[Grand angle] La France doit-elle craindre les effets du bulldozer Trump ?

Deux visions s'affrontent, celle du député européen RN Jean-Paul Garraud et celle de l'entrepreneur libéral Denis Payre.
© Capture d’écran TV5 Monde
© Capture d’écran TV5 Monde

À sa manière, entre provocation et menace réelle, Donald Trump secoue le Vieux Continent. Le président américain n’a jamais caché qu’il souhaitait protéger d’abord les ressortissants américains. Il ne fera donc aucun cadeau ni à l’Union européenne, ni aux pays qui la composent. Il rêve d’imposer de lourds droits de douane à l'Europe, donc à la France, comme il en a menacé le Mexique ou le Canada.

Faut-il s’attendre à l’ouverture d’une guerre commerciale avec les États-Unis, qui importent davantage de produits et services venus d’Europe qu’ils n’en exportent ? Le patron de LVMH Bernard Arnault a semblé applaudir les États-Unis de Trump et le dynamisme qu’il a déjà insufflé à l’économie américaine. Mais le défi est majeur, pour une Europe paralysée par les règlements, les divisions, par une immigration folle et un écologisme destructeur à caractère religieux. « L'élection de Trump donne aux États-Unis un élan formidable, confirme à BV le patron de la délégation RN au Parlement européen, le député Jean-Paul Garraud. Trump projette ce pays vers l'avenir et dessine un monde nouveau, dynamique, anti-wokiste, qui tranche sur l'Europe marquée par une tristesse et une médiocrité qui font peur, dont les mécanismes sont faussés et qui impose des migrants contre la volonté des gens. »

Bluff ?

Alors, Trump agite-t-il une vraie menace ou bluffe-t-il ? Il bluffe, estime Denis Payre, entrepreneur très actif aux États-Unis, fondateur de BusinessObjects ou Kiala et membre fondateur de l’entreprise patronale libérale CroissancePlus. Son analyse pourrait être utile au pouvoir français, aujourd'hui ou demain... « Trump tenait déjà ce discours-là lors de son premier mandat, explique Denis Payre à BV. Il se plaignait d’un déficit commercial de l’ordre de 300 milliards de dollars entre l’Europe et les États-Unis, mais ce déficit est du à un problème de qualité dans l’offre de produits américains, tout simplement… ils ne sont pas suffisamment attractifs. » Pour lui, l'ogre américain ne serait donc pas si fort.

La menace d’un bond des droits de douane aux États-Unis sur les produits français n’effraie pas l’entrepreneur. Car une guerre des droits de douane entraînerait, selon lui, une « catastrophe économique » aux États-Unis, avec un surcoût de 2.000 dollars par foyer américain. La Bourse américaine a d’ailleurs réagi négativement à cette perspective. « Il y a beaucoup de cinéma, balaye Denis Payre, mais pas de vrai bras de fer : Trump est un promoteur immobilier new-yorkais, c’est un roi du deal. Il faut regarder les choses en face et ne pas se laisser impressionner inutilement. »

Pour Denis Payre, un coup de poing sur la table suffira à faire reculer le redoutable président américain. « À l’époque, Jean Claude Junker [président de la Commission européenne de 2014 à 2019] avait réagi de manière assez futée en disant qu’on bloquerait des produits qui faisaient mal, comme les Harley-Davidson, car elles sont construites dans des bastions républicains aux États-Unis, et d’autres produits comme le bourbon. Cela avait rapidement fait reculer Donald Trump. » L’éventail pourrait être élargi aux alliés de Trump, avec un embargo sur les Tesla construites aux États-Unis, ce qui ferait mal à… Elon Musk !

« L'UE ne sait pas protéger les gens »

Enfin, « il faut rappeler à Trump que nous sommes des alliés dans l’OTAN face à la Russie et la Chine », poursuit Denis Payre. Mais, précisément, Trump ne cesse de répéter que l’UE va devoir payer la facture de sa défense par l’OTAN. « Si cela pousse l’Europe à se préoccuper plus de sa propre défense, c’est une bonne chose », conclut Denis Payre, qui se dit « surpris qu’on n’ait pas notre OTAN à l’échelle européenne : on n’a pas besoin des Américains pour avoir des armées qui soient inter-opérantes », dit-il.

