C’est le non-événement du printemps, doublé de ce qui pourrait être un poisson d’avril ; mais qui n’en est pas un. Benjamin Griveaux et Mounir Mahjoubi quittent, l’un sa fonction de porte-parole du gouvernement, et l’autre celle de secrétaire d’État au Numérique. On notera que les deux briguent l’investiture de La République en marche à Paris en vue des élections municipales de 2020 ; ce qui fait au moins un candidat macronien de trop. Tout cela semble donc parfaitement organisé. Nathalie Loiseau, ex-ministre des Affaires européennes, elle, se retrouve désormais tête de liste LREM pour le prochain scrutin européen.

Pour remplacer trois figures aussi majeures de la vie politique française, on imagine que ça a dû bouillonner sévère dans les cervelles élyséennes, tant le casting paraissait ardu. Néanmoins, le résultat est à la hauteur de toutes les espérances.

À la place de Loiseau, Amélie de Montchalin, ancien soutien d’Alain Juppé. À celle de Mahjoubi, Cédric O qui, lui, roulait pour Dominique Strauss-Kahn. Deux winners à l’infaillible flair, donc. Et, pour porter la parole gouvernementale, après Griveaux, Sibeth Ndiaye, naguère chargée, auprès d’Emmanuel Macron, des relations avec la presse. À l’occasion de la mort de Simone Veil, c’est à elle qu’on doit, selon Le Canard enchaîné, ce tweet demeuré fameux : « Yes, la meuf est dead. » Plus récemment, une autre de ses déclarations devrait, elle aussi, passer à la postérité. « J’assume parfaitement de mentir pour protéger le Président », à propos du premier des Français (L'Express).

Dans le monde politico-médiatique, la nomination de ce trio de champions entraîne des réactions qu’on dira « mitigées », juste histoire de rester polis. « Remaniement ministériel : avec la menteuse professionnelle Sibeth Ndiaye comme porte-parole du gouvernement, la Macronie assume enfin qu’elle passe son temps à diffuser des #FakeNews ! Ça risque d’être compliqué de nous faire la morale maintenant… », affirme Stéphane Ravier, sénateur Rassemblement national. « Ça promet… », s’amuse Gilles Platret, des Républicains. « Une provocation », pour Adrien Quatennens, député LFI.

Plus inquiétant pour l’Élysée, ces nominations sont loin de faire l’unanimité au sein de la majorité présidentielle, si l’on en croit les informations révélées par RTL, ce lundi 1er avril. Pour un député incontournable de LREM, « on dirait le dernier carré de fidèles. Ça fait fin de quinquennat. C’est Chirac qui nomme son secrétaire général Philippe Bas au gouvernement, c’est Sarkozy qui nomme Claude Guéant. » Et le même d’ajouter : « Prendre deux conseillers perso sur trois nominations, il y en a qui bossent sur ces sujets à l’Assemblée et qui vont poser leur crayon ! » Pis : un ministre de premier plan aurait affirmé, dans la foulée : « On est chez les fous ! »

En revanche, on notera que, dans ce jeu de chaises ministérielles, le changement se fait dans la continuité, les nouveaux venus s’inscrivant dans la droite ligne d’une Nathalie Loiseau qui, le 30 mars dernier et à l’occasion du meeting de lancement de la campagne de LREM aux élections européennes, s’est distinguée dans son discours par cette alliance d’amateurisme, de lyrisme et de crétinerie, désormais marque de fabrique des sectateurs du « nouveau monde ». Ainsi faut-il savoir ceci : « Certains veulent revenir au nationalisme, au temps du sang et de la haine. Ce qu’ils annoncent, c’est l’Europe en marche arrière. Ne les laissons pas gagner ! » Mieux : « Évitons qu’un jour l’Europe se décline en cinquante nuances de brun. » Sibeth Ndiaye n’aurait pas mieux dit.

Quant aux inconsolables de la séparation de la belle équipe du Splendid, qu’ils se rassurent : d’autres bronzés continuent à faire de la politique.

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01 avril 2019 à 18:28

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