Genre, couleur : je suis un vieux con et je m’y perds dans ces mélanges !

chronique des Bridgerton

La lecture des gazettes nous offre, parfois, de délicieux moments d'émerveillement. Ainsi, le magazine économique Challenges nous informe que la télévision britannique Channel 5 met en chantier une série en trois épisodes sur la deuxième épouse du roi Henry VIII, Anne Boleyn, femme de lignée royale et mère de la reine Élisabeth Ire. La pauvre Anne, accusée de toutes sortes de turpitudes, est décapitée, trois ans après son mariage. C’est, sans doute, ce funeste destin qui attire les littérateurs autant que les cinéastes. Immortalisée par Hans Holbein le Jeune et bien d’autres, elle ne montre aucune particularité physique, sinon qu’elle avait, paraît-il, le teint un peu plus foncé que le blanc d’albâtre en cour à l’époque. Est-ce pour cette raison que la télévision a choisi, pour incarner la reine, une actrice totalement mélane (je n’ose plus écrire « noire ») ? Henry VIII en avait peut-être rêvé : Channel 5 l’a fait.

Le site AlloCiné navigue, lui, dans le monde de l’espionnage. James Bond est à la retraite à la Jamaïque. Son matricule est donc libre et M, le boss du MI6, le confie à une femme, Lashana Lynch, mélane elle aussi, des cheveux aux orteils. « Ben oui ! Y a pas d’raison ! » s’exclament les féministes de tout poil. Le journal Madmoizelle, tout en finesse, tire à bout portant : « L’annonce d’une femme noire dans le rôle de James Bond déplaît aux cons. » Et encore : « Une excellente nouvelle que s'empressent d'abîmer des individus d'un autre temps. » Et puis : « Exit la misogynie inhérente au personnage de l’agent 007. » C’est drôle, j’ai toujours pensé que Bond avait un petit faible pour les femmes ! J’ai dû faire erreur sur le sens de « misogynie » !

Retour à l’Histoire avec Les Chroniques des Bridgerton, nouvelle production de Netflix, une saga sur fond de Régence anglaise (1811-1820), sous le règne du roi fou George III. Le site Médias-Presse-Info nous apprend que le casting de cette série est, lui aussi, trempé dans la mélanine : le duc de Hastings, les suivantes de la reine. En revanche, que -e rôle de la reine Charlotte, première souveraine d’Angleterre d’ascendance africaine, soit attribué à une comédienne « de couleur » est conforme à la réalité historique.

Dans le même ordre d’idée, Netflix confie le personnage d’Arsène Lupin à Omar Sy ! Je me marre ! Il n’y a pas plus blanc que le gentleman-cambrioleur, y compris le nom de son créateur, Maurice Leblanc.

Vous, je ne sais pas ! Mais moi, je m’y perds un peu, dans tous ces mélanges. C’est sans doute parce que, comme le dit Madmoizelle, je suis un vieux con. Alors, je m’accroche à des trucs que je comprends. Tenez, dans Les Échos, je lis que Viktor Orbán, le Hongrois réfractaire au « progrès », vient de faire passer un amendement à la loi fondamentale de son pays : inouï, invraisemblable, révolutionnaire, ahurissant, explosif. Cet amendement ose dire : en Hongrie, « la mère est une femme, le père est un homme ». Renversant, n’est-ce pas ? Et ce n’est pas tout : le texte définit le sexe comme étant celui de la naissance, et ajoute : « L'éducation est assurée conformément aux valeurs fondées sur l'identité constitutionnelle de la Hongrie et la culture chrétienne », précisant qu'il est nécessaire de protéger les enfants « des nouvelles tendances idéologiques modernes du monde occidental […] qui menacent le droit des enfants à un développement sain ».

Ce Viktor, un dangereux agitateur, j’vous dis ! À virer de l’Europe, séance tenante ! À quand, le Honxit ? En attendant, moi, je comprends ce qu’il dit.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 20/12/2020 à 19:55.
Yannik Chauvin
Yannik Chauvin
Docteur en droit, écrivain, compositeur

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