[Tribune] Grève de la police : cela pourrait très mal se terminer

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Depuis trois semaines, des centaines - voire des milliers - de policiers ont décidé de se mettre en « code 562 », ce qui s’apparente à une grève policière. Or, plusieurs épisodes historiques de grèves de la police se sont tous soldés par de véritables catastrophes. L’Histoire doit pousser les autorités à faire preuve de beaucoup de précautions en appréhendant ce mouvement.

Des policiers pris entre trois feux

Depuis un mois, alors que toutes les forces de l’ordre ont été soumises à un rythme extrêmement intense, celles-ci vivent cependant une hécatombe judiciaire :

Le policier qui a ouvert le feu sur Nahel est en détention provisoire depuis plus d’un mois et il n’avait toujours pas vu sa famille après quinze jours.

Quatre policiers ont été mis en examen à Marseille pour avoir frappé un jeune à proximité des émeutes.

Ces injustices à répétition ont poussé probablement plusieurs milliers de policiers à se mettre en « grève ».

Une précision : la police ne fait techniquement pas « grève ». Traditionnellement, la police n’a pas le droit de faire grève, tout comme les magistrats ou les surveillants de prison. C’est pourquoi les syndicats policiers ont appelé à suivre le « code 562 ». C’est un refus d’initiative : les policiers répondent uniquement aux appels d’urgence sur les faits les plus graves : agressions, cambriolages, etc… En outre, les policiers déposent en masse des arrêts maladie.

Si le mouvement est inédit, il n’a rien d’étonnant. La police a l’impression d’être à la fois mise à l’épreuve, sommée de montrer patte blanche et attaquée par sa hiérarchie et la Justice. Plus les policiers se sentiront injustement attaqués, plus leur mouvement prendra de l’ampleur. Et cela pourrait très (très) mal se terminer.

L’Histoire prouve que les grèves de police se terminent en catastrophes.

En effet, l’Histoire récente montre que les grèves de la police, quoique très rares, ont des conséquences catastrophiques sur la sécurité des villes. Un des derniers exemples fameux a eu lieu en Argentine, dans la ville de Cordoba, la deuxième du pays. En 2013, la police de la ville a fait grève pendant 24 heures. Les heures qui suivirent virent littéralement le chaos s’installer dans toute la ville. Des dizaines de magasins sont brûlés et pillés par des passants et des gangs, ainsi que des dizaines d’appartements. Dans des images qui ont fait le tour du monde, on assiste à l’armement progressif des commerçants qui tirent pour faire fuir les pillards. Après 24 heures de chaos, on déplore deux morts dans cette ville et des centaines de blessés. La police mettra plusieurs jours à rétablir le calme dans les quartiers les plus pauvres.

Ailleurs, la ville de Montréal, au Canada connaît des troubles similaires. Connue aujourd’hui sous le nom du « 7 octobre rouge » 1969, cette journée vit des gangs profiter de l’impunité pour braquer pas moins de sept banques dans le centre-ville. Cette journée rouge se termine tragiquement, puisqu’entre autres incidents, une bataille rangée entre deux compagnies de taxis concurrentes donne lieu à la mort d’un des rares policiers non grévistes. Assistant au chaos, la police se remettra au travail après 16 heures de grève.

Mais une des plus importantes inactions policières, et ce, à l’échelle d’un pays entier, a eu lieu pendant la Seconde Guerre mondiale. Les policiers danois étaient accusés par la Gestapo de faire de la résistance. En 1944, les policiers sont donc arrêtés, beaucoup sont déportés et une centaine y périra… Devenu un État sans police, le Danemark enregistre une multiplication par dix des vols à main armée sur les sept mois qui suivirent l’arrestation des policiers.

La présence policière fait baisser le crime, son absence le fait augmenter

Ces épisodes malheureux rappellent également un principe clé de la criminologie : les délinquants font un calcul, si le gain espéré du crime est supérieur à la probabilité d’être arrêté et condamné, alors ils commettront ce crime ou ce délit. Sans police, il est évident que ce calcul devient dangereusement positif… En France, la police n’a pas atteint le point de rupture que serait une grève à proprement parler et la situation n’est pas aussi grave que dans les exemples ci-dessus. Mais il n’en reste pas moins que ce code 562 est un précédent.

Si la tendance actuelle se poursuit, à savoir une Justice tout aussi déraisonnable et un pouvoir exécutif aussi ambivalent, alors une grève « sèche » semble être le résultat inexorable, à moyen ou long terme, du bouillonnement policier. Et comme nous l’avons vu, les conséquences pourraient être très graves…

 

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 05/08/2023 à 12:27.
Pierre-Marie Sève
Pierre-Marie Sève
Directeur de l'Institut pour la Justice

Vos commentaires

61 commentaires

  1. Il faut comprendre la position et des policiers, que je soutiens sans réserve et la position de leur hiérarchie, qui après avoir fait semblant de les soutenir, pour essayer des désamorcer le mouvement , les laisse tomber, il faut assurer la continuité de la sécurité des français.
    Ceci étant dit, le vrai problème, c’est ce qu’on appelle la « justice », qui n’a de justice que le nom, elle est gangrénée par le syndicat de la magistrature et dans l’état actuel des règles d’indépendance des juges, il n’est pas possible d’en améliorer le fonctionnement, même en interdisant ce syndicat, car les hommes restent les mêmes et leurs idées et nuisances aussi.
    Une seule solution, que ces magistrats soient élus, par exemple en même temps que les maires, pour ne pas être en permanence devant les urnes, qu’ils soient responsables de leurs décisions, révocables et condamnables comme tout un chacun, s’ils ont failli la mission que les électeurs leur ont confié. Tout simplement.

  2. En France, une grève aurait probablement moins d’effet qu’ailleurs quant à une explosion de la criminalité par rapport à l’ordinaire vu que les délinquants ne sont pas trop gênés par la police, celle-ci ayant ordre de ne pas trop intervenir par peur de la bavure, et de toute manière ne risquent pas grand chose du côté de la justice.

  3. Et l’assassin d’Amélie, la jeune Policière de 25 ans, vient d’être remis en liberté sous bracelet électronique. Un juge des libertés, probablement membre du SNM, trop content d’emm***er la Police, arrose les braises avec du kérosène.

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