Lille : la Justice donne encore raison au lycée musulman controversé

lycée Averroes

La bataille juridique dure depuis mars 2020. Elle oppose la région des Hauts-de-France et le lycée musulman lillois Averroès. En cause, des subventions gelées par Xavier Bertrand qui reproche à l'établissement un financement d’un montant de 800.000 euros provenant d’une organisation caritative du Qatar. Pour le cabinet du président qui répond au Parisien, « tant que nous n’aurons pas d’explications de l’État sur le respect de la convention avec le lycée, la région ne versera pas les fonds ». Mais ce mercredi, le tribunal administratif de Lille a condamné la région à verser 500.000 euros de subventions au lycée. Cette dernière annonce se pourvoir en cassation. Un bis repetita pour les Hauts-de-France déjà condamnés par le tribunal de Lille pour la même raison en 2021. La région avait porté l’affaire devant le Conseil d’État, mais elle avait été déboutée en juin dernier. Ce mercredi, elle annonce se pourvoir à nouveau en cassation devant le Conseil d’État.

Premier lycée musulman sous contrat

Premier lycée musulman sous contrat, l’établissement avait été créé en 2003, suite à l’affaire des jeunes filles voilées exclues du lycée Faidherbe de Lille, en 1994. Pour leur venir en aide, la mosquée lilloise avait sollicité les responsables associatifs musulmans et lancé l’idée de créer un lycée confessionnel. En 2001, l’association Averroès était née et le lycée éponyme ouvrait ses portes deux ans plus tard. En 2008, il devenait officiellement un établissement sous contrat ; et cinq ans plus tard, il obtenait la première place au classement des lycées français.

Un établissement controversé

Malgré l’excellence de ses résultats, l’idéologie véhiculée au sein du lycée est dénoncée par un de ses professeurs. En 2015, Soufiane Zitouni, qui y enseignait la philosophie, publie une tribune dans Libération (5/2/2015) pour révéler ce « double jeu avec notre République laïque : d’un côté montrer patte blanche dans les médias pour bénéficier d’une bonne image dans l’opinion publique et ainsi continuer à profiter des gros avantages de son contrat avec l’État, et d’un autre côté, diffuser de manière sournoise et pernicieuse une conception de l’islam qui n’est autre que l’islamisme, c’est-à-dire un mélange malsain et dangereux de religion et de politique ». Il écrit, entre autres, qu’en 2014, un des responsables du lycée avait énoncé, en présence de deux mécènes qataris : « Un jour, il y aura aussi des filles voilées dans les écoles publiques françaises ! » Poursuivi pour diffamation par le lycée, le professeur a finalement été relaxé. Dans Marianne, Soufiane Zitouni rappelle que « les prêches des imams sont signés UOIF, les cours d’éthique religieuse sont signés UOIF, faute d’avoir des livres d’Averroès dans le lycée Averroès, on y trouve des brochures de l’UOIF et des livres de Tariq Ramadan ». Les frères Ramadan y ont donné des conférences, et les élèves ont pu bénéficier de cours d’éthique de la part d’un certain professeur nommé Hassan Iquioussen…

Des dérives intégristes ?

Le président de l’association qui gère le lycée n’est autre qu’Amar Lasfar, président de l’Union des organisations islamiques de France (devenue Musulmans de France), président de la Ligue islamique du Nord et recteur de la mosquée de Lille-Sud. Or, comme le soulignait sur France 24 François Burgat, politologue spécialiste du monde arabe et directeur de recherche au CNRS, « l’UOIF est indissociable de l’idéologie des Frères musulmans ». Si le lycée réaffirme, sur sa page Facebook, son « respect des valeurs républicaines », il est par ailleurs accusé de tenir un double discours. En témoigne cette intervention du Frère musulman Omar Abdelkafi très modérée sur sa vision des femmes. Devant les caméras, il explique aux élèves (séparés en deux rangées garçons-filles non mélangés) que « la femme peut apporter beaucoup de choses à la civilisation », alors qu'il déclarait, un an plus tôt, que « la femme qui sort les cheveux découverts mérite le châtiment de la tombe ».

C’est suite, finalement, à la publication du livre des deux journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot Qatar Papers (Michel Lafon) révélant que Qatar Charity, une ONG proche de Doha, a versé 4,2 millions d’euros au lycée et au centre islamique de Villeneuve-d’Ascq que Xavier Bertrand décide de couper les vivres au lycée. La suite, on la connaît...

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 14/10/2022 à 19:57.
Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

29 commentaires

  1. L’affaire est à mon sens plus subtile. A l’approche des élections, le candidat sans parti a décidé de montrer au peuple qu’il ne mangeait pas du pain de l’électoralisme exotique en gelant la subvention de la Région au lycée avéroes et tenter de rafler des voix LR et du RN qu’il déteste tant. Mal lui en a pris car les subventions ont l’air d’être légales comme toutes les précédentes, et l’arroseur est devenu « l’arrosé ». D’ailleurs, n’a-t-il pas du également se séparer d’un vice-président du conseil régional trés proche de lui et qui se démène dans la seconde ville du département dans le même genre d’affaires mais à l’envers (financement de plusieurs asso islamistes), sont procés a encore été repoussé ! D’autres affaires pourraient aller dans ce sens !
    Tout cela n’est que posture, les « copies » ne valent jamais l’original ! On est mal patron on est mal ! A fuir à tout prix !

  2. Les images des abords du lycée Curie de Nanterre sont insupportables, qu’il s’agisse des vêtements portés par certains élèves (ce que le ministre refuse de condamner, laissant aux chefs d’établissement le choix de la décision d’interdiction… éventuelle), des jeunes s’attaquant à la police devant l’établissement alors qu’ils devraient être en cours, de plus jetant des mortiers sur les policiers qui tentent de les disperser en lançant des grenades lacrymogènes : est-on devant un lycée ou sur un champ de bataille ukrainien ? Pauvre école infiltrée par les frères musulmans en toute impunité.
    Et même officiellement, comme le lycée Averroès de Lille, présenté comme le meilleur de la contrée (facile, quand on connaît le niveau réel de certains établissements et de de l’enseignement qui y est dispensé). Quelle est la réaction du rectorat de Lille ? Comment peut-il accepter le fonctionnement d’un tel établissement et son financement par le Qatar ?
    Toutes les informations révélées par l’article d’Iris Bridier me révoltent. Qui mettra fin à ce détournement de l’Education nationale que nous avons appréciée et servie avec bonheur… naguère… ?

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