Philippot parti, faut-il jeter sa ligne aux oubliettes ?

La passion des premiers temps s'était essoufflée depuis plusieurs mois, laissant place à une indifférence chaque jour plus glaciale. Les tensions étaient, certes, palpables au sein de ce couple jadis fusionnel, mais peu d'entre nous s'attendaient à une rupture si soudaine… Pourtant, c'est chose faite : Marine et Florian se sont séparés. Et ce n'est pas un divorce à l'amiable, c'est tout juste s'il n'y a pas de vaisselle cassée.

De fait, la démission de celui qui murmurait à l'oreille de Marine Le Pen signe le triomphe des "sudistes", cette aile droite dont la ligne libérale-conservatrice avait été mise à mal par le social-souverainisme d'un Philippot clamant à qui voulait l'entendre son "gaullisme de gauche". Si le FN se refuse officiellement à tout changement de cap, il est peu probable qu'une ligne philipppotiste soit maintenue sans Philippot. Et pourtant, ce ne serait peut-être pas si bête...

Disons-le : le départ de Florian Philippot et de ses groupies mollement patriotes est salutaire pour le camp national, qui va enfin pouvoir revenir à ses valeurs fondamentales : famille, identité, valeurs, ordre, pays réel et patrie charnelle - autant de gros mots pour cet énarque ex-chevènementiste.

Faut-il, pour autant, tout jeter de la ligne Philippot? Progressiste, jacobine, laïciste, ultra-républicaine, occidentaliste, telle est la doctrine du vice-président démissionnaire. On lui reconnaîtra, cependant, le mérite indéniable d'avoir arraché le nationalisme français à l'idéologie de droite en affirmant son caractère transpartisan et en lui donnant un volet social qui manquait cruellement du temps du Menhir et qui privait le FN du vote des classes populaires. Il est, en cela, le continuateur du colonel de La Rocque, qui avait été le premier à comprendre que tout ce qui est national est inévitablement social, et que le socialisme économique est la mamelle du nationalisme politique. "Le social d'abord !", avait clamé en 1934 le chef des Croix-de-Feu.

La ligne sudiste vise justement à faire retomber l'idée nationale dans le carcan de la droite, arguant un "national-libéralisme". Ainsi, dans l'hypothèse (peu probable) où la droite accepterait une alliance, le FN dirait la même chose que LR, mais il le dirait moins bien et plus brutalement. En plus d'être infréquentable, il serait antisocial. À n'en pas douter, l'« union des droites » ferait du FN le dindon de la farce, l'éternel cocu de la droite républicaine.

Si le but est de "refonder" le camp patriotique, cela ne saurait passer par une alliance avec une droite bourgeoise et libérale – donc traîtresse par nature. Le patriotisme (idée d'enracinement et de fraternité) s'accommode mal du libéralisme individualiste et nomade.

Et si la "refondation" se faisait sur un savant mélange des deux lignes nordiste et sudiste ? Renouer avec le conservatisme et l'identité tout en gardant un large volet social et étatique. Souverainisme politique, colbertisme économique, conservatisme moral, pagano-christianisme culturel et aristocratie spirituelle : voilà les cinq piliers d'un nationalisme d'avant-garde. Enfin, la refondation passe surtout par un changement de chef et la dissolution d'un FN dont on se demande, finalement, s'il ne trouve pas son compte dans le Système qu'il prétend combattre. L'entreprise familiale des Le Pen doit laisser place à une grande ligue patriotique et transpartisane mêlant action et réflexion, tradition et révolution.

Nicolas Kirkitadze
Nicolas Kirkitadze
Etudiant en Histoire

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