Ce que nous révèlent les incendies en Grèce

incendie forêt

Une notification affichée sur l’écran du téléphone, une annonce de l’hôtel, quelques kilomètres parcourus à pied, de maigres bagages, des bambins geignant dans les bras de leurs parents, un embarquement en catastrophe sur des bateaux de tourisme, des campements de fortune dans les halls d’aéroports : samedi 22 juillet, l'évacuation de 30.000 personnes en Grèce a pris des airs de débâcle.

Les régions méditerranéennes s’embrasent

Depuis sept jours, le centre de Rhodes est le théâtre de violents incendies. Sur cette île du Dodécanèse, archipel grec qui s’étire au sud-ouest de la Turquie, les moyens de lutte mis en œuvre contre les feux de forêts se sont avérés impuissants à contenir les flammes. Dès lors, plus qu’une solution : la fuite. Des embarcations ont ainsi été dépêchées en urgence vers des plages comme celle de Kiotari ou de Lardos, sur la côte orientale, où près d’un millier de personnes était venu chercher refuge.

Corfou, en mer Ionienne, est aussi en situation de crise. Le nord de l’île est en proie aux flammes. Dans la nuit de dimanche à lundi près de 2.500 personnes ont été évacuées.

Ce n’est pas tout, puisque trois départ de feux ont été déclarés dimanche en Eubée. Si l’un d’eux a rapidement été maîtrisé, les deux autres inquiètent les autorités. Elles ont ainsi donné l’ordre aux habitants de quatre villes voisines de se replier vers la ville côtière de Karystos.

Ces dix derniers jours, une cinquantaine de feux se sont ainsi déclenchés partout en Grèce, en Attique, en Béotie, sur l’isthme de Corinthe, laissant près de 30.000 hectares calcinés. A cette période de l’année, d'habitude, le bilan moyen dans le pays est deux fois moins élevé. Mais ces derniers jours, tous les facteurs se sont réunis pour amplifier le phénomène : des températures records, avoisinant les 45°C, voire au-delà localement, une extrême sécheresse, des vents violents et tourbillonnants.

Ces conditions s’observent de plus en plus en Europe méditerranéenne. Des hectares de forêt partent en fumée chaque été, par centaines de milliers. A cela s’ajoutent des drames humains : depuis le début de l’épisode de ce mois de juillet, on décompte à ce jour trois morts en Grèce, dont deux secouristes qui se sont crashés avec leur canadair. En Sicile, les corps de deux septuagénaires ont été retrouvés calcinés. En Algérie, le feu a fait 34 morts depuis dimanche.

Origine des feux

Si toutes les forces de luttes contre le feu peuvent se tenir prêtes, si toutes les données météorologies peuvent être évaluées, il reste cependant un élément que nul ne peut prévoir ni maîtriser : l’élément déclencheur. Dans un milieu totalement desséché, il suffit d’une étincelle, et cette étincelle est 9 fois sur 10 d’origine humaine. Le fait est accablant, mais Météo-France est formelle. Réchauffement climatique, imprudence des populations, intentions criminelles ? En tout cas, c’est bien l’homme qui est en cause, ce qui rend ce phénomène si révoltant, et fait qu’il n’est pas classé en France comme « catastrophe naturelle ». Pour Sandrine Rousseau le coupable est tout désigné : l’homme carnivore !

Ces incendies qui émaillent nos actualités estivales évoquent bien des choses. A Rhodes, ils suggèrent des visions d’apocalypse, qui ne sont pas sans rappeler certaines lectures de jeunesse. Barjavel dépeint avec une grande puissance d’évocation dans Ravage l’embrasement d’un monde du progrès et de la technique. En voulant se rendre maître de tout, une société brillante, insouciante et orgueilleuse sombre soudainement dans le chaos, trahie par ce qui faisait sa force. Le feu s’abat sur la terre, et dans les décombres fumants, l’homme retourne à l’instinct le plus primaire, et devient bête. « Caprice de la nature, avertissement de Dieu ? » interroge le docteur Fauque. « Tout cela est notre faute », dit François un peu plus loin. Le spectacle de la fuite de Rhodes, extraordinaire mais bien réel, appelle notre époque à la fois à l’humilité, et à l’introspection.

Jean de Lacoste
Jean de Lacoste
Journaliste stagiaire à BV, étudiant en master d'histoire du droit.

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