Bac 2021 : l’épreuve de philosophie comptera pour du beurre

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Au départ, la réforme de Jean-Michel Blanquer visait à revaloriser le baccalauréat. À l'arrivée, ce diplôme sera plus dévalué que jamais. Le Covid-19 est passé par là, accélérant le processus avec l'introduction massive du contrôle continu. Quelques rares épreuves y ont échappé, mais dans des conditions telles qu'il n'en restera pas grand-chose. Jeudi 17 juin, les élèves de terminale passeront l'écrit de philosophie qui, pour la plupart, comptera pour du beurre : si la note moyenne du candidat pendant l'année est supérieure à la note obtenue à l'épreuve, c'est elle qui sera prise en compte. Une seule condition : être présent et remettre une copie.

Compte tenu des répercussions de la crise sanitaire sur la préparation, il avait déjà été décidé de donner le choix entre trois sujets de dissertation, au lieu de deux habituellement, en plus du sujet d'explication de texte. Cette mesure paraît justifiée, permettant de pallier d'éventuelles lacunes, si le programme n'a pu être terminé. Mais ce nouvel assouplissement des règles risque d'avoir des conséquences auxquelles le ministre ne semble pas avoir pensé.

Les candidats sont bien contraints d'être présents, mais ils ne seront guère très motivés, pour peu qu'ils aient obtenu, dans l'année, une moyenne convenable. Seuls ceux qui ont multiplié les notes médiocres se diront qu'avec un peu de chance ou grâce à l'indulgence d'un correcteur compréhensif, ils gagneront quelques points supplémentaires. Verra-t-on les plus insolents de ces apprentis philosophes s'amuser, par quelque facétie, à dénoncer cet examen vide d'enjeu ? Voire exprimer leur révolte contre l'absurdité de la situation ?

En dépit des circonstances, le ministre veut, sans doute, conserver au baccalauréat 2021 une apparence d'examen. De la même façon, il a maintenu le fameux « grand oral » qui le couronne et, en classe de première, les épreuves anticipées de français avec, à l'écrit, un double choix de sujets et, à l'oral, une liste de textes restreinte. Certains élèves commencent d'ailleurs à se demander pourquoi ils n'ont pas le droit, eux aussi, de choisir la note de contrôle continu, si elle leur est favorable, et crient à la discrimination.

Que ces aménagements soient ou non imposés par la situation sanitaire, il est certain qu'ils ne rehausseront pas la valeur du baccalauréat 2021, qui pourrait bien battre un nouveau record de réussite. Comme les assignats sous la Révolution française, il continuera donc de se déprécier, au point qu'il ne restera plus qu'à le jeter aux orties. À quoi bon, dira-t-on, un diplôme qui ne sert rigoureusement à rien, puisqu'il est donné à tous ? Il n'ouvre même pas les portes du supérieur, les affectations s'effectuant désormais sur dossier, avant les résultats.

Ce diplôme, devenu local, n'aura de valeur que la réputation de l'établissement qui le décerne. Devant l'opinion, les prétendues élites qui nous gouvernent se vanteront d'attribuer à tous des chances égales, d'œuvrer à l'ouverture sociale des grandes écoles, de favoriser la diversité en pratiquant une discrimination positive. Toujours au détriment des élèves méritants des milieux modestes et en préservant leurs propres intérêts. Si quelques candidats dénonçaient, dans leur dissertation de philosophie, cette parodie d'examen, montraient qu'ils ne sont pas dupes de cette imposture, ce serait le signe que tout n'est pas perdu et qu'il reste un espoir de renouveau.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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