Dernièrement, la Russie a bombardé avec des missiles conventionnels une cinquantaine de cibles en Ukraine. En effet, le front s'étant figé depuis six mois, nul ne sait parmi les stratèges en chambre (ceux que les Anglo-Saxons appellent les généraux en fauteuil) si et quand les Russes tenteront de porter l'estocade finale aux Ukrainiens, soutenus (de trop loin ?) par les Occidentaux. Des chars Leopard allemands ont été promis aux Ukrainiens par de nombreux clients de l'industriel Krauss-Maffei, mais nul ne sait exactement quand ces Panzers de l'OTAN bénis par Washington pourront ou non reconquérir les territoires perdus par les descendants du héros de légende Ivan Mazepa.

Qu'en est-il, aujourd'hui ? Les forces russes cherchent depuis plusieurs mois à reconquérir, sans beaucoup de succès pour l'instant, la ville de Bakhmout qui ne semble plus représenter qu'un enjeu très limité au plan stratégique, mais dont la reprise pourrait être un signal de victoire psychologique pour l'armée russe et ses mercenaires de la société militaire privée Wagner. Les Ukrainiens tentent de résister aux pressions du « rouleau compresseur » russe qui semble avoir eu, depuis un an, quelques « ratés » dans son moteur. Périodiquement, la Russie montre ses muscles hypersoniques et nucléaires en lançant avec plus ou moins de réussite quelques missiles, conventionnels pour l'instant, vers l'ensemble du territoire ukrainien. Aujourd'hui, les Occidentaux font le « dos rond » en attendant que l'énorme machine logistique de l'OTAN puisse se mettre en place et appuyer les efforts de ses alliés ukrainiens dans sa résistance à l'agresseur russe avant de lancer la reconquête des territoires occupés par les « zombies », le surnom donné aux soldats russes par les Ukrainiens.

Trois options peuvent alors se présenter aux Ukrainiens et à leurs alliés occidentaux.

La première serait que l'Ukraine résiste sur la ligne de front, moyennant une retraite en bon ordre sur des lignes de défense préparées à l'avance, en attendant, à l'instar de Foch et de Pétain en 1917, « les chars et les Américains » pour renverser le rapport de force en leur faveur. Seulement, il n'est pas sûr du tout, à ce stade, qu'une centaine de chars Leopard soient suffisants pour que leurs nouveaux utilisateurs ukrainiens puissent obtenir ne serait-ce qu'un début de victoire décisive, opérative ou même tactique. En effet, l'arithmétique de l'art de la guerre exigerait théoriquement un rapport de force de 3 contre 1 en zone ouverte, ce qui se compliquerait en zone urbaine où les chars ne représentent plus un facteur toujours décisif mais plutôt des cibles supplémentaires et visuellement symboliques pour les Occidentaux. Si, par bonheur, les Russes craquaient devant les Panzer ukrainiens, appuyés ou non par les F-16 américains, alors Poutine pourrait menacer l'Occident de ses armes hypersoniques et nucléaires, quitte à en utiliser une ou deux de plus ou moins faible puissance, non pas en Ukraine, comme veulent bien le penser certains observateurs, par souci sans doute de ne pas effrayer le bon peuple, mais bien sur un pays de l'OTAN apportant un soutien trop visible et trop efficace aux Ukrainiens. Que se passerait-il, alors ? L'OTAN répliquerait, me direz-vous ! Oui, certes, mais comment ? Qui réagirait ? Les États-Unis, dont la Chine attend leur implication militaire en Europe ? Ou bien les fidèles alliés britanniques ou français, suivant le mode de délégation choisi avant ou après la riposte nucléaire des « méchants Russes ».

Une deuxième option, non souhaitée par les Occidentaux, pourrait être l'effondrement de leurs alliés ukrainiens, à court de munitions, de volontaires ou de conscrits, et surtout désespérés par la passivité de leurs parrains de l'Union européenne ou de l'Alliance atlantique. Alors, conformément aux vœux initiaux de Poutine, Zelensky serait assassiné ou partirait en exil. Un cessez-le-feu serait signé par le nouveau gouvernement ukrainien et des Casques bleus chinois et indiens viendraient rétablir la paix entre les deux belligérants.

La dernière option, finalement assez peu probable aujourd'hui, pourrait être une initiative de paix conduite ex nihilo par l'ONU sous l'égide chinoise et indienne pour obliger les belligérants à venir signer un cessez-le-feu aujourd'hui vu comme impossible et revenir au statu quo ante du 23 février 2022. Ce qui en résulterait serait sans doute une perte de vitesse des États-Unis d'Amérique en tant qu'hyperpuissance mondiale et une révision complète de la nature de l'Europe et de son positionnement géopolitique dans le monde. Les Français laisseraient le champ ouvert aux ambitions économiques d'une grande Allemagne au centre de l'Europe, neutre, voire finlandisée et vivant en paix sans que Poutine n'y voie rien à redire. Les historiens des temps à venir y verraient alors la fin de l'Empire américain qui se serait écroulé dans l'indifférence générale et l'avènement de l'autre monde, celui qu'on appelait avec un certain mépris le « tiers-monde » depuis 1952, décolonisé, fier d'avoir sauvé la planète. Le monde serait alors devenu multipolaire, comme le laissaient déjà présager les chutes du mur de Berlin et du rideau de fer, il y a à peine plus de trente ans.

