Touche pas à mon camping-car !
On a les maisons de famille que l’on peut, la mienne était un camping-car. Ma grand-mère en avait fait un univers propret qui sentait le Paic Citron et la lessive à la main. Mon grand-père le briquait et le bricolait. Les autres enfants m’enviaient ; à leurs yeux, c’était un vrai palais : château de la Loire ici, et hop, quelques centaines de kilomètres plus loin, château en Espagne, là. Qui dit mieux ?
Bien sûr, c’était tout petit. Mais c’était si douillet. Dans ces maisons de famille-là, on ne demande pas à ses parents de laisser la porter entrebâillée et le couloir allumé. On ne risque pas de s’y sentir seul ni apeuré. J’entendais même mon grand-père ronfler, et cela me berçait quand j’allais faire dodo, comme les battements de cœur d’une mère rassurent un bébé in utero. Certains lui reprochent sa promiscuité ; moi, je l’adorais. Je rêvais de rester ainsi toute la vie, collée-serrée.
C’était une maison de poupée, adaptée à la fillette que j’étais. Le coin repas s’appelle d’ailleurs « dînette » ! Une sorte de roulotte, comme dans la bibliothèque rose. Un univers clos, un eldorado. Qui m’a donné le goût de l’histoire, de la géo, et surtout de mon pays, que j’ai arpenté en hauteur, en largeur, en diagonale, et surtout en profondeur.
Certains, dans ces colonnes, critiquent avec le dédain du propriétaire terrien mon nid, ma tanière, mon cocon.
Et je leur pose la question : aimeraient-ils que je dénigre leur maison, son toit, son crépi, son aménagement, et même son emplacement ? Que je dise qu’elle pollue la vue - à défaut de l’atmosphère - et m’indispose ?
Ils accusent les camping-cars de les retarder ? Mais quelle affaire si urgente avaient-ils à traiter ? Les précieuses minutes qu’ils auraient gagnées à rouler à tombeau ouvert sur l’autoroute, à quoi les auraient-ils employées ? Qui sait si un camping-car, par son déplacement placide, ne leur a pas, un jour, sauvé la vie, à eux et leur bolide. Ou, au moins, évité d’être flashés. Qui sait si, au volant, il n’y avait pas leur ange gardien… qu’ils ont copieusement insulté en doublant.
La vérité est qu’ils n’ont, sans doute, jamais osé essayer. La saison se termine. Mais qu’ils proposent donc à leurs enfants, l’été prochain, de tester ! On parie qu’ils en reviendront conquis ?
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