L’histoire est terrible. C’est un vrai casse-tête et, surtout, un sujet chaud, chaud, show… D’ailleurs, pour être franche, je vous avoue que je vais marcher sur deux douzaines d’œufs au moins pour vous la raconter.

C’était le 31 mars dernier. À l’occasion de la Journée internationale de la visibilité trans, Thierry Ardisson recevait sur le plateau de "Salut les Terriens" (C8) un couple de trans, Trystan Reese et son mari Biff Chaplow, qui sont devenus, le 14 juillet dernier, les heureux papas d’un bébé nommé Léo. Voilà donc deux hommes et un couffin. Sauf que Trystan, s’il est devenu homme, a gardé un vestige de son passé féminin, et pas des moindres, puisqu’il s’agit de son utérus. Spécificité qui lui a donc permis de se retrouver "enceint" de son époux et d’être ainsi le premier homme à accoucher.

D’aucuns évoqueront sans doute ici un cadeau de mère Nature, car si l’on s’en réfère aux traditions des peuples dits primitifs, ce ne serait en fait rien d’autre que le retour de l’Adam/Ève primordial, être bisexué, mâle et femelle à la fois.

Oui, mais voilà, les choses ne sont pas si simples. Croyant bien faire, l’ami Ardisson, voulant aider le téléspectateur à s’y retrouver dans la jungle des genres, a cru bon – l’imprudent ! – d’apposer un bandeau disant : "la maman est à gauche de l'écran".

Aie, Aie, Aie ! Horreur, scandale et putréfaction ! La dame devenue homme est bien maman mais elle veut qu’on l’appelle papa. Consécutivement, déchaînement sur les réseaux sociaux où l’on pointe « l’homophobie » du sieur Ardisson. Ainsi cet internaute, cité par Le HuffPost : "C'était quoi le but de tout ça ? Humilier votre invité en direct (probablement à son insu) ? Moquer nos vécus et décrédibiliser nos luttes ou simplement propager votre transphobie ordinaire ? Pari réussi en tout cas."

Interrogés par AJ+ – le "média inclusif qui s’adresse aux générations connectées et ouvertes sur le monde. Éveillé·e·s. Impliqué·e·s. Créatif·ve·s." accuse l’émission d’avoir "mégenré" cet Américain "qui a donné naissance à son fils" –, Trystan et son mari Biff eux-mêmes ont réagi. "Dire que Trystan est une mère et non un père est non seulement blessant mais inexact. C'est un bon exemple de la façon irrespectueuse dont sont traitées les personnes transgenres dans les médias", ont-ils déclaré avant d’exiger des excuses.

Quand je vous disais que c’est compliqué…

And so what? comme on dit chez Biff et Trystan. Et alors, il faut maintenant trouver une terminologie adaptée qui ne froisse personne et rende compte de la réalité. Le mieux, me dis-je ici, c’est donc d’aller demander aux trans eux-mêmes comment ils se définissent.

Réponse : mal.

Je suis en effet allée regarder les débats des "T", invités d’honneur de la Gay Pride 2016. Le Huff y interrogeait cinq personnes transgenre "pour démêler le vrai du faux et comprendre quel vocabulaire adopter quand on parle de transidentité". Chic ! me dis-je, voilà une occasion inespérée d’enrichir mon vocabulaire. J’ai ainsi découvert l’existence du mot "cisgenre". C’est moi et peut-être vous, les cisgenres, soit "les individus dont le genre de naissance, le corps et l'identité personnelle coïncident". Eh oui, ça existe encore ! Mais c’est toutefois moins simple qu’il y paraît puisque je découvre également, en explorant la définition du mot, que « ces nouvelles terminologies permettent aussi de rendre compte de la différence qu’il (sic) existe entre eux et des personnes cisgenres, en mêlant corps et orientation sexuelle : on trouvera les termes “transgouine” ou “transpédé” ».
 
Voilà, voilà…

Cela dit, et après mûre réflexion, il m’est venu une idée qui me paraît pouvoir mettre tout le monde d’accord. Je propose, dans le cas présent, une définition, inattaquable à mon avis : c’est « papa femelle ». Car mieux que femme, qui est un qualificatif de genre, le mot femelle désigne en effet un individu doté d’un organe reproducteur, ce qui est le cas de Trystan Reese. CQFD.

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05 avril 2018 à 12:38

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