Vous connaissez la maxime « Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose » : elle n'honore pas ceux qui l'appliquent. C'est pourtant la stratégie que semblent suivre nos dirigeants. Vendredi soir, dans la presse italienne, Emmanuel Macron donnait le la, en se défendant d'avoir tardé à prendre la mesure de l'exemple de nos voisins transalpins. Samedi après-midi, dans sa conférence de presse, Édouard Philippe déclarait : « Je ne laisserai personne dire qu'il y a eu du retard sur la prise de décision s'agissant du confinement. » Et l'on apprend que, samedi matin, Olivier Véran, dans un entretien au JDD, affirmait que « l'anticipation a été absolue, dès le premier jour ».

Voilà, au moins, une bonne coordination à mettre à leur actif, à défaut de convaincre les Français, qui pensent tout le contraire. Ces personnalités éminentes pratiquent-elles la méthode Coué pour s'autopersuader ? Espèrent-elles, à force de contre-vérités, abuser l'opinion publique ? Tout se passe comme si, au plus haut sommet de l'État, on n'avait pas trouvé d'autre moyen pour se tirer du pétrin que de nier la réalité. Malheureusement, les mots n'effacent pas les actes, encore moins l'inaction.

Et si nos gouvernants s'enferraient dans le mensonge parce qu'ils ont conscience d'avoir tout raté ? Difficile d'admettre qu'on n'a pas été à la hauteur quand on est l'incarnation du « nouveau monde », que l'arrogance est devenue une seconde nature et qu'on se prend pour le « sauveur » de la France. Macron, Philippe et Véran rivalisent donc de mauvaise foi. Ils n'ont trouvé d'autre échappatoire pour tenter de détourner le verdict qui les guette. Ils ont failli : pourvu que ça ne se voie pas trop ! Comme des enfants surpris en train de faire une bêtise, ou des délinquants pris en flagrant délit, ils essaient de se sauver en niant, en niant encore, en niant toujours.

Comme ils savent, malgré tout, qu'il ne suffit pas de nier l'évidence pour persuader de sa bonne foi, ils jurent de leur sincérité, ils assurent qu'ils n'esquivent pas leurs responsabilités. « Pour ma part, je fais de la sincérité un outil de la gestion de crise », déclare le ministre de la Santé, tandis que le Premier ministre, champion de la « transparence », lance, pour parer les critiques : « Le moment venu, nous tirerons ensemble les leçons de la crise. Je ne suis pas de ceux qui se défaussent face à leurs responsabilités. » Preuve, s'il en est besoin, qu'il sait, au fond de lui, n'être pas irréprochable.

On n'a malheureusement rien appris de nouveau dans cette longue conférence de presse ni dans l'entretien accordé au JDD : les quinze premiers jours d'avril seront encore plus difficiles que les quinze jours qui viennent de s'écouler ; le nombre de respirateurs risque d'être insuffisant, mais le gouvernement souhaite atteindre l'objectif de 14.000 à 14.500 ; il y aura assez de masques, quand ils seront arrivés, à condition qu'ils soient fabriqués et arrivent effectivement à bon port ; pour pallier le manque de lits de réanimation, on transfère des malades dans d'autres hôpitaux moins chargés en province, jusqu'au moment où les besoins locaux ne pourront plus être satisfaits. Quant à Macron, loin d'imiter Bonaparte au pont d'Arcole, il envoie ses ministres en première ligne : il pourra toujours les lâcher, si ça tourne mal !

On ne peut qu'espérer que la crise sanitaire sera surmontée au plus tôt, malgré les mensonges et l'imprévoyance de nos gouvernants : il faut tout faire pour cela et respecter le confinement. Mais, l'heure venue de faire les comptes, les Français leur en voudront sans doute moins de n'avoir pas su maîtriser rapidement l'épidémie que d'avoir tenté de dissimuler leur impéritie.

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29 mars 2020 à 16:28

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