Cinéma : Rodin, par Jacques Doillon

Cinéma : Rodin, par Jacques Doillon

Près de cent ans après la mort d’Auguste Rodin, Jacques Doillon nous propose un film biographique retraçant une dizaine d’années de la vie du sculpteur, de ses premières commandes d’État – La Porte de l’Enfer, inspirée de Dante – à l’échec de sa relation avec Camille Claudel. L’occasion, pour le cinéaste, de tourner à Meudon, et de faire découvrir au spectateur les intérieurs réels de la maison de l’artiste. Le film, hélas, n’a pas grand-chose d’autre à nous offrir…

Certes, Vincent Lindon nous livre une interprétation tout à fait convaincante de Rodin, en dépit d’une articulation qui laisse parfois à désirer, quand elle ne gêne pas carrément la compréhension des dialogues. Cependant, l’écriture de son rôle n’est pas à la hauteur du comédien. Doillon peine à s’écarter du stéréotype de l’artiste maudit, grave, taciturne et tactile, qui touche avec inspiration l’écorce des arbres, caresse quelques fessiers (tout sculpteur étant forcément grand baiseur…), et n’assume pas les conséquences de ses passions sentimentales.

Celles-ci, en effet, prennent une place considérable, et même excessive, dans la narration (près de deux tiers du récit) et rendent ainsi le film tributaire des partenaires de jeu de Vincent Lindon, en particulier de Séverine Caneele, qui interprète la compagne « officielle » du sculpteur, et d’Izïa Higelin, insupportable de bout en bout, qui surjoue l’hystérie amoureuse de Camille Claudel et sa jalousie envers la notoriété de Rodin.

Reste qu’on ne sait pas bien où veut en venir Jacques Doillon, quel est son propos. Le film tourne en rond et n’en finit pas de nous assommer. Non content de nous imposer, les trois quarts du temps, l’éclairage blafard d’un atelier de sculpture, Doillon donne le sentiment désagréable d’enchaîner tous les tics du cinéma bobo : un goût immodéré pour l’épure, contrasté de répliques souvent trop écrites et de scènes de sexe « en veux-tu en voilà » pour bien attester le caractère sulfureux de leur auteur… De là, évidemment, le plan à trois qui nous est proposé en fin de récit, comme un passage obligé, pour bien souligner, auprès de ceux qui n’auraient pas compris, le thème principal du film…

Triste comme un plâtre.

2 étoiles sur 5

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Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

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