Élections en Afrique du Sud : l’ ANC envers et contre tout, mais…
Les 27 millions d’électeurs sud-africains avaient pour mission d’aller, le 8 mai dernier, aux urnes pour renouveler les neuf assemblées provinciales que compte cet immense pays. Dans la foulée de cette consultation qui s’est déroulée sous le signe d’une population désabusée par la piètre performance de l’ANC au pouvoir, c'est donc l’ancien parti de Nelson Mandela qui revient, comme prévu, aux affaires en envoyant, de nouveau, Cyril Ramaphosa à la présidence du pays.
L’ANC termine en tête du scrutin avec une majorité réduite par rapport à son score de 2014. La DA (Democratic Alliance) de Mmusi Maimane perd quelques points au plan national mais conserve son fief, la Western Province (Cape Town). L’EFF (Economic Fighting Front) de Julius Malema, à l’extrême gauche, dont on craignait une grosse progression, ne termine qu’à 10 %. Progression remarquée mais insignifiante du Freedom Front Plus, parti de droite qui regroupe des fermiers blancs inquiets d’éventuelles expropriations mais qui reste seulement autour de 3 %.
Ce statu quo à la tête de l’État sud-africain ne réglera cependant pas grand-chose à la douloureuse équation à laquelle fait face ce pays miné par une terrible corruption au plus haut niveau de l’État, une inefficacité galopante dans tous les secteurs des services étatiques et une surenchère dramatique entre les deux ailes de l’ANC.
La corruption a été au centre des palabres électorales mais il semble que celle-ci fasse, aujourd’hui, partie intégrante de l’administration politique du pays, tant sa mainmise est grave sur l’ensemble de l’administration. Une gangrène qui n’a donné aucun signe d’essoufflement malgré les critiques acerbes de tous les observateurs internationaux. De plus en plus pauvre, ce pays, jadis immensément riche malgré les inégalités, a connu une piètre progression de 0,8 % du PIB en 2018. Le chômage, qui a atteint 27 % à la fin de l’année dernière, ne semble pas en passe de reculer. Sur le plan social, la violence à l’égard des travailleurs étrangers, principalement zimbabwéens et mozambicains, redouble d’intensité, le gouvernement ayant ouvert les frontières du pays depuis la fin de l’apartheid.
Mieux organisés, ces travailleurs étrangers ont monopolisé plusieurs secteurs d’activité au détriment des locaux. Même dans la province du Cap, la plus éloignée des frontières nord, la colère commence de gronder devant le nombre de plus en plus grand de serveurs congolais dans les bars et restaurants de la région. Grands laissés-pour-compte du développement ou de ce qu’il en reste, la communauté « coloured » (métis) du Cap parle de ségrégation à son égard, certains de ses leaders allant même jusqu’à dire que « c’était mieux du temps de l’apartheid, ou les choses marchaient, même si... »
Poussé sur sa gauche par les partisans de Julius Malema, dont le slogan était jusqu’à tout récemment « un fermier, une balle » et agressé au sein de l’ANC par les partisans de l’ancien président Jacob Zuma, Cyril Ramaphosa aura beaucoup de mal à mener à bien une réforme foncière qui inquiète beaucoup les acteurs économiques étrangers sceptiques de la suite de l’expulsion programmée des fermiers blancs de leurs terres. Véritable poumon de l’économie sud-africaine, l’agriculture ne résisterait pas, comme au Zimbabwe voisin, à l’expropriation de ses opérateurs actuels.
Mais dans ce pays, comme presque partout ailleurs en Afrique, les boucs émissaires restent plus que jamais l’explication bancale mais acceptée de la gabegie politique...
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