Séquence mépris de Nicole Belloubet à l’égard de la police ?

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Faut surtout pas confondre émotion et humeur.

L’émotion, c’est beau, c’est grand, c’est généreux. On sait aussi, maintenant, que l’émotion dépasse, au fond, les règles juridiques qui s’appliquent, comme l’a déclaré, sans rire, Christophe Castaner à propos des manifestations interdites mais tolérées en France, après la mort de George Floyd aux États-Unis. Une phrase lâchée comme ça, benoîtement, sur un plateau télé et qui flingue, en deux secondes, des siècles de principes juridiques. L’État de droit traîné dans le caniveau par le chef de toutes les polices de France. Faut reconnaître qu’il fallait le faire. Il l’a fait.

Au fond, ce n’est pas Macron, ni Philippe, encore moins Castaner qui gouvernent ce pays. C’est l’émotion. Alors, on y va de séquences émotion en moments chargés d’émotions et l’on s’exclame « que d’émotion » ! L’émotion, c’est de l’humanité en bidons de vingt litres de larmes. Christophe Castaner, faut bien comprendre, est un humaniste ; il a été sensible à cette émotion. Alors, pas de verbalisation.

Mais Christophe Castaner ne fait jamais les choses à moitié. C'est ce qu'on doit appeler le comique de répétition, bien que tout cela ne donne pas vraiment envie de rire. C’est pourquoi il a bien fait comprendre qu’il serait impitoyable avec les policiers et les gendarmes impliqués dans des affaires de racisme. S’ensuit un mouvement de colère des forces de l’ordre. Rassemblement devant les hôtels de police, un peu partout en France. Des policiers, se sentant de plus en plus lâchés par leur ministre, refusent de poursuivre des voyous (attention aux mots que l’on emploie…), d’autres déposent au sol leurs paires de menottes. Bref, la colère. On dit qu’il y a de saines colères et même de saintes colères. Un sentiment profondément humain parce que divin, aussi : Dies irae (« jour de colère »), chante-t-on dans la séquence de la messe de requiem.

Interrogée, vendredi matin, au sujet de cette colère et manifestations policières, Nicole Belloubet, sur franceinfo, réagit ainsi : « Ce n’est pas légal [ces manifestations], mais la question n’est pas celle-là »… Il est vrai qu’après la « jurisprudence Castaner », elle ne peut guère dire autre chose. Manquait plus qu'elle dise que c'est intolérable !

Ne surtout pas confondre émotion et humeur, disions-nous plus haut. L'émotion, c'est toujours positif ; ça vient tout droit du cœur gros comme ça. L'humeur, elle, peut être maussade, mauvaise, capricieuse. Elle n'a pas cette marque d'humanisme que l'on accorde aujourd'hui à l'émotion.

Or, que dit Mme Belloubet, après avoir posé le cadre juridique, comme elle sait si bien le faire à son habitude, pour caractériser ces manifestations policières ? « J’imagine que c’est un mouvement d’humeur qui s’apaisera. » Autrement dit, après la pluie, le beau temps ; c’est pas bien grave, tout ça ; ça leur passera avant que ça me reprenne. Juste un mouvement d’humeur, quelque chose de passager, de provisoire, d'épidermique. Rien de profond, au fond ! Pour un peu, le ministre aurait pu parler de saut ou de saute d’humeur. La police a ses humeurs...

D'un côté, donc, l'émotion. De l'autre, l'humeur. Vous la voyez, maintenant, la différence ? Faut-il voir dans les propos du ministre de l'inconsistance, de l'inconscience, de la désinvolture, du mépris ? Si ce n’est pas le cas, faut avouer que c'est à s’y méprendre.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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