Les Américains vont-ils vraiment quitter la Syrie ?

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Trump l’a dit, mais le fera-t-il ? Plusieurs jours après l’annonce fracassante du départ américain de Syrie, rien ne s’est passé. Aucun préparatif de départ n’a été observé et les membres des forces spéciales continuent de patrouiller dans Manbij comme si de rien n’était.

Certes, la démission de Mattis, le secrétaire d’État à la Défense, reste à l’ordre du jour mais le doute demeure. Il a été renforcé par les déclarations du sénateur Graham, un proche du président américain. Selon lui, Trump est prêt à "ralentir" le retrait des soldats mais cette affirmation n’a pas été relevée par le président.

Pour les militaires américains, ce retrait est prématuré : ils considèrent que Daech n’est pas vaincu (ce qui est vrai) et que les Kurdes risquent de se faire « massacrer » par la Turquie. Ce n’est pas complètement faux, mais c’est faire peu de cas de la présence russe. Poutine ne tolérera jamais qu’une tuerie de grande ampleur se passe sous les yeux de son armée. Erdoğan a besoin de l’aval russe pour toute initiative importante et tout le monde le sait.

Les Kurdes ne s’y sont, d’ailleurs, pas trompés et ont appelé l’armée syrienne à se réinstaller dans les environs de Manbij, mais pas à Manbij même : tant que les forces spéciales américaines y sont, ce n’est évidemment pas possible. C’est pourtant un territoire syrien, mais si les Américains accordaient de l’importance à la souveraineté d’un pays, cela se saurait.

En attendant que la situation se décante, c’est dans la province d’Idleb que des combats violents entre islamistes viennent d’avoir lieu.

Ce territoire, situé au nord-ouest de la Syrie, est censé être administré par l’armée turque. Elle y contrôle des milliers de djihadistes (supposés ex-djihadistes…) qu’elle a regroupés au sein d’un Front de libération nationale. C’est ce Front qui a appuyé l’armée turque en janvier 2018 pour la bataille d’Afrin décidée pour en chasser les Kurdes.

Mais la moitié de ce territoire est encore tenu par l’ex-Front al-Nosra, devenu Hayat Tahrir al-Cham (HTC). Pour l’étendre encore, HTC a attaqué plusieurs positions d’un groupe rival nommé Noureddine al-Zinki. Les combats ont fait plus d’une centaine de morts et HTC l’a emporté. L’armée turque a laissé faire : Nourredine al-Zinki avait refusé l’allégeance à la Turquie et son élimination ne provoquera aucun regret.

L’armée syrienne, quant à elle, qui campe face aux positions de HTC, aimerait bien commencer la reconquête d’Idleb : près de 60.000 combattants plus ou moins islamistes (plutôt plus que moins, en fait) y sont regroupés et c’est une épine qu’il faudra bien extraire un jour. La présence turque reste un obstacle majeur.

L’armée syrienne a gagné la guerre, mais beaucoup reste à faire.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 20:58.
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Antoine de Lacoste
Conférencier spécialiste du Moyen-Orient

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