Un patron de PME du BTP : « Que Mme Pénicaud vienne visiter un chantier au lieu de nous accuser d’incivisme ! »

Denys Fremont

Vous êtes patron d'une boîte de BTP, comment se porte votre activité en période de confinement ? La survie de votre entreprise est-elle menacée ?

Mon entreprise, ID CONSTRUCTION, compte dix salariés et deux associés. Nous avons continué le travail sur chantier cette semaine, en suivant les consignes du gouvernement.
Notre priorité était notamment un chantier de construction d'une maison en région parisienne, nous tenions absolument à la mettre hors d’eau, au cas où le confinement se durcirait. Autrement, nous nous sommes contentés de terminer les queues de chantiers.
Nous affrontons, de toute façon, une problématique de taille : nos fournisseurs sont fermés depuis mardi. Nous avons essayé de faire des stocks lundi mais, aujourd'hui, il est très compliqué de s'approvisionner. Nos principaux fournisseurs, Point P, Patheau et Leroy Merlin, sont fermés. Ainsi, sans possibilité de s’approvisionner correctement, l'activité va être durablement réduite et entraînera du chômage partiel et des décalages dans la réception des chantiers.

Notre survie n'est pas menacée pour l'instant, d'autant plus que nous sentons un soutien de la part du gouvernement et du système bancaire. Par exemple, notre banque nous a proposé des décalages ou des reports d'échéances pour nous venir en aide, en cas de problèmes de trésorerie. Avant cette crise, la conjoncture était bonne avec une activité soutenue et beaucoup de demandes. La reprise risque d'être lente, mais il faudra de toute façon terminer les chantiers engagés ou signés.

On a vu que le torchon brûlait entre le ministre du Travail et le BTP concernant l'obligation ou non de travailler. Quelle est votre position ? Est-ce que vous continuez le travail ou l'avez-vous stoppé ?

Adhérent de la CAPEB (Syndicat patronal de l'artisanat du bâtiment, NDLR), nous recevons effectivement leurs communications et leurs échanges avec les pouvoirs publics. Au dernier mail, voilà ce que nous avons appris : « La CAPEB et les autres organisations professionnelles du BTP ont demandé au gouvernement d’imposer l’arrêt temporaire des chantiers sauf mise en sécurité, urgence et dépannages. »

Je pense que la source du problème vient du fameux « en même temps » d’Emmanuel Macron qui, d'un côté, parle de guerre et de rester chez soi et, de l'autre, insiste pour que l'activité continue. Cette ambiguïté n'a aucun sens. S’il y a un risque à sortir le confinement doit être réel et le BTP doit s’arrêter.
Pour l'instant, l'activité continue mais, comme je vous l’ai dit, la fermeture de nos fournisseurs risque, quoi qu’il arrive, de nous forcer à stopper les chantiers, faute de matériaux…

Comment jugez-vous la communication ministérielle ? Vous vous sentez soutenus ?

Je conseille vraiment à Muriel Pénicaud de visiter un chantier au lieu de nous accuser d’absence de civisme !
La multiplication des tâches et des corps de métiers impliqués entraîne une surexposition des acteurs au contact humain et donc à une potentielle contamination. C’est pourquoi il est jugé plus sage de cesser le travail.

Denys Frémont
Denys Frémont
Chef d'entreprise du BTP (ID Constructions)

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