Guy Debord, a envahi la sphère politique dans les années 1980. C’est « Ségolène Royal recevant dans sa chambre de maternité les caméras de télévision ». C’est Nathalie Kosciuzko-Morizet posant « allongée dans une forêt avec une harpe en arrière-plan ». Et c’est encore Barack Obama jouant « à la baballe à quatre pattes avec un bébé au sein du Bureau ovale ». Autant de figures de style caricaturales, dignes des sketchs des Inconnus ou des Guignols de l’info.

François Belley constate utilement ici que la montée en puissance de la com’ en politique s’accompagne de sa monétisation et, donc, d’une professionnalisation. La politique devient un « business », un métier à part entière, pour les élus comme pour leurs collaborateurs.

Tout le monde cause dans le post

Dans les années 2000, Internet a fait basculer la communication politique dans une nouvelle phase 2.0, qui fait émerger un nouveau modèle : le « many-to-many ». Tout le monde parle à tout le monde. La cacophonie qui en résulte modifie profondément les rapports de force, non sans provoquer des victimes collatérales.

Si tout le monde « cause dans le post » sur Facebook, Twitter, Instagram et, désormais, TikTok, tout le monde est aussi expert autoproclamé, lanceur d’alertes ou de fausses alertes... « Le smartphone devient l’arme de communication ultime du XXIe siècle », constate l’auteur. Et voilà « toute la profession politique qui se désinstitutionnalise ». Le militantisme politique, lui aussi, change en profondeur. Nombreux sont ceux qui ne s’engagent plus derrière un homme providentiel, mais seulement « pour une cause » : la défense des moustiques, amis d’Aymeric Caron, ou la lutte contre les méga-bassines de Sainte-Soline, pour Les Soulèvements de la Terre. La recherche du consensus laisse la place, bien souvent, à celle du dissensus, via l’image ou la « punchline » qui feront le « buzz ».

C'était hier. Nous assistons aujourd’hui à l’entrée dans la phase du 3.0, de la robotisation des contenus, du règne redouté comme tyrannique de ChatGPT et consorts, stade ultime de la non-pensée. Sentant le danger, François Belley milite ainsi pour un retour aux fondamentaux de l'action politique : moins de com’, plus d’action. Mais pour agir, com’ ou pas, il faut des convictions. Et du courage...

Vos commentaires

8 commentaires

  1. Bon, la seule solution est que quelqu’un de conviction de droite soit élu, quel qu’il (ou elle) soit, mais pas de droite teintée de rose). Ce qui ne veut pas dire quelqu’un d’inhumain, mais quelqu’un avec les pieds sur terre, pas genre branche gauche de la droite si vous voyez de qui on parle. En résumé quelqu’un de droite de convictions et insensible aux cris d’orfraie permanents de toute cette frange gauchiste de la population et des médias, qui marchent avec des oeillères. Et donc pour en arriver à la com, quelqu’un qui soit élu sur une volonté d’amélioration des choses, et qui s’y tienne contre vents et marées (contre associations, journalistes, conseils (constitutionnel ou autres qui empêchent), injonctions de l’Europe, etc …, et surtout qui explique régulièrement ce qu’il fait, que ça plaise ou non. Pas genre com alambiquée de Macron et suivants et qui n’ont pas souvent de concrétisation, mais des explications claires et nettes de l’avancement du programme prévu. En fait, Dire et Faire.

  2. Qu’a fait de Gaulle au plus dur de la crise de mai 68 ? Il a disparu physiquement et médiatiquement pendant trois jours. Panique partout. Il revient pour dire -à la radio seulement-, qu’il dissout l’Assemblée. Résultat des législatives, l’assemblée la plus gaulliste de tous les temps…

  3. C’est certain ! Ce n’est que mises en scène, cinéma, sourires et mensonges, déplacements : Mais quand donc « trouvent-ils » le temps de travailler, se pencher sur les dossiers et élaborer le bon cap, puisque la marine (après la  » guerre ») est phonétiquement en vogue ?

  4. « L’homme politique… » Lequel ? Pour en parler faudrait-il encore qu’il existe toujours. Où est aujourd’hui la politique dans une France dirigée à coups de 49.3 ou de matraques. Où sont les convictions et les débats d’idées quand toute contradiction du discours officiel est immédiatement attribuée à l’extrême-droite, au fascisme et au complotiste? Que peut-on attendre de concret de ministres, au mieux, illustres inconnus, au pire, frôlant la crétinerie ? Sans parler de ceux qui font des aller -retours entre les « Grosses têtes » de RTL et le gouvernement…

  5. La com’ paravent de l’homme politique ? Comme ces militaires de plateaux qui viennent nous expliquer pourquoi ce qu’il aurait fallu faire n’a pas été possible et dans quelles conditions ça pourrait le devenir ! L’épreuve du feu purifiera
    ce qui doit l’être . Louis XV disait ,paraît-il , « après moi le déluge »et les guignols qui prétendent nous gouverner » tant pis pour les dommages collatéraux » . Merci à Marie-Hélène THORAVAL et Marion MARECHAL d’avoir une parole reflet de leur pensée , censée , courageuse et porteuse de solutions .

  6. Non , c’est l’appât du gain et du pouvoir qui ont tué les hommes politiques qui d’ailleurs ne servent plus à rien puisque tout est décidé à Bruxelles .

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