Mais Jean-Paul Garraud est moins optimiste. Pour lui, le trumpisme va mettre l'UE au pied du mur. « Il ne peut pas y avoir de bras de fer entre les USA et l'UE, qui a montré sa totale inefficacité, estime-t-il. L'UE telle qu'elle est ne fera absolument rien en faveur de nos États, elle n'est pas opérationnelle du tout et n'a jamais été dans cette optique de protéger les gens : elle prône le libre-échange et multiplie les traités. » Pour le parti mondialiste et européiste et ses ramifications françaises, l'expérience Trump aura valeur de test. Si elle est aussi efficace que celle de Milei en Argentine ou de Meloni en Italie, elle gonflera les voiles des patriotes, en France et ailleurs, mais rendra plus difficile l'exécution de leur feuille de route.

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Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

47 commentaires

  1. Non la France doit se réjouir en souhaitant que ce ne soit pas que des mots. Vive trump. De tute manière plus il fait oeur plus les idiots feront de bêtises et plus c’est bon pour la France car ça avance la chute de ceuxs qui nous emmrdent depuis 1981

  2. Ce n’est pas la politique de Trump qu’il faut craindre, mais la réaction de nos dirigeants, tant nationaux qu’Européens, qui plutôt que de protéger notre souveraineté, vont une nouvelle fois se coucher et se plier mais surtout seront prêt à dilapider ce qu’il nous reste.

  3. La tactique de DT est connue mais encore incomprise surtout à Brussels. Il tonne, il menace, il invective, et c’est la panique comme au Mexique et au Canada, et sonnés, ces pays disent faire pareil dans l’autre sens, bravaches, mais en fin de compte, on se met à table pour négocier et DT est gagnant. Voyez le Groenland, le Danmark se souvient que ce territoire relève de son autorité et alerte Brussels, on envoie des navires de guerre, et là DT a de nouveau gagné, en plus Ursula pense qu’en achetant encore et encore des avions de combat US Trump va se calmer….Mais non, il faut en Europe un Trump qui parle avec lui d’égal à étal et si on en arrive à une occupation du Gro-enne-lande alors on parlera de l’OTAN.

  4. Trump semble assumer ce qu’il annonce. Nous verrons bien. Quant à l’Europe d’aujourd’hui ! Comment est-il possible qu’elle soit incapable, par exemple, d’envoyer séance tenante ne serait-ce qu’un Canadair pour aider les Pays victimes de graves incendies…Espagne, Grèce, Portugal ou même la Californie ? Et donc une véritable force militaire de défense ou de dissuasion…n’y songeons pas ! Ces Messieurs et Dame(s) de Bruxelles préfèrent se préoccuper de notre prochaine nourriture à base d’insectes. La totale inertie européenne permet à Poutine et Trump de jouer avec nous comme avec un ballon.

  5.  » L’UE telle qu’elle est ne fera absolument rien en faveur de nos États, elle n’est pas opérationnelle du tout et n’a jamais été dans cette optique de protéger les gens : elle prône le libre-échange et multiplie les traités.  »
    C’est le coeur de nos problèmes en Europe…

  6. Trump sort les dirigeants français de leur léthargie, de leur petit confort . Quant à l’Union Européenne, arrogante par nature, elle se voit confrontée à du réalisme conquérant, affiché, efficace . Peu habituée à cet exercice. Plus encline à contraindre ses populations qu’à se projeter vers les concurrents possibles. Effrayés nos dirigeants, ce qui confirme leur faiblesse et leurs potentialités de pacotille. Le robuste affronte sans sourciller. Le faible aboie, se dérobe, se couche. L’Union Européenne a négligé toutes les grandes innovations de ces dernières décennies, plus préoccupée par la forme des bananes : citons, pour les plus spectaculaires la batterie pour voitures, les éoliennes, les panneaux solaires, l’IA, la substitution des traitements agricoles toxiques, le téléphone portable, . Elles sont dans l’air du temps depuis des dizaines d’années mais elles nous sont passées sous le nez. Nous avions de l’avance sur l’hydrogène. Nous commençons à être débordés car nous négligeons totalement son application industrielle. Nous balbutions dans ce créneau. Les asiatiques et US occupent le terrain vierge, sans états d’âme. Nos capitaux nourrissent des associations, du fonctionnariat, de l’immigration massive improductive au lieu de s’orienter vers l’investissement, vers la recherche. C’est la réalité de l’Union Européenne, de ses composantes essentielles, dont la France. Un continent en devenir de soumission.

    • Vous ! Vous méritez le prix Nobel de l’éloquence et de la vérité. Merci. Pendant qu’on nous indique les fréquences de lavages de nos vêtements par des illuminés que nous payons grassement.

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