Aude Mirkovic : « Contrairement à ce qui est prétendu partout, l’extension de la PMA n’est pas une promesse de campagne d’Emmanuel Macron ! »

Mardi matin, le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) a rendu public un avis favorable à l'extension de la légalisation de la PMA (procréation médicalement assistée) pour les femmes seules et en couples de femmes. Aude Mirkovic, porte-parole de l'association Juristes pour l'enfance, explique au micro de Boulevard Voltaire que cet avis est contraire à la conviction majoritaire des citoyens qui se sont massivement prononcés contre l'extension de la PMA lors des États généraux de la bioéthique.

Le CCNE a donné son feu vert concernant la PMA. Quelle est votre réaction, suite à cet avis rendu hier ?

Le Comité d’éthique n’a pas le pouvoir de donner un feu vert ou un feu rouge. Il rend des avis consultatifs. Il donne un avis, comme son nom l’indique, qui n’a rien d’obligatoire.
Le comité d’éthique a rendu, ce matin, sa contribution en vue des États généraux. Il aborde un certain nombre de points, qui sont au programme, de la révision de la loi bioéthique, et en particulier la question de la PMA.
À propos de l’extension de la PMA, c’est-à-dire de l’ouverture de la PMA aux femmes célibataires et aux couples de femmes, le Comité d’éthique reconduit l’avis favorable qu’il avait donné en juin 2017.
Quand bien même il s’agirait de donner un feu vert, ce feu vert est extrêmement réservé. Le Comité d’éthique rappelle ce qu’il avait déjà dit en juillet 2017, à savoir qu’il existe un nombre important de difficultés qui ne sont pas résolues, comme l’effacement du père pour l’enfant, la marchandisation des gamètes qui s’ensuivrait et la question de la prise en charge.
Ces points sont à nouveau nommés aujourd’hui par le Comité d’éthique comme des points de butée. Malgré cela, il persiste à donner un avis favorable. Cet avis met en lumière de nombreux inconvénients liés à l’extension de la PMA.

Pour rappel, le Comité d’éthique avait demandé aux citoyens de donner leur avis. Beaucoup étaient contre la PMA. Le CCNE a-t-il décidé de passer outre les avis qu’il avait lui-même demandés ?

Le Comité d’éthique n’est pas là pour donner l’avis des citoyens, mais celui de ses membres. Le Comité d’éthique a le culot de présenter la reconduction qu’il fait de son avis favorable comme s’inscrivant dans la lignée des États généraux. Comme si les États généraux avaient donné une impulsion supplémentaire à cet avis favorable, alors qu’au contraire, les citoyens se sont exprimés de façon massive contre l’extension de la PMA.
Je rappelle qu’il ressort du rapport du Comité d’éthique sur les États généraux que près de 80 % des participants des débats en région se sont montrés hostiles. 89,7 % des contributions écrites sur le site dédié aux États généraux étaient défavorables.
C’est quand même un peu gonflé de présenter cet avis favorable à la PMA comme s’inscrivant dans la lignée des États généraux. C’est un mensonge.

Cela veut-il dire que les mobilisations vont recommencer ? Repartons-nous pour des années de Manif pour tous ?

Ce n’est pas obligatoire. Contrairement à ce qui est prétendu partout, la PMA n’est pas une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Il s’est déclaré favorable à la PMA à titre personnel. Lors de la campagne électorale, dans une fameuse interview donnée au magazine Têtu, il avait dit qu’il attendrait l’avis du Comité d’éthique, et que si le débat avançait favorablement, il légaliserait la PMA.
Le débat a eu lieu puisque les États généraux ont eu lieu. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le débat n’a pas abouti favorablement. Au contraire, les États généraux ont manifesté une forte opposition des Français à la PMA sans père.
Nous attendons qu’Emmanuel Macron respecte son engagement. Et s’il ne le fait pas, en effet, nous sommes prêts.
Il y a, d’ailleurs, beaucoup de gens qui ont voté pour Emmanuel Macron alors qu’ils étaient contre la PMA, alors même que certains avaient manifesté contre le mariage en 2013, en raison de son lien avec la PMA. Ils ont compté sur le fait que la PMA n’était pas une promesse de campagne et qu’elle était suspendue aux résultats des États généraux.
Si Macron ne respecte pas ses engagements, il n’y a donc aucun doute sur le fait que ces électeurs n’auront aucun problème à redescendre dans la rue également.
Si le projet de PMA n’est pas retiré, nous allons vers de fortes mobilisations. Et nous sommes ouverts à tous types de mobilisations, car nous n’allons pas laisser passer cela.

Aude Mirkovic
Aude Mirkovic
Maître de conférences en droit privé - Porte-parole de « Juristes pour l’enfance »

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