Anne-Laure Bonnel, la journaliste qui dérange

Capture d’écran (45)

Anne-Laure Bonnel était inconnue au bataillon du grand public et elle commence à se faire un nom, même s’il sent le soufre dans les cénacles de la bien-pensance. Être citée en exemple par le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov n’est sans doute pas un bon canal de publicité.

Il faut bien reconnaître que ses images et ses commentaires dérangent. Elles montrent ce que nul ne voulait voir. Des Ukrainiens officiels, revêtus de l’onction du Maïdan et dès lors adulés par l’Europe, et qui se livrent depuis 2014 à une guerre dans le Donbass, avec des exactions contre leur propre population civile. Si ces faits sont avérés, ils violent ainsi les accords de Minsk. Sauf que les médias français auxquels ils étaient destinés n’ont pas jugé pertinent de les diffuser. Comme pour le Yémen, par exemple, il conviendrait de détourner le regard pour laisser les bourreaux massacrer en paix, peut-être avec des armes que nous produisons et vendons. Ou comme pour le silence gêné autour des persécutions des chrétiens d’Orient et des Yézidis, ces simples variables d’ajustement d’enjeux géopolitiques qui les dépassaient : pétrole, rivalités laïcs contre religieux, sunnites contre chiites ou arabe contre persan.

Les vidéos récentes d’Anne-Laure Bonnel, qui couvre en ce moment cette sale guerre, montrent une femme épuisée, qui s’insurge contre les diverses censures dont elle est victime, ainsi que les procès en hérésie des chantres de la doxa officielle, BHL en tête. Si elle a annoncé intenter une action en diffamation contre Mediapart, elle a néanmoins eu accès à BFM TV. La journaliste qui menait l’entretien a bien tenté de l’orienter dans le sens du discours convenu, mais sans succès. « Qui a envie de voir des gens mourir ? », lui répond-elle, quand il faudrait encenser les délires manichéens d’une propagande de guerre. Elle déplore que rien n’ait été fait ces huit dernières années, et pense que la partition est inéluctable.

Aller au cœur de la guerre pour en rapporter des images, des articles, demande le même courage que d’y aller pour combattre : les bombardements ne font pas le tri entre soldats, civils, soignants ou journalistes. Dans un monde dominé par l’image, l’instrumentalisation de celles qui témoignent de la guerre biaise nos perceptions, mais peut aussi changer le cours de ces guerres. Les photos de cette fillette nue courant après un bombardement au napalm ou de cette femme montrant une fleur à une baïonnette n’ont-elles pas contribué à mettre fin à la guerre du Vietnam ? Parce qu’un journaliste a pour premier devoir de relater des faits, il doit s’élever contre une narration menteuse. Mais cela demande du courage.

Après se pose la question de la responsabilité qu’engendre l’image et sa diffusion. L’excellent roman Le Peintre des batailles, d’Arturo Perez-Reverte, peut éclairer nos réflexions sur ce sujet. Mais surtout, quelle est la responsabilité des rédactions qui, pendant huit ans, se sont désintéressées de crimes de guerre commis à trois heure d’avion d’ici ? Certes, un journal ne devrait pas être le condensé de tous les malheurs du monde, mais quel étrange arbitrage.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 22/08/2022 à 19:07.

Vos commentaires

75 commentaires

  1. Envoyer des armes en Ukraine revient à imiter Hollande qui avait envoyer des armes en Syrie ! au moins nous saurons avec quels moyens les mafieux et trafiquants viendront saccager la France !!!

  2. Elle est censurée sur certaines chaines en France. C’est dire si elle dérange car il n’y a pas d’argument à opposer à ce constat

  3. Bravo à cette journaliste qui semble poursuivre la ligne de ceux qui depuis plus de huit ans nous font suivre les exactions des troupes ukrainiennes à l’encontre des deux républiques auto proclamées du Donbass . Espérons que la vérité pourra enfin se savoir et que les signataires des accords de Minsk prendrons enfin leurs responsabilités sur cette guerre fratricide .

  4. Il ne fait pas bon s’opposer à la bien-pensance tant sur le plan national que sur celui de l’international.
    Les vents changeront (il faut l’espérer) bientôt de direction, empotant la clique des BHL et Cie hors d’état de nuire.

  5. Soutien total à cette journaliste, vraie, courageuse et  » dissidente »! La propagande occidentale ne vaut pas mieux que celle de la Russie. Elle ne fait que porter les habits respectables de « les droits de l’homme et la démocratie » quand l’autre s’en abstient!

    • La propagande occidentale est juste la maitresse de la désinformation qui nous est distillée en permanence.
      Afin de bien percuter dans les cerveaux, ne pas iublier le petit drapeau dans un coin de l’écran…

  6. L’Otan n’accepte de voir que ce qui l’arrange et cela ne date pas d’hier, la France en éternelle suiveuse mais néanmoins donneuse de leçons ne vaut pas mieux. Bien sûr qu’il y a eu des exactions sur les populations civiles dans les républiques autoproclamées depuis la révolution « orange », la presse complice et au service du pouvoir le savait elle est resté muette, c’est un scandale bien sûr mais la presse libre et indépendante c’est bien finie.

  7. Honneur à Anne-Laure Bonnel qui fait partie du 1% de journaliste qui font honneur à leur métier et méritent notre reconnaissance pour nous informer honnêtement contre vents et marées et … Macronie.

  8. merci Madame de rectifier la réalité c’est exact depuis 8 ans le dombass a souffert et aucun politique ni journaleux n’en fait acte

  9. Sans doute existe-t-il dans l’esprit de certains une gradation dans l’honorabilité des victimes de conflit. D’où la présentation manichéenne de la part de nos principaux médias ( presse écrite et télévisée) de cette conflagration Ukraine/Russie.

  10. Anne-Laure Bonnel seule contre tous.
    Son reportage sur YouTube est une claque pour tous les pro-ukrainiens, les russophobes, et les poutinophobes.
    Entre autre le discours de l’ex président ou 1er ministre, ça m’échappe, dans lequel il recommande de réduire à, ni plus ni moins, l’esclavage des minorités russophones, et très largement applaudi, est une horreur qui ramène à l’Allemagne d’avant guerre.

  11. Si on met une muselière à la propagande adverse on n’a plus que la nôtre pour se faire une opinion et si vous avez le malheur de dire que. L’Occident a sa part de fautes et d’erreurs envers Poutine , vous êtes putinolâtre et traître à la patrie. Or ce n’est pas en humiliant et insultant l’adversaire qu’on entamera une bonne relation diplomatique mais plutôt en cherchant à comprendre ses motivations.

  12. Les USA ont armé l’Ukraine depuis des années, les USA ont organisé à coup de millions de dollars des coups d’Etat dans des pays voisins de la Russie, on a accepté dans l’OTAN des pays voisins de la Russie, et voilà le résultat , la Russie se sentant assiégée par les USA intervient en Ukraine, et l’UE dans tout çà ? rien, elle regarde impuissante le monde se construire sans elle.

  13. Cet article a son intérêt dès l’instant que l’on a vu cette journaliste s’exprimer sur CNews. Or, toutes les personnes à qui j’ai pu en parler n’avaient pas eu vent de son intervention et avaient dû mal à croire ce que je leur racontais. Il serait donc utile de donner des détails à son propos, ce qu’elle a vu, puis subi.

  14. Bravo à cette jeune femme remarquable de courage !! Cela nous change des BHL et Cie qui officient dans les studios en pensant nous émouvoir !!!

Commentaires fermés.

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