« Le combat n’est pas terminé. Nous saisirons le Conseil d’État sur le passe sanitaire »

maxime thiebaut

Au micro de Boulevard Voltaire, Maxime Thiébaut réagit à la validation de l'extension du passe sanitaire par le Conseil constitutionnel.

 

 

 

Le Conseil constitutionnel a validé à 90 % l’extension du passe sanitaire. Les opposants à ce passe ont été déçus. Pourquoi est-il validé ?

Ce n’est pas un avis, c’est une décision qui s’impose à l’ensemble des pouvoirs publics : l’exécutif et le législatif. Le Conseil constitutionnel est un organe foncièrement politique : ses membres sont nommés par le pouvoir politique, les chambres et le président de la République. Forcément cet organe va, certes, juger en droit, mais aussi juger en opportunité. Ainsi, il a consacré le principe de fraternité comme un principe à valeur constitutionnelle et, en 1971, il a dit décider de la liberté d’association.

On aurait pu s’attendre à ce qu’il érige comme principe que l’on ne peut pas distinguer les personnes au regard de leur situation de santé et, ainsi, refuser le passe sanitaire. Il n’en a rien été. Le Conseil constitutionnel a rendu une décision des plus laconiques dans sa motivation : il a considéré que le passe sanitaire n’entravait pas les libertés et qu’il pouvait donc être utilisé par le Premier ministre. Cela me dérange car la distinction entre personnes vaccinées et non vaccinées pose problème. Cette vigilance mise en place est également problématique. Derrière le passe sanitaire, il y a la question de l’obligation vaccinale. Même le Premier ministre avait reconnu devant le Sénat qu’il y avait une très forte incitation à la vaccination via le passe sanitaire. Le Conseil constitutionnel, comme le Conseil d’État, a préféré éluder la question.

 

Par la voix de son ministre, le gouvernement a déclaré qu’il n’y avait aucun lien entre le passe sanitaire et la santé des Français.

Le Conseil constitutionnel est-il là pour contrôler l’efficacité de la vaccination ? Non. Il est dans un contrôle restreint, celui de voir s’il y a des atteintes aux libertés fondamentales, mais il aurait pu dire qu’il y avait un problème dans l’utilisation du passe car il n’y a pas de finalité sanitaire. Il a, a priori, une finalité de limite de l’épidémie, mais on sait que dans les faits, ce passe sanitaire n’est pas si efficace, car la vaccination n’a pas l’efficacité attendue. Les gens peuvent être contagieux même doublement vaccinés. On en voit les limites.

Nous tiendrons ce discours devant le Conseil d’État lorsque nous le saisirons dans les prochaines semaines. Un référé est prévu avec beaucoup d’avocats et de juristes contre la mise en place du passe sanitaire, via les décrets d’application. Le passe sanitaire est instauré comme un outil que peut mettre en place le Premier ministre mais il n’y est pas obligé. S’il le met en place, il doit respecter les principes de proportionnalité, d’adaptabilité. Le Conseil d’État peut censurer la mise en place. Le combat n’est pas terminé.

 

Beaucoup se posent la question sur le possible conflit d’intérêts entre Laurent Fabius et son fils Laurent, directeur exécutif du cabinet McKinsey qui aide le gouvernement à mettre en place la stratégie sanitaire.

C’est une attaque politique et je n’irai pas sur ce terrain du conflit d’intérêts. Je note juste que les apparences sont mauvaises, on donne le bâton pour se faire battre. Il est certain que la population s’en inquiète. C’est la même chose lorsque le rapporteur de l’avis du Conseil d’État est un conseiller régional En marche ! Je ne dis pas que ce conseiller d’État a mal fait son travail, je ne juge pas son comportement et son professionnalisme, mais les apparences sont mauvaises.

Comment voulez-vous instaurer la confiance envers nos institutions quand vous avez des éléments si catastrophiques sur le plan de la communication ? Cela me dérange. L’impartialité n’est pas subjective, c’est aussi une vision objective. Donne-t-on l’apparence que notre décision est impartiale ? Lorsque les juges ont un doute par rapport à cela, ils se déportent et je pense qu’il aurait été sain que cela soit fait pour que l’opinion publique soit rassurée.

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Maxime Thiébaut
Docteur en droit public

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