Commémoration du 19 mars : Macron applique le « en même temps » à la guerre d’Algérie

macron accords d'évian

Emmanuel Macron a commémoré, ce 19 mars, l'anniversaire du cessez-le-feu en Algérie. Il s'agissait pour le Président, selon un commentaire de l'Élysée, de « regarder l’Histoire en face pour construire une mémoire républicaine qui puisse être partagée par toutes et tous en France ». Regarder l'Histoire en face, pourquoi pas, à condition de dire toute la vérité, rien que la vérité sur cette période tragique. L'« apaisement » des mémoires, que prétend rechercher le président de la République, ne peut consister à mettre sur le même plan toutes les parties concernées et à rendre hommage successivement aux uns et aux autres.

Emmanuel Macron, devant 200 invités représentant les témoins des mémoires liées à la guerre d'Algérie - appelés, combattants indépendantistes, rapatriés et harkis (du moins, ceux qui ont répondu à l'invitation) –, a assuré qu'il ne fallait « rien oublier du caractère irréductible des souffrances » infligées et subies pendant le conflit. Il a concédé que « le 19 mars est une victoire pour certains, une défaite pour d’autres » et rappelé que cette date « marque parfois le début du pire, des représailles, des massacres ». C'est le moins qu'on puisse dire, si l'on se souvient des massacres d'Oran, des enlèvements, de l'abandon des harkis et de l'exode des pieds-noirs.

Il a rappelé les gestes symboliques et controversés qu'il avait accomplis du côté algérien et du côté français, parfois même à l'égard de citoyens français qui avaient pris le parti du FLN, comme s'il suffisait de satisfaire tour à tour les deux camps pour réconcilier les mémoires. Il a reconnu que l'Algérie ne faisait pas beaucoup d'efforts dans ce sens, mais continue d'assumer « cette main tendue », persuadé que « le jour viendra où l'Algérie fera ce chemin ». Quand on sait que le gouvernement algérien exige toujours plus de repentance de la part des Français sans jamais reconnaître la moindre responsabilité de l'Algérie, on peut se demander si cette main tendue n'est pas considérée comme un acte de soumission.

Il faut noter qu'aucun officiel algérien n'était présent, bien que l'ambassadeur d'Algérie ait été invité. La veille, à Alger, le président Abdelmadjid Tebboune a bien déclaré que le dossier mémoriel devait « inévitablement être traité d'une manière responsable et équitable dans un climat de franchise et de confiance », mais n'a rien concédé. Il s'est même empressé d'ajouter que les « hideux crimes de la colonisation ne seront pas oubliés et ne sauraient être frappés de prescription ». Pas de quoi, apparemment, gêner un Président qui, lorsqu'il fut candidat pour la première fois, avait affirmé devant la télévision algérienne que la colonisation était « un crime contre l'humanité ».

Emmanuel Macron, à trois semaines de l'élection présidentielle, se veut donc rassembleur plus que jamais en pratiquant à la mémoire de la guerre d'Algérie le « en même temps » qui lui est cher. Mais si cette pratique peut être une tactique pour mieux accomplir ses objectifs politiques, elle ne peut s'appliquer à l'établissement de la vérité historique. Vérité qui impliquerait que rien ne soit occulté et qu'on mît en cause les gouvernements de l'époque, notamment un président de la République qu'on a trop tendance à présenter comme un exemple, y compris dans les rangs de l'opposition. Il faut croire que toute vérité n'est pas bonne à dire.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

20 commentaires

  1. C’est la date où les armes française se sont tues…. et que les massacres par le FLN se sont propagés.
    Le FLN a même massacré les autres membres des partis indépendantistes …
    On voit où ces gens ont mené ce pays, qui fut la paradis de l’Afrique du temps de la présence française.
    Et qui était caché derrière le « soulèvement » des algériens ??? Tiens ! Les américains !
    N’y aurait-il pas une petite ressemblance avec l’Ukraine ?

  2. L’ancien Premier ministre indien Manmohan Singh recevant en juillet 2005 , à l’université d’Oxford , le titre de docteur honoris causa , souligna les aspects positifs de l’empire britannique, que l’Inde fut certes fondée à combattre mais dont elle tira également « les conséquences bénéfiques ».
    Quand un dirigeant algérien tiendra ce genre de discours , un grand pas sera fait pour la réconciliation.
    Je précise que la GB n’a jamais présenté d’excuses pour sa colonisation.

  3. Cet unilatéralisme dans la repentance est insupportable , des atrocités ont été commises dans les deux camps, chacun devrait se repentir pour les siennes.
    Le problème des harkis est symptomatique , la France a abandonné la majorité des harkis en Algérie, mais les algériens les ont horriblement massacrés.

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