Un hotspot dans le sud de la France ? Chiche : à Brégançon !

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L'accord signé par le Royaume-Uni et la France, prévoyant un renforcement de la surveillance dans la région de Calais, prévoit également la construction de centres d'hébergement « dans le sud de la France ». Marseille, à la fois surpeuplée, urbanisée et déjà passablement gangrenée par l'enrichissement culturel, devra probablement renoncer, à sa grande déception, à devenir le point focal de la reconstruction du visage de la France. Alors, que reste-t-il ? Pas Menton ni Monaco, évidemment. La vallée de la Roja et son arrière-pays sont, eux, le GR20 de la diversité bienheureuse, mais le climat rude des montagnes et les faibles perspectives d'emploi sont de nature à décourager nos chances pour la France. Et puis, allez donc installer un camion satellite dans le (bien nommé) massif des Maures, comme Stéphane Ravier révélait, cette semaine, que c'était le cas à Toulon pour que nos invités puissent appeler le bled pour dire que tout va bien.

Alors, entre les deux, il reste le Var. Toulon, quoiqu'en partie défigurée par les bombardements de l'amitié franco-américaine, garde encore beaucoup de cachet. On y trouve des ruelles fraîches, des bastides accrochées au Coudon ou au Faron, et la mer, calme et claire ; il y a de grandes entreprises françaises, et la Marine nationale avec son fleuron, le Charles-de-Gaulle. Tant de bonheur et d'indolence attisent les rancœurs. Est-ce que, grâce à un maire très macroniste, on ne ferait pas profiter Toulon, déjà très multiculturelle, d'un peu plus de diversité ? Le quartier chaud de la ville, autrefois surnommé « Chicago » (« Chicague », pour les locaux), est devenu fréquentable et les kebabs y ont remplacé les lanternes rouges. Est-ce que « Chicague » ne deviendrait pas « Bamaque » ? Ce serait du dernier chic. Macron reviendrait, en fin de mandat, constater que les tentes Quechua ont envahi le quartier bourgeois du Mourillon, que les filles d'officiers de marine ne sortent plus après 20 h, que les règlements de comptes à la machette, entre vendeurs de shit marocains et crackeux sénégalais, sont monnaie courante le long du cours Lafayette. Ce serait la porte de la Chapelle avec du soleil. La misère, comme le chantait Aznavour, y serait-elle moins pénible ? Sans doute pas pour les riverains.

Il y aurait également une solution d'urgence à moindre coût. Figurez-vous qu'il y a, pas loin de Bormes-les-Mimosas, un petit ouvrage militaire qui offre tout le confort moderne. C'est une propriété de l'État, et ça éviterait d'avoir à mettre en place des baraques de chantier qui donneraient à nos hôtes une bien piètre image de l'hospitalité française. Cet endroit, c'est le fort de Brégançon, oppidum romain devenu (ironiquement) un poste avancé dans la défense de la côte contre les raids ottomans. Son premier seigneur, général des galères de François Ier, portait le titre superbe de marquis des îles d'Or. Le fort est ensuite passé de main en main jusqu'à sa récupération par la République française. Brégançon est doté d'un héliport, qui permettrait d'emmener les réfugiés chez le docteur grâce à l'AME, et d'un chemin carrossable auquel on accède en bus après avoir traversé la résidence d'été des grands-ducs de Luxembourg.

Je pense qu'on peut accueillir une centaine de personnes à Brégançon. Il va falloir se serrer un peu, mais ça passe. Nicolas Sarkozy avait fait installer des écrans plats dans toutes les pièces, probablement pour pouvoir regarder les films d'auteurs scandinaves dont il est friand. Ce sera l'occasion, pour nos amis, de regarder des films français en famille, puisque c'est de notre patrimoine que ces « naufragés » (en réalité récupérés dans des bateaux en bon état, le long des côtes libyennes) sont, paraît-il, tombés amoureux. Emmanuel Macron, lui, avait, on s'en souvient, doté le fort d'une piscine, hors-sol évidemment (on ne se refait pas), qui accueillera petits et grands. Un terrain de pétanque permettait, jadis, à Georges Pompidou de jouer à la pétanque avec ses gardes du corps. Si la disposition des « tentes deux secondes » le permet, on entendra donc Ahmed Escartefigue et Marius Traoré s'escagasser face au cochonnet pour savoir qui fait le point. En voilà, de l'assimilation.

On pourra m'objecter que le fort est utilisé par le Président. Certes. Il me semble, toutefois, qu'il ne s'en sert que l'été, alors que les Provençaux, eux, vont devoir vivre à tout jamais avec leurs nouveaux compatriotes (car ils seront tous régularisés, sous une forme ou sous une autre, ne vous en faites pas pour ça). Par conséquent, si cet accueil est exceptionnel et provisoire, comme on nous le dit à la télé, je ne vois pas ce qu'il y aurait de mal à utiliser les domaines présidentiels pour participer à l'effort... j'allais dire « de guerre », mais il semble que l'invasion migratoire soit, au contraire, le seul domaine dans lequel nous ne soyons pas « en guerre ».

Enfin, cerise sur le couscous, nappage caramel sur le mafé : si les néo-Provençaux sont toujours là, le 21 juin prochain, ce serait peut-être le moment d'organiser, dans la cour de Brégançon, une de ces fêtes de la musique colorées, chatoyantes et de bon goût dont Jupiter, ou Vulcain, ou Héliogabale, a le secret. On pousserait les tables, on monterait le son et on danserait, à la lumière des lampions, parmi les essences méditerranéennes du jardin. On ferait venir des ONG. Ce serait beau comme une publicité. Alors, un hotspot de migrants dans le Var ? Chiche !

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

38 commentaires

  1. Belle plume Monsieur FLORAC !
    Malheureusement l’ironie ne touche pas ces pachydermes élus
    Faudrait le « recycler » (définition du mot : réutilisation des déchets)

  2. Ce que j’admire le plus, c’est la saveur du texte d’ Arnaud Florac qui regroupe avec une belle ironie toutes les pensées ou idées qui ont pu traverser mon esprit. Brégançon. Je l’ avais suggéré dans un de mes commentaires. Ici est fait l’inventaire de tout ce qui prouve que c’ était une excellente idée.

  3. marre de toutes les solutions pour s’occuper des migrants. un seul mot retour de force au point de départ et en cas de recidive direction les iles Kerguelen. climat agréable toute l’année et population de manchot acceuillante………….

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