Un immense rassemblement à Barcelone pour crier, après les attentats islamistes du 18 août revendiqués par Daech, les 15 morts et les 126 blessés, "No tenim por" ; en catalan : "Nous n'avons pas peur". Le roi d'Espagne conspué par certains a défilé en tête de cette impressionnante manifestation.

C'est beau, ça ne sert à rien.

Après les massacres islamistes au Bataclan à Paris, un immense rassemblement à Paris, de trois à quatre millions de personnes, avec une brochette de chefs d'État et de gouvernement, dont le Président François Hollande, a marché durant des heures pour démontrer aux terroristes que les Français n'avaient pas peur.

C'est beau, ça ne sert à rien.

On ne peut pas se moquer, sauf à avoir l'esprit odieux et le cœur sec, de ces solidarités inspirées par la résistance et la compassion, des discours, des hommages, des cérémonies, des fleurs et des douleurs privées.

C'est beau, ça ne sert à rien.

Pourtant, il n'est personne, Français, Espagnol, Allemand ou Britannique, qui ne se soit pas senti immédiatement touché profondément par les tragédies, les agressions au couteau, les dévastations par véhicules, empli de fierté, sans fausse sentimentalité, par la qualité et la rigueur des ripostes.

Nul besoin, pour susciter cette solidarité des émotions vraies, d'effusions médiatiques, d'exploitations politiques et de consensuelles multitudes, le temps de quelques heures.

C'est beau peut-être, mais ça ne sert à rien.

No tenim por : j'imagine la tête des assassins. À force, ils ont compris qu'après leurs tueries aveugles, imprévisibles, si difficiles à empêcher et laissées de plus en plus à l'initiative redoutable quoique artisanale d'individus épris de la mort - la leur s'ajoutant à celle innombrable des mécréants, des musulmans pacifiques, des Européens et des Occidentaux -, nos sociétés défileront en protestant qu'elles n'ont pas peur.

Comme si leurs buts n'étaient pas déjà atteints : avoir brisé la douceur de notre quotidienneté et la certitude de sa tranquillité, avoir fait surgir la crainte d'une impuissance face à leurs monstruosités renouvelées et avoir obtenu, pour chaque crime, une perverse promotion médiatique qui au prétexte d'informer célébrait plutôt l'ampleur de la malfaisance et l'étendue de la menace.

Rien n'est simple pour combattre un terrorisme qui "crée l'islamophobie, et non pas l'islamophobie qui crée le terrorisme"", comme le souligne justement Brice Hortefeux.

En tout cas, les grandes messes démocratiques et médiatiques d'après les catastrophes, d'une certaine manière, détournent du silence obligatoire de l'efficacité, de la discrétion nécessaire des actions de sauvegarde et d'élimination et de la modestie pragmatique d'invention d'armes plus décisives encore contre cette criminalité islamiste à laquelle on ne comprendra rien si on s'obstine à la croire similaire aux autres horreurs de la criminalité, si j'ose dire ordinaire. L'État de droit pour temps calmes ne peut demeurer en l'état et il est essentiel de l'armer bien au-delà de ce que pourrait permettre une République trop sourcilleuse des garanties et des protections à octroyer prioritairement à ceux qui ne les réclament que pour tuer plus commodément. Notre faiblesse, dont ils bénéficient, fait leur force. Leur haine s'enrichit du mépris pour notre mansuétude.

No tenim por : c'est beau, ça ne sert à rien.

Quand, demain, l'islamisme et Daech frapperont et massacreront à nouveau, de grâce, moins de beauté, de concorde apparente mais plus d'utilité ! Moins de spectacle médiatique, plus de retenue et de réserve ! Moins de paroles pour affirmer notre détermination, plus de détermination concrète, opératoire, impitoyable et secrète !

La démocratie, si elle ne se défend pas, ne sera pas le pire des régimes après tous les autres. Mais le pire tout simplement.

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28 août 2017 à 12:00

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