Le roman de l’été : La Reconquête (7)

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Durant les jours qui suivirent, les émeutes s’amplifièrent, venant des cités et des banlieues chaudes, des centaines de morts et des milliers de blessés furent comptabilisés. Les CRS et la police étaient débordés tant par l’ampleur des émeutes que par leur violence. Les casseurs venus des cités pillaient, frappaient, brûlaient et tuaient.

En parallèle, des milices se formaient dans toutes les grandes villes, une sorte de coagulation s’était produite entre ouvriers historiquement d’extrême gauche et bourgeois conservateurs, entre petits patrons et petits salariés, entre agriculteurs et retraités. Leur point d’accord avait été la fiscalité excessive, c’était désormais la peur de l’invasion migratoire, de la violence et du terrorisme. Maxime avait été l’un des précurseurs en la matière. Depuis Carhaix, il avait réussi à mobiliser toute la Bretagne. Chauffeur routier depuis quelque temps, il était un adepte des réseaux sociaux et il avait du charisme, ce qui en avait fait l’un des leaders naturels du mouvement. La seconde assemblée citoyenne avait été un immense succès : en 24 heures, ils avaient réuni près de 1.500 personnes. Il avait fait un rapide discours sur le projet de créer des milices de protection des citoyens pour faire face aux émeutes des cités qui menaçaient de déborder dans les autres quartiers. La réaction de la salle avait été unanime, même les maires des huit villes les plus proches avaient levé la main pour voter favorablement.

Les prises de contact se multipliaient entre ex-leaders des gilets jaunes, leaders associatifs, militants politiques, mais aussi élus locaux. Des centaines de maires de petites villes acceptèrent de se joindre au mouvement et prêtèrent des salles communales pour que s’organisent les réunions d’information et le ravitaillement des miliciens. Plusieurs personnalités soutinrent le mouvement, y compris en Europe. Viktor Orbán et Vladimir Poutine se fendirent de tweets de soutien, Matteo Salvini était allé jusqu’à faire une conférence de presse pour soutenir le mouvement du peuple, Donald Trump signifia également sa compréhension envers les manifestants. Louis de Bourbon posta une vidéo sur Facebook pour exprimer ses inquiétudes face à l’inaction gouvernementale. Il avait de plus en plus souvent pris la parole sur les réseaux, ces dernières années, sa page Facebook avait récemment atteint le million de likes quand ses comptes Twitter et Instagram comptaient 800.000 followers à elles deux.

Criant au retour du fascisme et des ligues, les médias en appelaient à la responsabilité du gouvernement.

Ce dernier, hébété face à la violence des émeutes et à la réaction populaire, était divisé. Trois groupes se constituèrent : ceux qui voulaient passer sous loi martiale et envoyer l’armée dans les banlieues, ceux qui appelaient à l’apaisement mais ne savaient pas comment faire, et ceux qui hésitaient tout bonnement à fuir du gouvernement.

Emmanuel Macron était avec le chef d’état-major des armées, le général Borelet, son chef d’état-major particulier l’amiral Rogel, son Premier ministre et son ministre des Armées :
– Vous pensez donc que la situation est inextricable en l’état ? Emmanuel Macron s’adressait à son CEMA.
– Oui, Monsieur le Président, nous faisons désormais face à 900 zones de conflit qui sont de véritables souricières. Y envoyer des hommes serait suicidaire, c’est une véritable guerre urbaine qui s’y joue. Nous avons recensé plus de 700 lance-roquettes et des milliers d’AK-47. Cela, sans compter les armes de poing. La seule solution est d’envoyer des blindés, seuls à même de protéger nos soldats.
– Et en combien de temps la crise pourrait être réglée ?
– Tout dépend de la latitude que vous me donnez. En cas de loi martiale, et avec l’assurance que vous me laisserez gérer l’intégralité du conflit, nous aurons pacifié la majeure partie des points chauds en huit jours. Mais soyons clairs, il sera impossible de revenir en arrière et il y aura de nombreuses victimes, des militaires, des islamistes, mais aussi des civils innocents. La diffusion via les réseaux sociaux de nos actions ne fera que renforcer la détermination de nos ennemis qui sauront que nous les prenons au sérieux et que nous sommes prêts à aller au combat. Ce sera aussi leur cas. Ils n’hésiteront donc probablement pas à prendre des otages. Et nous ne pourrons pas céder.
– Amiral, qu’en pensez-vous ?
– Monsieur le Président, je dois ajouter un point dont vous avez connaissance mais qui est crucia : des dizaines de milliers de Français se regroupent au sein d’un groupe radical qui se fait appeler les Natifs. Ils ont commencé à former des milices armées dans une centaine de villes pour protéger leurs quartiers. Si jamais des émeutiers viennent à leur rencontre, ce sera incontrôlable. Ça s’est déjà produit de manière sporadique, les
Natifs se contentent pour l’instant de faire de la provocation en restant en bordure des points chauds. Mais si des têtes brûlées vont plus loin, comme cela s’est passé à Bordeaux, en se rendant au cœur des émeutes, le même drame se reproduira, des Français tueront des Français.
– C’est donc d’une guerre civile que nous parlons.
– Oui. L’autre issue est politique, et elle repose sur vous. Si vous démissionnez, je vous suivrai, car la France ne pourra pas survivre à un nouvel échec dans sa tentative de restauration de l’autorité. Si vous démissionnez, c’est que je n’aurai pas su vous convaincre de l’urgence que nous avions à déclarer la loi martiale.

Macron était blême.« Ça va, Emmanuel ? » La demande venait de son Premier ministre.

– Je ne sais pas, Valérie, les scénarios sont tous effroyables.

Il avait déjà pris sa décision, et Valérie Pécresse le comprit à ce moment-là.

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