Le 16 octobre 2020, Samuel Paty, professeur d’histoire-géographie, était décapité à la sortie de son collège, à Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines, par un réfugié tchétchène : Abdoullakh Azourov. Dix jours auparavant, il avait montré à ses élèves certaines des caricatures du prophète Mahomet publiées par Charlie Hebdo, tout en proposant à l’avance à ses élèves de confession musulmane qu’un tel spectacle aurait pu choquer de quitter momentanément la classe.

La nouvelle de son assassinat fait évidemment l’effet d’un coup de tonnerre. Et, comme d’habitude, les mondes médiatiques et politiques assurent que « plus rien ne sera jamais comme avant ». T’as qu’à croire, Grégoire. En effet, après chaque crise financière, épidémie de Covid, arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle en avril 2002, attentats du Bataclan, il nous est immanquablement promis qu’après ne sera plus comme avant ; sauf que l’après ressemble bien souvent à l’avant.

La preuve: on sait désormais qu’avant le meurtre de ce professeur, tout se passait déjà comme après ; c’est-à-dire comme maintenant. Avec un seul mot d’ordre, dans les ministères compétents : le « pas-de-vaguisme », pour reprendre le néologisme de Mickaëlle, la jeune sœur du défunt, disant toute sa colère dans le quotidien Libération : « À vouloir impérativement régir l’ordre social qui se pratique sur le terrain par du “pas-de-vaguisme”, par des accommodements dits “raisonnables” et à coups d’antiracisme dévoyé, l’État en finit par sacrifier l’ordre public, notamment en termes de morale, de sécurité et de paix publique […] Ériger mon frère au grade de héros implique la hauteur de son sacrifice à la nation. Mon frère ne s’est pas sacrifié, il a été sacrifié par tous ceux qui pouvaient et auraient dû le protéger. »

Et la même de poursuivre : « Ce qui est insupportable, c’est qu’à les entendre, on dirait que mon frère n’est pas une victime du terrorisme islamiste. […] On lui a d’abord demandé d’éteindre l’incendie, de s’excuser. Pourtant, il n’a fait qu’appliquer le programme puisque l’enseignement des caricatures en fait partie. Il n’empêche, l’Éducation nationale ne l’a pas soutenu. Au fond, c’est comme si Samuel était responsable de sa mort. »

De son côté, Maître Virgine Le Roy, avocat de la famille de Samuel Paty, n’est guère plus clémente vis-à-vis de nos institutions : « Des fautes ont été commises, tant du côté de l’Éducation nationale que du ministère de l’Intérieur, sans lesquelles Samuel Paty aurait pu être sauvé… »

Du côté de la première, le « pas-de-vaguisme », donc. Tout se passe bien. Le niveau scolaire monte aussi vite qu’un marsupilami en haut de son cocotier, les élèves n’ont jamais été aussi sages et prévenants devant leurs professeurs. Des générations entières de jeunes Français se ruent dans les concours pour exercer ce beau métier. Quant aux violences en milieu scolaire, il ne s’agit, bien sûr, que d’une simple vue de l’esprit, comme chacun sait.

Du côté du second, c’était déjà plus complexe, nos services de renseignements ne pouvant agir efficacement que s’ils sont bien renseignés ; et comme l’Éducation nationale a toujours présenté une fâcheuse tendance à faire de la rétention en la matière, nul doute que nos agents avançaient sûrement un peu dans le brouillard. Pourtant, malgré les menaces de mort et les appels au lynchage de professeurs sur les réseaux sociaux, une note du renseignement territorial, toujours citée par Libération, affirmait, le 12 octobre 2020, soit quatre jours avant le drame : « Aucune tension majeure n’est palpable, tant du côté de la communauté éducative que de la fédération des parents d’élèves. »

Pour rappel, cette note demeurée fameuse des Renseignements généraux, en avril 1968, selon laquelle le printemps s’annonçait des plus « calmes ».

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17 juin 2022 à 19:11

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26 commentaires

  1. Le Pire est devant nous. Chacun le sait, à commencer par les Gouvernants.
    Mais ils s’obstinent à mettre la Poussière sous le Tapis rose de la Macronie.
    Les Rares qui vont tenter de la récupérer sont ostratisés.
    Armée, Education, Santé et Sécurité sont au plus bas ! SILENCE !

  2. Dissimuler les faits, pratiquer le déni, détruire des preuves, attaquer ceux qui osent parler : dans de nombreux domaines nous sommes dans un mode de gouvernance digne d’une voyoucratie.

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