On s’est indigné, mercredi 6 juillet, de l’absence du préfet de police au Conseil de Paris. Une offense, a dit Mme Hidalgo, jugeant ce comportement « particulièrement inélégant ». Il est vrai qu’elle en connaît un rayon, question élégance… Comme Valérie Pécresse qui, le même jour, a lâché devant le conseil régional : « S’agissant des questions de sécurité, il faudra attendre la nomination du nouveau préfet de police… » Et de déclarer dans la foulée, tout aussi élégante, qu’elle était « désolée » de l’avoir « enterré trop vite ».

Peu délicat, en effet, sachant que le préfet Lallement était, ce jour-là, au fond de son lit, terrassé pour la troisième fois par le Covid. Pourtant, n’en doutons pas, il doit être vacciné, revacciné, survacciné, mais on voit bien que « cet homme n’a point de santé » : teint blafard, profil de biscotte, il flotte dans son costume sous une casquette trop grande pour lui. Il est vrai que depuis trois ans que l’équipe Macron lui fait porter le chapeau, M. le préfet fond à vue d’œil.

C’est donc sans véritable surprise que la rumeur médiatique, sur fuite du ministère de l’Intérieur, le donne partant. Son départ sera officiellement annoncé le mercredi 20 juillet à l’issue du Conseil des ministres, bien que « la date [soit] susceptible d’évoluer en cas d’imprévu ou de force majeure, mais elle a bien été arrêtée il y a une dizaine de jours », confirme la source ministérielle au Monde (10 juillet).

Ben oui, on ne sait pas : une émeute caniculaire sur resucée de gilets jaunes est toujours possible, et le fusible Lallement a déjà beaucoup servi.

Didier Lallement aura tenu trois ans, trois mois et trente jours à a tête de la préfecture de police de Paris. Il y a remplacé Michel Delpuech, un préfet jugé « trop laxiste » face aux manifestations des gilets jaunes et surtout des casseurs qui ont saccagé l’Arc de Triomphe, le 1er décembre 2018. Lallement a la réputation d’être « un homme à poigne » et « au caractère bien trempé » (Franceinfo, 18/3/2019). Tout ce qu’il faut pour mater cette chienlit qui terrifie l’Élysée. Dont acte.

La gestion des manifestations du samedi va devenir musclée. Très musclée même, jusqu’à susciter le malaise des cadres de la gendarmerie. Elle semble surtout inefficace, à moins que le but alors recherché ne soit pas celui qu’on imagine...

En 2020, on lui reproche des propos acides à l’encontre des Français qui ne respecteraient pas assez les consignes sanitaires. Organisant une opération de police porte d’Orléans, à la sortie sud de Paris, afin d’empêcher les départs en vacances de printemps, il déclare : « Ceux qui sont aujourd'hui hospitalisés, qu'on trouve dans les réanimations, sont ceux qui au début du confinement ne l'ont pas respecté. Il y a une corrélation très simple » (BFM TV, 3/4/2020). Rétropédalage quelques heures plus tard lors d’une conférence de presse, mais on notera que le préfet ne faisait là que reprendre le matraquage officiel diffusé quotidiennement sur les ondes.

Surtout, le préfet Lallement est l’ennemi de la mairie de Paris sur la question des camps de migrants et autres collines du crack. L’Histoire s’écrit ainsi : « L'intransigeant Didier Lallement » veut virer ce beau monde hors de Paris alors que « du côté de la mairie de Paris, on est plutôt favorable à la création de nouvelles salles de consommation, pour éviter que les fumeurs de crack se droguent en pleine rue » (Francetvinfo, 31 mai). Bref, c’est la guerre.

Et puis est arrivé le fiasco du stade de France, assumé totalement par le Préfet qui a, une fois de plus, accepté de jouer les fusibles pour le ministre de l’Intérieur. Il réclamait de pouvoir partir, on l’a retenu par ses galons : pas question de sembler céder à la pression. On va donc le lâcher dans la chaleur de l’été, avec les félicitations de Gérald Darmanin.

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11 juillet 2022 à 20:03

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