Yvan Colonna battu à mort en prison par un djihadiste pour avoir « blasphémé »…

prison

Yvan Colonna, leader nationaliste corse, condamné pour l’assassinat du préfet Claude Érignac, à Ajaccio, le 6 février 1998, est aujourd’hui entre la vie et la mort. Son coma demeure « stationnaire ». En effet, alors qu’il purgeait une peine à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de 22 ans, à la maison centrale d’Arles (Bouches-du-Rhône), il a été sauvagement agressé par un djihadiste d’origine camerounaise, Frank Elong Abé. À en croire les enquêteurs, Colonna aurait « mal parlé » du prophète Mohammed…

Il est 10 h 15, ce mercredi 2 mars, quand ce détenu, condamné en 2015, pénètre dans la salle de sport de la prison afin d’y faire le ménage. Il est accompagné de plusieurs surveillants qui, étrangement, le laissent seul avec un Yvan Colonna occupé à sa gymnastique quotidienne. Dès la porte refermée, Frank Elong Abé se rue sur lui, le bourre de coups de poing avant de lui écraser la trachée-artère avec le pied, plus d’une minute durant.

Sans surprise, la famille de la victime « entend demander raison à l’État de cette agression meurtrière ». Et de poser la question qui fâche : « Comment un détenu aussi “particulièrement signalé” a-t-il pu être aussi sauvagement agressé par un codétenu ? Où étaient les gardiens dont le rôle était précisément d’empêcher ce type d’agression ? » On est effectivement en droit de se le demander. Car si Yvan Colonna se comportait en détenu modèle, c’était loin d’être le cas de son agresseur. Emprisonné en 2012 à Bagram, le Guantánamo irakien, par les troupes américaines, il est remis aux autorités françaises deux ans plus tard, avant d’être condamné en 2015 à neuf ans de réclusion pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme ». Détenu à l’unité hospitalière de surveillance aménagée de Lille-Seclin (Nord), il tente de se suicider tout en prenant une infirmière en otage. Puis il va de prison en prison : il a provoqué quatorze incidents en moins de six semaine, à l’été 2019.

L’itinéraire de l’homme est plus que « classique », si l’on ose dire. Jeunesse délinquante, islamisme de combat donnant un semblant de sens à une vie qui n’en a plus : ils sont des dizaines de milliers dans ce cas. Mais un tel profil est tellement identifiable qu’on se demande pourquoi et comment l’administration pénitentiaire n’a pas pris les précautions qui s’imposaient.

Finalement, rien que de très logique : quand la société se délite, l’univers carcéral est souvent aux avant-postes, nous ramenant à une réalité cruelle, bien loin du « vivre ensemble » et de la « bienveillance » tant vantés par certains. Car, en prison, c’est chacun pour soi et on ne se mélange pas. Les communautés les plus fortes dominent les autres. Longtemps, ce fut le rôle dévolu au milieu corse, lequel s’est de longue date fait déborder. Dans son remarquable film, Un prophète (2009), Jacques Audiard suscite le malaise en dévoilant très crûment cette vérité si dérangeante. Car en prison, on ne ment pas, contrairement au monde politique : la réalité, on la prend de face. Et si, en dehors des murs d’enceinte, le communautarisme demeure peu ou prou larvé, il règne en maître à l’intérieur. Bref, la prison est aussi une sorte de laboratoire, susceptible de nous dire ce que le reste de la société est en train de devenir.

À en juger de ses augures, l’avenir ne nous réserve rien de bon.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

53 commentaires

  1. On croit rêver. Colonna condamné 3 fois pour le meurtre dans le dos du préfet Erignac est presque présenté comme un héros lachement agressé. Si cela avait été un détenu lamda, personne n’aurait rien dit.

  2. « Il est accompagné de plusieurs surveillants qui, étrangement, le laissent seul avec un Yvan Colonna occupé à sa gymnastique quotidienne. »
    Un détail intéressant serait de connaître la religion des surveillants.

  3. L’ordre et la sécurité ne règnent même pas dans les prisons alors , sur le territoire inutile d’espérer et ça sollicite un deuxième mandat que seuls les sourds et aveugles peuvent y être sensibles .

  4. Les prisons françaises regorgent de ces chances pour la France que nos gouvernants chérissent et câlinent plus que leurs propres enfants – il est plus que temps de faire le ménage avant que la situation devienne ingérable et le problème insoluble- ne pas hésiter le 10 Avril prochain à utiliser les bons bulletins.

  5. Pendant que ça sent la poudre en ukraine, ça sent le soufre en France !
    Jean-luc brunel à la santé, maintenant colonna à arles !

  6. COLONA ce prisonnier politique car il fallait un coupable pour le meurtre du Préfet aurait été laissé seul face à un tueur ? Y aurait t’il des indiscrétion sur une révision de son procès ??????????

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