Les Républicains ont-ils vraiment trahi la droite, comme l’affirme Zemmour ?

LR

Éric Zemmour, en rappelant que les Républicains et, auparavant, l’UMP dont ils sont issus sont une trahison du RPR, a évidemment frappé là où ça fait mal. Il l’a fait devant le Mouvement conservateur, la branche Manif pour tous des Républicains, auparavant Sens commun. La réponse a été dans la ligne d’un parti qui se prétend héritier du gaullisme. Par une manœuvre interne, on va choisir le candidat en cadenassant la procédure. C’est le congrès, l’ensemble des militants à jour de cotisation, qui désignera le candidat officiel parmi ceux qui auront été parrainés par 250 élus.

Pas question, donc, d’une primaire ouverte comme celle qui avait choisi Fillon, ni d’accepter des candidats extérieurs. Surtout pas Zemmour. En revanche, ceux qui avaient quitté LR par opposition à Wauquiez, Bertrand et Pécresse pourront y participer s’ils le souhaitent. Le président des Hauts-de-France, qui avait affiché une posture « gaullienne » en se présentant comme un homme devant le peuple, rentrera sans doute au bercail, en bon manœuvrier politicien et matois qu’il est - tout le contraire d’un gaulliste. Ce grand arrangement pour assurer la survie de l’appareil est un triple aveu qui passera inaperçu aux yeux des militants sincèrement attachés au parti.

Le premier aveu consiste à dire sans ambages que le parti qui se réclame du gaullisme correspond à ce que de Gaulle méprisait par-dessus tout, une féodalité fermée sur ses intérêts. LR a perdu les deux tiers de ses adhérents et n’en compte plus guère que 80.000.

Le second aveu touche à l’orientation idéologique des Républicains. Le RPR avait été créé par Jacques Chirac avec une réalité, être son vecteur pour l’Élysée, et une apparence, restaurer un gaullisme patriote et conservateur face au giscardisme, centriste, progressiste et européiste, représenté par l’UDF. En 1995, Chirac entrait à l’Élysée par la rive gauche, au son de la fracture sociale. Les RPR conservateurs avaient, comme Pasqua, choisi Balladur ainsi que la plupart des centristes. Sous Sarkozy, « l’Américain » qui détestait le mot « conservateur » et se contentait de jouer les « durs » pour la galerie, le RPR d’origine était parqué dans une réserve : la « droite populaire », dont la tête de file est aujourd’hui député européen du RN, Thierry Mariani.

LR est ainsi parvenu au degré zéro de l’idéologie. C’est une machine à gagner les élections locales en raison d’assez bons gestionnaires ancrés dans leurs fiefs. Quant aux idées, quand on ne les met pas entre parenthèses par amour du « concret », c’est-à-dire de toutes les compromissions locales avec les minorités « genrées », « racialisées » ou immigrées, elles offrent l’image bigarrée d’un marché où passent les modes sondagières et leur vocabulaire stéréotypé, de l’écologisme au progressisme. Plus rien à voir avec le gaullisme, c’est-à-dire la priorité de l’intérêt national.

Ce fouillis est souvent macro-compatible : les mauvaises langues prétendent que le congrès de LR aura pour vocation de choisir le Premier ministre de Macron réélu. Les candidats de « droite », Retailleau ou Wauquiez, s’étant retirés, Ciotti ne faisant pas le poids, il subsiste des carriéristes comme l’emberlificoteur de grand talent, Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, cette candidate dont le sexe est promu pour cacher l’absence du moindre commencement du début d’une idée, et Michel Barnier, qui semble nourrir un destin de Beckett, eurolâtre devenant pourfendeur de l’européisme.

Le troisième aveu est celui de l’ambiguïté par rapport à Zemmour : « On ne doit pas l’inviter à la table. Il faut une digue. » Bref, on refait, en plus mou, le coup de la ligne rouge autour du Front National, compréhensible à l’époque de Jean-Marie Le Pen.

Mais la cause de cette tactique est ailleurs. Le RPR n’avait pas eu le courage de l’alliance avec le FN aux élections locales en raison du poids des groupes de pression minoritaires en son sein. Les choses sont devenues plus difficiles dès lors qu’en voix, « l’extrême droite » a pesé, dans certains scrutins, plus lourd que le centre droit. Zemmour est à 13 % dans les derniers sondages, à un point de Xavier Bertrand et à trois de Marine Le Pen. Le scénario se reproduit avec une double issue qui explique l’ambiguïté de LR : une chance apparaît que Marine Le Pen ne soit pas au second tour et que le candidat LR y soit. La maison serait sauvée. Mais un risque se fait jour : que ce soit Zemmour qui soit présent, et c’est pourquoi il faut désormais qu’il fasse peur. Il faut qu’il prenne des voix au RN mais pas à LR : du gaullisme pur jus !

Christian Vanneste
Christian Vanneste
Homme politique - Ancien député UMP, Président du Rassemblement pour la France, Président de La Droite Libre

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