À Marseille, des parents demandent que leurs enfants côtoient des « têtes blondes » à l’école

Selon Saïd Ahamada, député LREM de Marseille, « les habitants des quartiers populaires » se plaignent de ne pas avoir « accès à une éducation de qualité […]. Ils sont confrontés dans les écoles à un problème de niveau des élèves et une non-mixité ». Ils proposent donc la suppression de la carte scolaire car « elle est contournée par ceux qui ont les moyens de le faire » et « demandent des têtes blondes dans les écoles ». Voilà ce qui ressort, selon le député, des débats organisés dans les quartiers sensibles.

Le diagnostic des habitants consultés est juste, mais les réponses susceptibles d'être apportées à leurs demandes peuvent aboutir à des résultats opposés. Notons que les parents qui ont formulé ces propositions sont soucieux de voir leurs enfants travailler sérieusement : ils estiment que, dans les écoles que fréquentent leurs enfants, les conditions pour y parvenir ne sont pas réunies.

Les raisons en sont nombreuses. La première, c'est qu'un nombre plus ou moins important d'élèves empêchent les autres de travailler, soit qu'ils se désintéressent totalement des études, soit que leur famille ne leur ait inculqué aucun respect de l'autorité ni de curiosité pour le savoir. La seconde, qui est une conséquence de la première, c'est que les enseignants font ce qu'ils peuvent avec le public scolaire qu'ils ont, l'administration considérant souvent comme un succès qu'une journée se passe sans grave incident.

Des parents demandent la suppression de la carte scolaire, qui serait contournée par quelques privilégiés : ce n'est pas faux, mais peut-on en vouloir aux familles qui cherchent pour leurs enfants la meilleure école possible ? Leur revendication d'une plus grande mixité sociale risque fort de conduire, non pas à un assouplissement de la sectorisation, mais à un redécoupage de secteurs qui mêle autoritairement les populations scolaires. C'est ainsi que, depuis 2013, la notion de « mixité sociale » fait officiellement partie des objectifs proclamés de l'École.

« Lorsque cela favorise la mixité sociale, un même secteur de recrutement peut être partagé par plusieurs collèges publics situés à l'intérieur d'un même périmètre de transports urbains », peut-on lire dans la loi de refondation et de programmation mise en œuvre par la non regrettée Najat Vallaud-Belkacem. Autrement dit, l'État impose une mixité sociale pour pallier les ghettos qu'il a laissés se constituer. Une solution qui plaît aux esprits faux qui confondent l'égalité et l'égalitarisme. Avec, pour résultat, la recherche d'échappatoires dans l'enseignement privé sous contrat ou hors contrat.

La solution ne serait-elle pas, au contraire, de garantir à tous les enfants qui en ont la volonté la possibilité de poursuivre, dans de bonnes conditions, des études qui les mènent au maximum de leurs capacités ? En créant, par exemple, des classes de niveau ou des internats d'excellence ? En ne cédant pas à la culture de l'excuse, en maintenant partout une discipline sans faille, en sévissant contre les perturbateurs, en accordant au moins autant de soin aux élèves qui peuvent s'en sortir qu'aux élèves qui, par leur comportement, empêchent les autres de travailler ?

En demandant « des têtes blondes dans les écoles », ces parents de quartiers difficiles reconnaissent implicitement que ce ne sont pas des « têtes blondes » qui rendent tout enseignement impossible. S'ils se soucient du niveau, c'est qu'ils veulent que leurs enfants réussissent et s'intègrent dans notre société.

C'est un crime contre le bon sens et l'intérêt général de ne pas s'occuper des jeunes Français qui ont la volonté de se promouvoir socialement et culturellement, qu'ils soient ou non des « têtes blondes ».

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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