Bellamy, Glucksmann : le temps des intellectuels ?

BELLAMYGLUCKSMANN

Alors que la campagne des élections européennes bat son plein et que les sondages prédisent un combat final serré entre Les Républicains, La République en marche et le Rassemblement national, une évidence s’impose : cette élection aura eu le mérite de faire connaître au grand public la jeune et brillante tête de liste des Républicains, François-Xavier Bellamy. On a déjà rappelé avec raison que le choix de Laurent Wauquiez avait l’immense mérite de proposer aux suffrages des électeurs de droite un candidat qui porte véritablement leurs convictions et leurs aspirations, après trente longues années de compromissions avec une pensée sociale-démocrate si contraire aux principes gaullistes du RPR.

Mais là n’est pas son seul mérite. En choisissant François-Xavier Bellamy, professeur agrégé de philosophie, auteur remarqué, en 2014, des Déshérités ou l’urgence de transmettre, dans lequel il retrouvait les racines philosophiques de la crise de la transmission qui asphyxie l’École, et plus récemment de Demeure, essai philosophique qui questionne la frénésie du changement qui semble s’être emparée de notre civilisation, oublieuse de tout ce qui « demeure » et nous rattache au monde, Laurent Wauquiez fit le pari de l’intelligence. À trop se cantonner à un économisme à courte vue, la droite avait, en effet, perdu à la fois ses racines intellectuelles et sa boussole, et il était bien temps qu’elle se ressaisisse en se mettant à l’écoute de tous ceux qui, dans le monde des idées, préparaient depuis des années déjà son renouveau intellectuel, préalable indispensable à son redressement électoral.

La profondeur et la justesse de la pensée de François-Xavier Bellamy, sa verve délicate mais toujours lucide jointe à sa parfaite urbanité nous font contempler avec effarement les prétentions d’un Emmanuel Macron présenté, durant la campagne présidentielle, comme l’héritier spirituel du philosophe Paul Ricœur, avant d’endosser une « pensée complexe » que les Français ne sauraient pas apprécier à sa juste valeur… À la lecture de Révolution, le livre écrit par l’actuel locataire de l’Élysée avant son élection, dont la vacuité sidérante détonne tant au regard des ouvrages signés par le candidat des Républicains, on comprend la chance que l’immixtion de François-Xavier Bellamy dans la vie politique offre à notre pays. Espérons qu’il participe à l’émergence d’un débat proprement politique, enfin recentré sur les idées des uns et des autres, et non sur ces polémiques stériles et ces « petites phrases » qui ont fait tant de mal à la politique française. Cet espoir est peut-être fondé, à en croire le mimétisme du Parti socialiste dont la tête de liste, l’essayiste Raphaël Glucksmann, incarne sans doute mieux les idées de la gauche que les anciens éléphants de la rue de Solférino...

Face à l’explosion des cadres politiques qui a suivi l’élection d’Emmanuel Macron, les deux anciens partis de gouvernement se tournent donc vers des figures du monde des idées, dans une concordance des temps qui nous dit sans doute quelque chose de l’époque. Nos concitoyen lassés par la communication et l’opportunisme, désireux de retrouver le sens de la politique et du bien commun, ne pourront que profiter d’une clarification de l’offre politique qui, seule, permettra la confrontation de visions divergentes mais pleinement assumées, et donnera aux Français les clés de leur destin.

Laurent Chauvet
Laurent Chauvet
professeur d'histoire-géographie

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