C’est droit dans ses bottes que Laurent Nuñez, le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, semble assumer l’ensemble des violences policières perpétrées à l’occasion des 21 manifestations des gilets jaunes et, en particulier, celles des 1er et 8 décembre 2018 sur les Champs-Élysées. Invité de BFM-TV, ce lundi 8 avril, lors de l’émission « Police, au cœur du chaos », il a même annoncé que la position du gouvernement, et donc des forces de l’ordre, à l’égard des manifestants violents du samedi resterait ferme et déterminée.

C’est pourtant bien le nombre très important de blessés lors des affrontements entre policiers, gendarmes et manifestants qui pose aujourd’hui question.

Plus de 2.000 blessés chez ces derniers, dont certains gravement atteints et ayant eu à subir des interventions chirurgicales lourdes. Des témoignages de médecins, ophtalmologistes notamment, insistant sur les séquelles importantes qu’auront à endurer plusieurs individus touchés par des balles de LBD ou des grenades GLI. Rarement un bilan traumatologique n’avait été aussi alarmant.

À tel point que divers organismes internationaux, à l’instar de l’ONU par la voix de sa porte-parole aux droits de l’homme Michelle Bachelet, ou des ONG sont intervenus dans le débat public sur ces violences afin d’inciter le gouvernement français à faire preuve de retenue dans la répression des manifestations des gilets jaunes. Bien entendu, la violence n’a pas été du seul fait des forces de l’ordre.

Rapidement confrontées à des manifestations d’un genre nouveau car non déclarées et non encadrées, et à des manifestants venus plus pour agresser et détruire que pour véritablement revendiquer, elles ont dû parfois réagir dans l’urgence et la précipitation. Ce fut le cas, place de l’Étoile, à l’Arc de Triomphe, le 1er décembre dernier. Il s’ensuivit un chaos tel que les responsables de l’ordre public ne furent pas loin d’être totalement dépassés.

Toutes les conditions ont donc rapidement été réunies pour que la violence prenne le dessus. Parfois livrés à eux-mêmes, sans consignes ni ordres particuliers, policiers et gendarmes ne durent leur salut qu’à des ripostes extrêmement musclées. Dans ce contexte, les comportements individuels de quelques-uns d’entre eux furent, sans aucun doute, excessifs et disproportionnés.

C’est ainsi que près de 200 enquêtes administratives et judiciaires ont été ouvertes, visant à déterminer si l’usage de la force employée lors des opérations de rétablissement de l’ordre le fut dans le cadre de la loi. Sans doute certaines de ces enquêtes concluront-elles le contraire. Et certains policiers et militaires seront-ils sanctionnés. Pour autant, ces sanctions ne toucheront-elles pas, une fois de plus, que des lampistes ?

Les vrais responsables de cette situation insurrectionnelle qu’a connue notre pays pendant quelques semaines seront-ils recherchés et mis en cause ?

Il y a fort à parier que non.

Par ailleurs, alors que des enquêtes visant à faire la lumière, dans des conditions difficiles il est vrai, sont en cours, appartient-il à des responsables du maintien de l’ordre, qu’ils soient policiers ou gendarmes, de porter via les médias, des jugements définitifs sur les actions menées sur le terrain par les unités qui étaient engagées ?

Nous le savons désormais, les dernières manifestations des gilets jaunes ont conduit à une réflexion indispensable sur la façon de gérer l’ordre public dans notre pays. Mais c’est au pouvoir politique qu’il appartient aussi de mener une autre réflexion, bien plus importante celle-là, qui consiste à déterminer comment éviter de se retrouver, dans l’avenir, face à de telles situations.

3098 vues

09 avril 2019 à 16:18

Partager

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.