Robert Badinter était contre l’euthanasie… mais ça, pas question d’en parler

©Flominator-Wikimedia
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Les hommages pleuvent évidemment, après le décès de Robert Badinter, mais on ne garde que ce qui arrange la pensée unique. Un hommage national fait naturellement partie du forfait minimum. Il n’est pas exclu que le cher grand homme soit panthéonisé. Alors là, on imagine ça d’ici : louanges à l’unisson, tout l’échiquier politique la larme à l’œil, une scénographie impeccable. Badinter était l’une des dernières figures de la gauche morale des années 80, celle du mitterrandisme triomphant qui allait changer la vie. Avec lui disparaît aussi - rendons-lui ce juste hommage - un certain ethos de la grandeur en politique, une gravitas romaine appréciable, quoique totalement surjouée (ce goût, tout de même, chez les pénalistes, de se donner en spectacle).

C’est donc entendu, Robert Badinter aura bientôt sa place parmi les grands hommes, son vitrail républicain, sa notice dans la Légende dorée des gens bien, quelque part entre Jean Moulin et Jules Ferry. Comme pour tous les saints laïcs, on ne retient de lui que ses combats dans l’air du temps, c’est-à-dire, évidemment, l’abolition de la peine de mort et la dépénalisation de l’homosexualité. Un article du FigaroVox, cependant, a le mérite de remettre les pendules à l’heure. Il est signé de la psychologue Marie de Hennezel, qui fut proche de François Mitterrand dans ses dernières années. Dans cette tribune brillante et pleine de bon sens, elle rappelle que Badinter - tout comme Mitterrand - a toujours été violemment opposé à l’euthanasie. C’est bien naturel, pour quelqu’un qui lutta toute sa vie contre les exécutions d’État, me direz-vous. Ça ne fait tout de même pas de mal de le rappeler puisque, très curieusement, cette prise de position, pourtant extrêmement claire, est passée sous les radars de l’opinion médiatique.

Figure morale de notre vieux régime

Il faut dire que, sous cet angle précis, le décès de Robert Badinter tombe assez mal pour la Macronie. La mort d’une figure morale de notre vieux régime à bout de souffle, opposée à ce qu’on tue les vieux, au moment même où le camp présidentiel voudrait discuter de cette « mort dans la dignité », ça fait mauvais genre. Cela voudrait dire que le journaliste Thomas Misrachi, dont nous avons parlé dans ces colonnes, aurait sorti pour rien son livre Le Dernier Soir, dans lequel il défend une cause qui lui est chère : le suicide assisté des personnes âgées.

On sait que l’Histoire officielle, depuis toujours, réécrit les biographies de ses grands hommes pour les faire coller à la vérité du moment. Comme l’URSS de Brejnev faisant effacer les photos de Lavrenti Beria, comme les wokistes déboulonnant les statues de Colbert, comme les Égyptiens martelant les représentations d’Akhenaton, la politique mémorielle ne se fait pas sans violence. Alors, puisque c’est pour la bonne cause, c’est-à-dire la mauvaise, exit Badinter le défenseur de la survie pour tous : il faut, à notre époque malade, non seulement la survie obligatoire des coupables (avec l’abolition de la peine de mort), non seulement la mort d'innocents (avec l’avortement possiblement inscrit dans la Constitution), mais encore l’autorisation d’abattre les gens qui ne sont plus rentables ou plus assez en forme. La vérité en souffrira peut-être. C’est sûr qu’elle en a vu d’autres. Ce n’est peut-être pas une raison pour la tordre à ce point.

Mettra-t-on au Panthéon un homme qui ne voulait pas de cette « mort miséricordieuse » venue tout droit de l’Allemagne nazie ? Dira-t-on, dans le discours qui accompagnera son éventuelle entrée, qu’il a défendu la vie, celle des assassins mais aussi celle des personnes âgées ? Ce serait courageux, mais ne soyons pas naïfs : le mot « courage » n’est pas inscrit au fronton des bâtiments officiels.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

32 commentaires

  1. Qu’il repose en paix comme ceux qui ne sont plus de ce monde.
    Robert Badinter et France Inter ne sont malheureusement que des socialistes !

  2. Chacun en va de s’approprier la pensée de feu Maitre Badinter, en allant même jusque à détourner ses propos ; il me semble avoir entendu ou vu une déclaration de Maitre Badinter qui disait en substance que  » les péchés des pères ne sont pas ceux des fils » parlant ainsi de Marine Le Pen , ou encore « On ne peut pas imputer à Madame Le Pen les propos très largement colorés de Monsieur Le Pen père. Non, ce ne serait pas juste. Il n’y a pas de responsabilité pénale qui soit héréditaire », juge l’homme politique nonagénaire. A l’inverse j’entendais sur le plateau de Cnews le socialiste M. Vallini , déclamer que Maitre Badinter avait déclaré que son obsession était de voir la montée des populistes et de craindre l’arrivée au pouvoir de ce parti, que l’époque actuelle lui semblait être un retour aux tristes années 30 , ce chantre du socialisme à 2% déformerait les propos de ce tout récemment disparu afin de redorer le blason d’un parti désormais inaudible.

  3. On glorifie un type à cause de qui des milliers de victimes sont mortes car leurs assassins ne risquaient plus la peine de mort, il a validé la peine de mort pour les milliers de victimes innocentes

  4. Si il était contre l’euthanasie ce n’est trop grave, il y a un autre faute plus importante durant les événements d’Algérie, transformé en guerre par Chirac, et comme les Français on la mémoire courte surtout ceux de gauche il y avait les portes valise et les portes flingues;

  5. Le peuple était demeuré, inculte et quasi analphabète pour ce monsieur. Il détenait la vérité et demander donc son avis au peuple pour l’abolition de la peine de mort était une faute.

  6. Immense respect pour ce grand homme qui avait choisi la vie, et l’espérance d’une humanité meilleure et perfectible.
    Immense respect pour son courage à défendre ses convictions profondes envers et contre l’opinion de l’époque.
    Et enfin respect pour la haute qualité intellectuelle et morale de sa pensée et de son verbe.
    La classe politique d’aujourd’hui devrait le prendre pour exemple et modèle afin de s’extraire de sa lamentable médiocrité.

  7. Robert Badinter est mort, c’est triste pour sa famille mais est-ce triste pour la France ? je ne comprends pas pourquoi notre pays cherche toujours à sauver la tête des coupables alors que nous ne faisons rien pour sauver les victimes innocentes ; combien d’innocents ont-ils été assassinés par des assassins condamnés à la perpétuité et relâchés après 30 ans ? Combien d’assassins ont-ils tué car ils savaient qu’eux ne risquaient pas de mourir ? Notre société marche sur la tête, nous laissons aussi périr lâchement les enfants innocents dans le ventre de leur mère qui avorte, nous remboursons même ce massacre avec notre Sécurité Sociale alors que nous nous désolons de la baisse de la natalité. Où se trouve la logique ? Pauvre France !!!

  8. Si une partie de la nation est rejetée, la nation n’est pas. Donc annulation de cette mascarade où McRond va essayer de capter un peu d’aura d’un autre. Ma binette partout.

  9. Personnellement je ne rend pas hommage à ce monsieur de gauche qui devait étre infame avec certain humains,et surtout la mentalité des hommes de gauche,et le non respect pour 47% de personnes qui ont voter pour Marine qui sont certainement plus républicains que ce monsieur.

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