Chaque semaine, la République macronienne qui ne manque décidément pas d’idées nous gratifie de son lot d’atteintes aux libertés fondamentales.

Quand il ne s’agit pas de faire taire ses opposants ou de les empêcher de manifester, on s’attèle alors à les ficher. Ce n’est pas très nouveau, mais il paraîtrait que, cette fois-ci, certains se soient particulièrement surpassés.

Au sein du ministère de la Justice, il existe une base dénommée « Cassiopée » qui rassemble les données des prévenus, victimes ou témoins des dix dernières années. Mais au moment des manifestations contre la réforme des retraites, des fonctionnaires de ce ministère ont cru bon devoir créer un tableur Excel™ supplémentaire dans lequel on a répertorié les personnes placées en garde à vue en détaillant leurs noms, prénoms et dates de naissance.

La nouveauté réside toutefois dans l’ajout de la petite case portant la mention : opinion politique. On ne sait jamais, des fois que ça intéresse le ministre de la Répression d’État ou de l’Inaction française, comme l’a écrit malicieusement Gabrielle Cluzel.

Devant le tribunal, le représentant du ministère s’est justifié en indiquant que ce fichier permettait d’avoir des informations en temps réel, ce que Cassiopée ne permettrait pas. Pour la Chancellerie, qui n’est naturellement responsable de rien, elle a donné à ce tableur Excel™ le doux nom d’« outil pour la gestion locale ».

Précisons que dans la mesure où, cette fois-ci, des personnes de gauche seraient davantage visées par ce fichier, l’indignation peut éclater au grand jour. Cela a commencé par Mediapart, suivi de près par la LDH (Ligue des droits de l’homme) et le SAF (Syndicat des avocats de France ; enfin… de certains avocats de France).

Or, la semaine dernière, quand il a fallu combattre les interdictions illégales de manifester, nombreux sont ceux qui, semble-t-il, étaient partis plus tôt en week-end. Évidemment, ce fichage est une atteinte, grossière, de plus, aux libertés fondamentales, et notamment à la protection de la vie privée ou à la liberté d’opinion. Mais c’est, en France, une très vieille histoire. Dès le XVIIIe siècle, les pouvoirs publics avaient institué plusieurs systèmes d’enregistrement pour lutter contre la criminalité et l’errance.

Depuis les années 1980, de nombreux fichiers sont créés, et toujours sous le prétexte de la nécessité de l’ordre public. On connaît, par exemple, le FIJAIT (Fichier des auteurs d’infractions terroristes), le FNAEG (Fichier national automatisé des empreintes génétiques), le STIC (Système de traitement des infractions constatées) ou encore le TAJ (Traitement des antécédents judiciaires). La CNIL est censée réguler l’ensemble des données de ces fichiers. Elle n’empêche néanmoins pas les abus de certains pouvoirs qui les utilisent dans un but exclusivement politique.

On peut évoquer les fameuses fiches S, qui servent autant pour répertorier les islamistes radicaux que les radicaux de droite (l’extrême droite ?). Il est également connu que ce dispositif n’a d’intérêt que s’il permet une remontée d’informations via des personnes que ne sont ni dangereuses ni radicalisées. De surcroît, ce fichier ne mentionne pas les raisons précises de l’inscription de la personne. Les atteintes aux libertés ne sont donc plus à démontrer.

Aujourd’hui, les ligues de vertu d’extrême gauche se plaignent d’être un peu chatouillées par ce qui leur arrive. Mais à force de permettre pour d’autres l’inacceptable, on se retrouve pris à son propre piège.

Malgré tout, espérons que le tribunal administratif interdira ces fichiers « sauvages », lors de son délibéré attendu jeudi prochain.

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16 mai 2023 à 20:53

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23 commentaires

  1. Tout ce qu’a fait la CNIL, c’est exiger que les entreprises déclarent leurs fichiers clients, fournisseurs et personnel. Ils impriment tout en papier et en ont des kilomètres de rayonnage.
    Les fichiers illégaux ? Ils ne sont de toute manière pas déclarés.

  2. Ça fait du bien de voir que les Français commencent enfin à se réveiller et se révolter. L’orage gronde. À quand le bouquet final?

  3. Bof ! avec les puces fabriquées par ce cher Elon bientôt on aura tous notre puce dans le bras ou dans le cerveau. Bel avenir.

  4. « En même temps » comment la gauche pourra-t-elle dire que c’est l’extrême droite alors que c’est en fait l’extrême gauche si on fiche tout ce monde ???

  5. Pour simplifier et alléger les fichiers, on pourrait effacer tous les noms des manifestants d’extrême gauche, casseurs, black box et ne garder que ceux qui manifestent pour le souvenir de Jeanne d’Arc

  6. A partir de quelle information la case opinion politique pourrait elle être remplie?
    C’est ridicule.

  7. Ces fichiers ça me rappelle les années 1940 c est nauséabond je rappelle que les principaux dirigeants vichystes se nommaient Laval Daladier Doriot Déat comme par hasard de gauche

    1. Une vérité qui devrait être rappelée plus souvent, surtout lorsque d’aucuns à gauche comme toujours, traitent de Vichystes un peu tout le monde. Or c’est eux, avec ces tristes sires qui ont bâti Vichy…

  8. De toute manière, entre droite extrême et extrême droite à partir du radicalisme de gauche…et l’état habituel de la « gestion locale » dans notre beau pays…

  9. Le fichage des individus ? C’est selon l’opinion de ces individus, bon ou mauvais, …. C’est exactement comme les extrêmes : Staline c’est bien, Hitler ce n’est pas bien. Mais ne demandez surtout pas à ces « juges » bien pensant d’argumenter leurs opinions ….

  10. Ah les années 1980, pour ne pas dire, après 1981 et le règne mitterrandien.
    Les français paient toujours les conséquences de ces années de « joie de vivre », à condition d’être « de gauche ».
    C’est étrange que personne à gauche n’est eu l’idée de créer un fichier pour tous les élus ayant été en délicatesse avec la loi, soit « EDL » pour respecter le goût français des abréviations à donner le tournis.

      1. Et encore, je me demande si ils, les gauchistes, ne nous sortiront pas qq-chose un jour, histoire de faire oublier les leurs de magouilles.

  11. Aie ! Et dire qu’en ai formé certains aux bases de données. Là dessus, la France et ses fins limiers se sont fait tirer l’oreille car ils oublie de faire le ménage des données de plus de 20 ans … Croyez-vous qu’ils ont fait le ménage ?

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