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12 mars 2023 à 11:30

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30 commentaires

  1. Cette guerre n’est pas la notre. Ce fut simplement de notre responsabilité de faire respecter les accords que Zelinsky et US ont violé dés 2014.
    Arrêtons de soutenir militairement l’Ukraine, ce qui ne fait que prolonger l’agonie de ce pays et sa population.

  2. Ah que c’est beau de faire des plans sur la base de supputations… la réalité c’est : 1) Pouitine est fou et dangereux. 2) Depuis la chute du mur de Berlin, les Américains, au lieu de le calmer, n’ont cessé, avec l’aide passive de l’Europe, de le titiller, le provoquer, par un encerclement avec des bases US de plus en plus rapprochées de ses frontières. Pour l’instant sa réaction est celle de l’animal traqué qui donne un coup de patte… Demain s’il se sent complètement acculé, de quoi sera-t-il capable, « foutu pour foutu » ? N’oublions pas que la Russie possède plus de 6000 têtes nucléaires et de nombreux sous marins patrouillant dans les mers du globe, capables de lâcher leurs missiles de n’importe où, sur n’importe quelle capitale. 3) Les Chinois ne laisseront jamais les États Unis dominer le monde et les menacer. Alors négocions. Elle serait belle, la victoire sur la Russie si elle devait se faire au prix de la disparition de Paris, Londres et Berlin et rayées de la carte avec leurs habitants et d’une guerre mondiale avec les Chinois et eurs allies…

  3. Bakhmout sert aux russes de détruire progressivement les troupes ukrainiennes. L’essentiel pour Poutine est de sécuriser le Donbass et la Crimée qu’il ne lâchera jamais. L’Occident n’a rien compris à cette opération russe, ou ne veut pas comprendre et s’entête à vouloir aider l’Ukraine au risque de provoquer une guerre mondiale. Les USA ont toujours considéré la Russie comme son ennemie et usent tous les moyens pour essayer de nuire à ce pays. Mais à présent la Russie renforce sa présence dans le Monde et agrège d’autres Nations très puissantes comme la Chine. La domination des américains ne s’exerce que sur des pays qui se soumettent comme la France qui s’affaiblit et ruine son peuple dans l’inconscience totale. La folie de notre gouvernement jusqu’où ira-y-elle. Notre république ne vaut plus rien avec ses pseudo valeurs, il nous faut un autre système de gouvernance qui remettrait notre économie à flot et qui rendrait notre peuple plus heureux.

  4. N’est-ce pas le secrétaire général de l’Otan qui a dit que l’Ukraine tirait plus d’obus que les pays de l’Otan peuvent en produire. Alors comment ferait elle pour entrer en conflit avec la Russie avec des moyens supérieurs.

  5. Jusqu’à il y a peu, Bakhmut était considéré par les Occidentaux comme un des trois verrous du front du Donbass. Aujourd’hui, alors que Bakhmut s’est transformé en un désastre pour l’armée ukrainienne, les mêmes nous disent que Bakhmut n’a aucune importance ! Cependant, on note que les Ukrainiens continuent d’envoyer à l’abattoir de Bakhmut de grandes quantités de soldats dont l’espérance de vie est très courte et il semble qu’ils veuillent lancer une grande contre-offensive précisément en direction de Bakhmut.
    Le rapport de force est tellement défavorable à l’Ukraine (4 fois moins d’habitants que la Russie et une puissance économique beaucoup plus plus faible; le PIB par tête de l’Ukraine est le tiers de celui de la Russie) qu’on ne voit pas comment l’Ukraine pourrait vaincre la Russie. Sans l’assistance occidentale, cette guerre serait déjà terminée parce que l’appareil militaro-industriel ukrainien est hors service. Les Occidentaux vont-ils prendre le risque de provoquer le déclenchement d’une guerre mondiale pour tenter de préserver une hégémonie étatsunienne qui , quoi qu’il arrive, arrive à son terme. La Chine va devenir la première puissance économique mondiale avant de devenir la première puissance militaire. Le monde sous commandement étatsunien, c’est terminé.

  6. Si on comprend bien aucune des solutions n’est possible ou souhaitable ? Alors à quoi bon cet article ? Il y a d’autres possibilités : la crise cardiaque de Poutine seul dans son bureau (comme Staline). Et un oubli : 140 millions de Russes sont encerclés par un milliard d’Occidentaux et trois armées nucléaires. Et ils le savent. De quoi provoquer des crises cardiaques.
    Vite la paix…et une révision des frontières. Sans l’aide occidentale Zelinsky devra bien s’y résoudre. Tenu en échec Poutine aussi. La seule question est : quelles frontières : plus précisément les rives de la mer d’Azov, ukrainiennes depuis 2 siècles et le statut de cette mer.

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