Le grand rendez-vous agrico-médiatique annuel vient de fermer ses portes au Parc des Expositions de Paris. Succès populaire incontestable, la plus grande ferme de France a vu 672.570 visiteurs arpenter ses allées, 40 "visites officielles" se succéder et 68 délégations étrangères s'y déplacer. Souvent classé comme le Président des riches ou le Président des villes, Emmanuel Macron y aura passé une journée à développer ses intentions en matière de politique agricole commune, de traité de libre-échange Union européenne-Mercosur, d'interdiction du glyphosate ou de gestion des populations de loups. Véhémentement interpellé par-ci, bruyamment sifflé par-là, le président de la République a pu mesurer le fossé qui le séparait d'un monde qui n'est, en réalité, pas le sien.

Définitivement coupé du monde rural, il est incapable de comprendre le sentiment d'abandon des populations rurales, tant il les méprise et les ignore. "Je sais l’importance qu’a notre agriculture, je sais les attentes, les angoisses et la souffrance sur le terrain. Je suis convaincu qu’il y a un avenir certain pour notre agriculture mais à inventer ensemble", a-t-il assuré. Saute pourtant aux yeux une réalité plus pragmatique, celle d’une ruralité réduite à être la variable d’ajustement d’un pouvoir qui n’a plus les moyens de sa politique.

Alors, chemin faisant, entre deux stands du Hall 1 dédié aux races bovines, le Président des villes a tenté de séduire et a égrené quelques promesses tout aussi intenables les unes que les autres : dix milliards par an pour l’agriculture pendant cinq ans, aides à l’installation, assurance d’exigences sanitaires vis-à-vis des importateurs dans le cadre des traités de libre-échange, soutien aux producteurs lors des négociations avec les industriels pour une juste répartition de la valeur ajoutée et promesse de « verrous réglementaires » sur les achats de terres agricoles par les étrangers en France.

La France dispose, pourtant, d’atouts précieux. La diversité de ses produits exposés dans les stands des treize régions françaises, la qualité de ses filières défendue aux stands des interprofessions bovines, porcines ou encore viticoles lui assurent une renommée mondiale. Malheureusement, les choix commerciaux de l’Union européenne menacent gravement ces efforts, livrant nos produits à une concurrence anarchique et mettant en péril l’équilibre économique de notre modèle agricole ainsi que la sécurité alimentaire des consommateurs.

Le monde agricole s’inquiète. L’Union européenne souhaite diminuer le budget de la PAC de 10 %. La révision de la carte des zones agricoles défavorisées, qui va faire sortir 1.380 communes du dispositif ouvrant droit à une indemnité compensatoire de handicap naturel, a suscité de nombreuses manifestations dans toutes la France ces derniers jours.

Il y a urgence à sauver notre ruralité… bien au-delà d'une simple visite marathon au Salon de l'agriculture.

2048 vues

07 mars 2018 à 18:36

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.