Chine, Europe, mondialisation : ce coronavirus nous donne une terrible leçon de géopolitique !

MONDIALISATION

À bien regarder l'évolution de l'épidémie et les réactions en chaîne qu'elle produit, on se rend compte que ce satané virus épouse à merveille les grandes tendances de la géopolitique mondiale. Jugez plutôt.

Le Coronavirus est lié aux graves lacunes dans le suivi sanitaire et d'hygiène alimentaire de la Chine, pays resté ancré pour l'essentiel dans le tiers-monde, mais qui a su se forger une vitrine industrielle et high-tech rutilante. Pour avoir attiré les multinationales et les banques occidentales, la Chine a réussi à intégrer l'OMC et à s'y maintenir sans jamais se conformer aux mises à niveau que cela impose. Résultat : la Chine exporte du textile, des téléphones, des meubles, des jouets et… le coronavirus.

L'Europe, continent passoire totalement ouvert à tout, est bien sûr la première victime du virus. Et comme de juste, c'est par l'Italie qu'il s'y introduit : c'est dans le nord de la péninsule qu'il y a la plus forte communauté chinoise d'Europe, et le plus de relations d'affaires. En sus, le gouvernement Conte, récemment expurgé de Salvini, a refusé la mise en quarantaine des Chinois, réclamée à cor et à cri par le susdit Salvini : il fallait faire oublier la compromission passée avec la Lega. Résultat : pour avoir refusé d'ostraciser les Chinois, le gouvernement italien a réussi l'exploit de faire ostraciser son propre peuple, partout dans le monde…

De l'Italie, le virus s'est répandu au reste de l'Europe. D'autant que, comme de juste, les autres pays se sont refusés, au début, à bloquer les frontières intracommunautaires : il faut sauver Schengen à tout prix et, comme pour l'euro, peu importe ce que ça coûte. Le virus se répand donc à l'Espagne, puis à la France. L'Italie, l'Espagne sont d'ores et déjà débordées au niveau de leur système de santé et je crains, hélas, que la France ne fasse pas mieux. Car ces trois pays n'ont rien anticipé, rien prévu, rien vu venir. Et leurs systèmes de santé sont fragilisés par les difficultés économiques et les tensions budgétaires : je crains, là encore, que la France ne se réveille, dans les jours qui viennent, sur le niveau réel, et non fantasmé, de son appareil sanitaire.

En Allemagne, par contre, on a déjà tout prévu, qu'il s'agisse du dépistage, des masques, des respirateurs : tout est en ordre de bataille. Bien que le nombre de malades soit important, il y a moins de morts qu'ailleurs. Et le système de santé semble au point : la riche Allemagne, qui aspire depuis vingt ans les industries de ses partenaires européens, a les moyens de faire face. Il aura donc fallu ce tragique événement pour mesurer à quel point l'Union européenne est une machine au service de la seule Allemagne. Quant aux pays de l'Est et à la Russie, ils se trouvent relativement épargnés : fidèles à leur doctrine, ils ont tout de suite bloqué leurs frontières et sont mis à l'abri.

L'Union européenne est censée protéger les peuples du Vieux Continent, faire bloc dans l'adversité, faire le poids dans le monde : c'est ce qu'on nous ressasse depuis trente ans. Mais tout ceci n'est que slogan et propagande. Et la crise du coronavirus l'illustre tragiquement : personne pour venir au secours de Rome en détresse. Et, pour le coup, en laissant l'Italie sombrer, on n'évite en rien la propagation du virus à l'échelle du continent. Et là, c'est chacun pour soi. L'Europe n'est unie que pour imposer des contraintes aux pays membres, jamais pour les aider en cas d'urgence, et cela, même si cette aide serait bienfaitrice pour les autres : quand ça va mal, chaque gouvernement veut montrer à son peuple qu'il s'occupe de lui avant tout.

Face à l'inconsistance de l'Union européenne, les grandes puissances tapies dans l'ombre surgissent et gagnent des parts de marché. La Chine, la Russie s'empressent de porter assistance à l'Italie : un bon moyen de se faire un précieux allié, le premier pour avoir un soutien important quand viendra l'heure des comptes et pour remettre à flot une juteuse relation d'affaires, le second pour ouvrir une brèche dans le mur anti-Poutine et les sanctions contre Moscou.

En un mois, le coronavirus aura réussi à catalyser les grandes tendances de la géopolitique mondiale. Et à confirmer avec éclat les carences de la mondialisation et de l'Union européenne, que les déclinistes, antimondialistes et souverainistes parmi lesquels on me classe n'avaient de cesse de dénoncer, sous les risées et les quolibets…

Olivier Piacentini
Olivier Piacentini
Ecrivain, politologue

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