Dans la déjà longue liste des paradoxes à la française, on pourra ajouter celui-ci : trop absorbé par une crise sanitaire interminable et la guerre qui frappe à la porte, le président de la République en exercice n’a pas fait campagne, ou si peu. Pourtant, trois jours seulement après le second tour de scrutin, et sans que les événements aient en rien changé (ils auraient même plutôt empiré sur le front de l’Est), voilà que le Président réélu entre en campagne. Pour quoi faire ?

C’était, mercredi, la première sortie de Macron II. Naïfs, les Français auraient cru l’ancien-nouveau président de la République tout absorbé à l’analyse des résultats et le choix de son futur Premier ministre. Erreur : il faisait le marché à Cergy. Place Saint-Christophe, patron des voyageurs.

De cette visite, les médias ont retenu cette question existentielle : tomates ou pas tomates ? That is the question, en effet, les uns affirmant que le Président était bel et bien visé par les projectiles volant bas – en l’occurrence des sachets de tomates cerises –, les autres (France Télévisions) soutenant que c’était juste le geste énervé d’un commerçant voyant son étal bousculé par la meute. Quoi qu’il en soit, le parapluie protecteur a été ouvert pour protéger l’auguste chef du chef de l’État dont on se demande ce qu’il allait faire dans cette galère.

Il allait y affirmer son courage, diront les ricaneurs du « Petit Journal » désormais collés à ses basques (c’est de l’info, coco !). Vu l’armada de gorilles qui l’accompagne, le courage d’Emmanuel Macron est assez peu sollicité. On songera plutôt qu’il pense aux législatives et a décidé d’arpenter les terres hostiles dans les quarante-cinq jours qui nous séparent du scrutin, histoire de s’assurer une majorité pour l’heure très aléatoire.

Cergy a voté Mélenchon, comme toute la banlieue rouge ou presque. Et si elle n’a pas voté Mélenchon, elle a voté Le Pen. Et Mélenchon joue à « saute-élections ». Il fait comme si le duel s’était joué entre Macron et lui. Exit Le Pen, la République, c’est lui, et la cohabitation sa niche, où les cabots de la gauche moribonde s’apprêtent à le rejoindre, signe que la France est malade. Bien malade, même.

Sur l’origine du mal, on peut lire l’excellente tribune de Pierre Vermeren dans Le Figaro de mercredi, intitulée « Les racines culturelles du malaise français ».

Partant du constat que « le résultat de la présidentielle ne suscite aucune espérance, pas même parmi les électeurs qui ont voté pour Emmanuel Macron dès le premier tour », l’historien s’interroge sur les raisons de ce profond malaise qui s’étend : « Faut-il l’attribuer à la non-campagne de candidats qui ont si peu exposé leur programme et n’ont débattu qu’une seule fois » ou, plus certainement, à « l’éviction des sujets de fond » ? Est-ce le Covid, la guerre en Ukraine ?

C’est plus lointain, plus profond, plus ancien. Depuis des décennies, les livres s’accumulent pour décrire ce mal français qui nous ronge. En effet, « depuis les années 80, tous s’est grippé », écrit Vermeren, et « plus s’avance la Ve République, plus les Français se demandent à quoi sert le politique. Quelles sont ses capacités d’action ? » Le sentiment dominant est que « nos dirigeants font de la politique pour servir leurs intérêts matériels et leur notoriété, gage de leur réussite matérielle ». À quoi il faut ajouter la perte de souveraineté nationale par la ratification du traité de Maastricht, quand « les dirigeants français se sont coupé les mains, anéantissant leur capacité de décision, l’autonomie d’action de leur pays et toute idée de volontarisme ».

Dans notre pays où « l’ordre public est devenu un désordre établi » (Maffesoli), ne reste plus que le chacun pour soi. « En fait, nous n’attendons collectivement plus rien de la chose publique. Nous aspirons à la continuation de l’identique pourvu que les maux de la société nous épargnent », conclut Pierre Vermeren.

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28 avril 2022 à 13:30

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31 commentaires

  1. Je suis fatigué de voir mon pays si mal dirigé,et depuis si longtemps par des individus qui ne l’aiment pas,lorsqu’on aime son pays on ne le défigure pas avec des éoliennes,on ne remplace pas sa population.
    Il faut choisir entre les intérêts financiers et l’amour du pays!

  2. Félicitations pour avoir tenté de diffuser les constats implacables de l’analyse dont vous reproduisez les aspects essentiels.

    Malheureusement c’est maintenant le « chacun pour soi » qui va prévaloir !!!

  3. Il monte au front en vue des législatives ayant été élu avec peu de voix LREM , les autres partis ne faisant qu’un barrage à MLP. Pour les législatives, chaque parti reprend sa place et il sait que Larem est bien maigre en potentiel.

  4. Plus de 4 électeurs sur 10 se font insulter , mépriser , par leur « souverain « 
    La France championne du monde en ce domaine car peu de «  dirigeants «  de pays dits « démocratiques «  ne peuvent s’enorgueillir de pouvoir cracher sur la moitié de son peuple sans s’en prendre une ( tomate pour l’instant)

  5. Pour quoi faire ? convaincre les convaincus, conforter les immigrés dans l’optique LFI qu’il leur foutra la  » paix » et les encouragera à continuer leurs destructions, et narguer/provoquer les vrais français en leur assénant bien où sont ses priorités et dans quelle voie il va poursuivre son oeuvre dictée par satan..

  6. Comment les Français peuvent-ils être aveugles et ainsi gober les manoeuvres honteuses d’un machiavel qui prend le peuple français pour des cons ! Je l’ai déjà écrit, pas le temps de faire campagne pour la présidentielle ou pas de c…. pour affronter son bilan ? La preuve en est que maintenant ce même personnage « surbooké » a du temps pour faire campagne pour les législatives ! Et sur quel budget seront imputés ces frais de campane là ? Nul doute que le con-seil con-stitutionnel y veille !

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