Pour lutter contre le narcotrafic, Darmanin veut interdire… l’argent liquide !

La France est en voie de mexicanisation, des pans entiers de notre pays sont soumis à la loi des dealers et, si l’on veut que cela cesse, il faut des mesures fortes et immédiates. C’est ce qu’a bien compris Gérald Darmanin, notre ministre de la Justice, ci-devant ministre de l’Intérieur. Ce qu’il n’a pas très bien compris, en revanche, ou ce qu’il ne veut pas comprendre, c’est qu’il faut s’attaquer aux causes. Au lieu de ça, il vient de proposer une mesure ébouriffante : interdire l’argent liquide ! C’est ce qu’il a confié aux sénateurs qui l’auditionnaient, cette semaine, au sujet de la délinquance financière.

S'attaquer aux causes

Il y a deux volets, dans cette idée idiote, et ils sont tous les deux extrêmement graves. D’abord, Gérald Darmanin ne veut pas régler le problème : il ne veut pas emprisonner les trafiquants, déraciner les points de deal, faire appliquer la loi, mettre un terme au laxisme judiciaire. Il préfère s’en prendre au cash, pensant peut-être que les circuits financiers sont limpides et qu’un junkie ne peut pas payer par carte. Il ne veut pas prendre le taureau par les cornes. Ensuite, si cette mesure était appliquée, elle pénaliserait l’ensemble de la société. C’est une chose dont notre classe politique est coutumière, me direz-vous : n’ont-ils pas fait porter un stupide masque en papier à toute la population au lieu de se concentrer sur la population à risque ? Et vous souvenez-vous de la folie des « gestes barrières » et des cafés que l’on pouvait boire assis mais pas debout (ou le contraire) ? De même, d’autres projets, comme la volonté de faire cesser l’anonymat sur Internet, attentent aux libertés individuelles sous couvert de sanctionner une minorité de fauteurs de trouble. À chaque fois, c’est la même chose : on s’en prend à la liberté des citoyens (ici, on s’en prendrait à la liberté des moyens de paiement) sous prétexte de s’attaquer aux délinquants.

Et puis, pour ceux qui ont suivi les velléités européennes, Darmanin semble également aller dans le sens de Bruxelles. La Banque centrale européenne, dirigée par Christine Lagarde, planche sur un euro numérique qui complèterait l’argent liquide. Cette idée avait soulevé une vague de protestations et de théories du complot (« Votre argent ne vous appartiendra plus » : l'euro numérique annoncé par la BCE fait face à une vague de désinformation). Les propos de Gérald Darmanin ne vont faire que renforcer les inquiétudes.

Darmanin fait son intéressant

On peut aller loin, comme ça. Interdire les voitures pour éviter les refus d’obtempérer. Interdire les scooters pour éviter les rodéos. Interdire les couteaux pour empêcher les meurtres gratuits. Interdire les réseaux sociaux pour empêcher les discours de haine. C’est du même acabit que la fin de l’argent liquide. C’est une manière de ne pas se confronter au fond du problème. Car ces faits (les meurtres, la drogue, les rodéos, les refus d’obtempérer et mille autres choses) ont un dénominateur commun. Il n’y a pas besoin d’en dire davantage et chacun tirera ses propres conclusions. Mais asphyxier les honnêtes gens en espérant que cela mettra un terme à des nuisances dont les causes sont profondes, il fallait tout de même y penser.

Darmanin a-t-il des ambitions présidentielles ? Cela expliquerait peut-être (mais cela n’excuserait pas) ses rodomontades : il veut faire son intéressant, en quelque sorte. Il est vrai qu’il est largement distancé, pour le moment, par Bruno Retailleau.

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