François de Rugy se donne l’absolution (mais ne convainc pas)

François de Rugy

Non seulement François de Rugy est impeccable, mais il se donne lui-même l'absolution. C'est, du moins, ce qu'il a affirmé, mardi soir, au journal de France 2 : « Je me présente devant vous en homme blanchi de toutes les accusations qui ont été portées contre moi », a-t-il déclaré, en regardant les téléspectateurs droit dans les yeux, ajoutant, sans sourciller : « Je n’ai jamais douté un instant que je réussirais à prouver mon honnêteté. »

Il se fonde sur les résultats de deux enquêtes, qui viennent d'être publiés, dont personne ne met en doute l'impartialité : n'ont-elles pas été diligentées par le secrétariat général du gouvernement et par l'Assemblée nationale ? En tout cas, Matignon a acquis une certitude : « Cette inspection n’a relevé aucune irrégularité imputable au ministre dans le respect des principes d’exemplarité et des règles de la commande publique. » Quant au secrétaire général de l'Assemblée nationale, il écrit : « Il apparaît que M. François de Rugy n’a enfreint, directement ou indirectement, aucune règle et n’a commis aucune irrégularité. »

« Allez en paix ! » semble lui dire la République. L'intéressé ne se le fait pas dire deux fois. Pour les trois repas qui ont été épinglés, il est prêt à « [se] mettre en relation avec les autorités compétentes de l'Assemblée, qui établiront le montant des frais », et à les régler. Pour le reste, il estime qu'il est plus blanc que blanc. Apparemment, il n'a pas saisi les reproches implicites qui lui sont signifiés sur la facture « très conséquente » de certains travaux de rénovation ou sur le coût du dressing à 17.000 euros. Il n'est pas très regardant sur les prix.

On se demande pourquoi, devant des fautes si vénielles, François de Rugy a démissionné du gouvernement. Pourquoi le Premier ministre a souhaité préciser immédiatement les règles concernant les dépenses de rénovation des logements des ministères, pourquoi un groupe de travail a été lancé à l’Assemblée nationale sur « les règles et procédures budgétaires » de sa présidence. Edwy Plenel, invité sur BFM TV, a qualifié le rapport d'enquête de l'Assemblée de « mascarade » et maintenu les accusations de son site à l'égard de l'ex-ministre. Tient-il en réserve d'autres révélations ?

Cette affaire montre que le « nouveau monde » n'est pas éloigné des pratiques de l'ancien. Surtout pour son penchant à se taper dessus entre « amis ». Au-delà de Mediapart, le cabinet d'Édouard Philippe en voudrait à la victime, qui confie à Ouest-France : « Depuis le début du mandat, il y a des gens du cabinet […] qui me débinent et qui ont essayé de nous opposer. Quand j’étais président de l’Assemblée nationale, il y avait régulièrement des échos malveillants dans la presse, notamment dans Le Canard enchaîné, venant de Matignon. »

Selon le quotidien, un proche d'Élisabeth Borne affirme, à propos de son entrevue à Matignon : « Il s’est liquéfié, c’est ce qu’Édouard Philippe a répété à Élisabeth Borne. Le Premier ministre aurait alors vu que ce n’était pas un homme d’État. » Décidément, les mauvaises langues n'existent pas qu'à Mediapart. Sommes-nous au bout de nos surprises ? L'univers qui gravite autour de nos gouvernants serait-il un panier de crabes, où l'on glisse des peaux de banane sous les pieds de ses petits camarades ?

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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