Tours : sous les décombres d’une ancienne caserne, une abbaye millénaire !

Abbaye_Beaumont_01

Le sol de France ne semble pas encore nous avoir révélé tous ses secrets. Ainsi, lors de fouilles en plein cœur de Tours, à l'emplacement d'une ancienne caserne militaire, appelée quartier de Beaumont et désaffectée depuis 2009, des archéologues ont retrouvé les vestiges d’une abbaye pour dames, disparue, il y a plus de deux siècles, lors de la Révolution. Ne subsistait que le logis abbatial, un bâtiment très élégant de la fin du XVIIIe siècle, dit « Pavillon de Condé » (illustration), dans lequel l'école d'application du train, qui occupa les lieux de 1944 à 2009, avait fait son musée, avant d'être transférée à Bourges (Cher).

Fondée à la fin du Xe siècle, l’abbaye Notre-Dame de Beaumont-lès-Tours, située à l'ouest de Tours, usuellement appelée abbaye de Beaumont, fut dédiée à la prière et au recueillement de moniales qui suivaient la règle de saint Benoît. Ces bénédictines, si elles ne s’agenouillaient pas pour prier, le faisaient alors aux champs afin d’exploiter les terres avoisinantes composées de vergers, vignes et prairies. Ora et labora (« prier et travailler »).

Les siècles passant, la communauté religieuse se divisa peu à peu en deux catégories. L’une, composée de jeunes filles issues de la noblesse et de la haute bourgeoisie, avait pour seule mission la prière. Elles profitaient d’un certain confort, comme peuvent en attester les restes de porcelaines de Chine retrouvés lors des fouilles. Les autres, religieuses d’origines plus modestes, se consacraient aux travaux manuels. Si beaucoup d’entre elles nous sont inconnues, les noms de certaines de ces résidentes sont parvenus jusqu'à nous. Ainsi, l'abbaye accueillit l’exil forcée de l’une des maîtresses d’Henri IV, la marquise de Verneuil, condamnée pour avoir comploté contre son Vert-Galant, ou encore Marie Guyart, en religion Marie de l’Incarnation, née à Tours en 1599 et morte en 1672 à Québec, canonisée en 2014 par le pape François, qui y fit un court séjour au début du XVIIe siècle avant de devenir missionnaire. Enfin, Henriette-Louise de Bourbon-Condé (1703-1772), princesse du sang de France, petite-fille de Louis XIV et de la Montespan, qui fut mère abbesse de 1733 à sa mort.

Malheureusement, la tempête révolutionnaire balaya la communauté religieuse, qui fut dispersée et abandonna le monastère. L’abbaye finit par être vendue comme bien national avant d’être démolie entre 1796 et 1810 par un carrier. En 1866, l’hôpital Bretonneau, tout proche, acquit le terrain afin d’y établir un potager pour ses patients. En 1913, le site est acheté par l’État pour y édifier une caserne militaire dont demeurent encore quelques bâtiments.

C'est après le départ de l'armée en 2009, lorsque des projets immobiliers furent lancés et la démolition de bâtiments anciennement militaires entreprise, que des fouilles archéologiques révélèrent les secrets de cette abbaye. Ainsi, les scientifiques ont pu cartographier l’ensemble du plan du monastère composé de son église abbatiale, sa chapelle dite Notre-Dame-des-Miracles ainsi que son cloître, son réfectoire, ses cuisines agrémentées de quatre caves et d’un puits ainsi que de ses jardins. Plusieurs cimetières furent aussi retrouvés et datés de différentes époques. Le plus ancien remonterait au temps même de la fondation du monastère. De nombreuses sépultures furent retrouvées, dont la constitution change selon les époques, allant de simples planches de bois au calcaire blanc de Touraine. Des vestiges de vêtements liturgiques, de nappes d’autel, de pots d’encens, de perles de chapelets et de petites croix en os ainsi que des médailles et des monnaies médiévales ont aussi été découverts. Dans une fosse, plus de 90 figurines, malheureusement brisées, ont aussi été exhumées. Ces objets, considérés par les archéologues comme des statuettes de dévotions ramenées probablement lors de pèlerinages, auraient été jetés dans une tranchée lors des destructions révolutionnaires pour y être oubliés jusqu’à aujourd’hui.

Ainsi, à l’occasion des Journées européennes de l’archéologie, ces 17 et 18 juin, le site sera ouvert au public. Les Tourangeaux, et plus largement les Français qui seront de passage dans cette belle ville de Tours, pourront ainsi découvrir une parcelle de leur Histoire et de leur patrimoine si longtemps enfouie.

Picture of Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

9 commentaires

  1. Quand c’est un maghrébin qui égorge, on tait son nom, ou il est fou. Vous avez raison Mme clusel de ne pas choquer l’extrême droite. Continuez vous êtes sur la bonne ligne.

  2. Et les dignes héritiers de ces sauvages briseurs de patrimoine prétendent aujourd’hui que la culture française n’existe pas.

    • Bravo, vous avez vu juste, tout nos petits négationnistes de la grandeur de la France et de son passé somptueux ne pensent qu’à salir, briser et détruire. La NUPES, puisqu’on parle bien d’eux, est un entreprise de démolition.

    • Avant , on démolissait, maintenant on déconstruit ! J’y vois une grande différence. Au nom d’une certaine idéologie très souvent condamnable, ces saccageurs de tous ordres restaient Français ! Aujourd’hui leur but n’est que de déconstruire la FRANCE ou du moins ce qu’il en reste, pour la réduire à néant.

  3. L’ampleur des destructions de notre patrimoine historique pour cause de révolution ou guerres de religion me laissent toujours pantois . Quel gâchis ! Il est vrai que certains y ont fait de bonnes affaires …

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Un vert manteau de mosquées

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois