Faut-il regretter le duel annoncé ?

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Nombreux sont ceux qui, par dédain ou par dépit, montrent leurs regrets d’un duel annoncé : Macron versus Marine au second tour.

Les médias en font moult échos, et la plupart s’en réjouissent : « Avec un tel adversaire, c’est du tout cuit pour Macron ! » Les autres, ici ou ailleurs, les électeurs, rechignent à se plier à cette règle imposée par l’élection et jugent de celui-ci comme d’un choix déplorable : ils ne goûtent guère Macron, qui fait souffrir leur camp, mais apprécient encore moins une Marine-du-débat-du-second-tour…

On peut regretter ce duel annoncé ; mais que l’on fasse trois observations :

Premièrement, si le duel a lieu, c’est que les Français qui le veulent sont plus nombreux que ceux qui ne le veulent pas ou en voudraient un autre. Là n’est que le résultat du jeu démocratique. Faire reproche à un camp, celui de Marine en général, qu’il ose exister et présenter une candidate semble inacceptable. Évidemment, la situation de la droite – puisque c’est elle dont il s’agit – serait plus confortable si le RN n’existait pas. La belle affaire ! Il ne tient qu’à celle-ci de proposer meilleur candidat soutenu par l’entièreté de ses rangs – on sait la chose ardue - et qui susciterait une adhésion telle qu’il en irait autrement pour les résultats de premier tour. Inanité que de reprocher au RN d’exister et de se présenter ! Inanité que de reprocher d’avance aux électeurs leur choix. Si faute il y a, c’est au camp de la droite classique qu’il la faut reprocher. Pas à « ces crétins d’électeurs », pas au RN.

Ensuite, on dit que Macron installe Marine comme adversaire de second tour et qu’il la fait monter dans les sondages. C’est abscons. Macron racole partout, au sein de la droite et du centre comme au sein de la gauche. Lui et sa clique médiatique participent aux attaques qui rendent Marine infréquentable. Voyant bien la réalité des intentions de vote qui la placent au second tour, il détruit son image ; le moindre de ses propos devient objet de risée. Comment voir qu’il la fasse monter dans les sondages ? Voudrait-on qu’il l’ignore ? Voudrait-on qu’il attaque principalement la droite classique ? Il ne le fera pas. Elle est toute prête à voter pour lui… et puis… attaquer la droite… encore le faudrait-il pouvoir faire ? Attaquer qui ou quoi ? Dénoncer quelle proposition de la droite ? Encore faudrait-il trouver au sein de celle-ci un candidat incarnant ses valeurs et que celle-ci dispose d’un programme connu, sinon défini… La droite, ses chefs, ses électeurs sont tous prêts à rejouer le requiem du « Tout sauf Marine ! » Ceux qui voudraient que LREM ne dise mot du RN ont-ils conscience du vide qui adviendrait ? Serait-il préférable que Mélenchon soit le principal opposant ?

Enfin, la droite et le centre n’agissent-ils pas comme Macron, désignant Marine comme l’adversaire de ce dernier ? Nul d’entre eux, ou quasi nul, ne s’élève contre le mur de verre. Nul n’ose dire que Macron est leur « principal adversaire » ; car dire cela les conduirait à indiquer leur choix de second tour. Suivant cette logique de moindre mal ou de clair choix d’adversaire principal, ils auraient à dire : « Oui, entre Marine et Macron, nous choisirions Marine. » Quand n’est jamais abolie la frontière et qu’on persiste à refuser toute alliance avec le RN, quand on n’ose dire qu’au second tour, choisir Macron leur serait impossible, c’est bien que l’on s’apprête à voter pour lui. Ce faisant, on désigne clairement Marine comme l’adversaire principal.

Alors les pleurnicheries devant ce duel annoncé me semblent bien étranges. Ces gens pleurent les effets - leur absence au second tour - d’une cause qu’ils chérissent et de laquelle ils participent - tout sauf Marine…

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Bertrand du Boullay
Ingénieur à la retraite

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