413 milliards. C'est le chiffre qu'a officiellement annoncé le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, sur son compte Twitter, à l'issue de la prise de parole d'Emmanuel Macron sur la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan, dans le cadre de l'annonce de la future loi de programmation militaire 2024-2030. Le pouvoir exécutif peut se rengorger : c'est en effet un chiffre historique. En 2030, le budget de la Défense aura été multiplié par deux par rapport au chiffre de 2017. Finalement, et assez paradoxalement, quand on croit à la nécessité de l'outil militaire, l'Histoire récente prouve qu'il vaut mieux voter à gauche. Hollande, malgré les apparences, avoua lui-même qu'il avait ordonné de nombreux assassinats ciblés. Il envoya la France au Mali. Macron, malgré un départ un peu rugueux avec son chef d'état-major des armées, le général Pierre de Villiers, est sur le point de transformer l'essai. À l'inverse, Chirac, pourtant « fana mili », supprima (pardon : suspendit) le service militaire et Sarkozy, qui n'aimait pas l'armée depuis la tragique faute de Carcassonne, coupa dans les budgets à la hache.

En tous les cas, Emmanuel Macron, lui, a tenu à détailler ses nouvelles priorités. On notera que l'OTAN n'a été que très rapidement évoquée dans son discours : « Penser autrement nos partenariats, nos alliances, tout en demeurant un leader en Europe et un allié fiable à l'OTAN », « Si demain tel grand partenaire doit regarder ailleurs, nous devrons être en mesure d'agir avec les Européens à l'intérieur de l'OTAN ou en dehors de l'Alliance »... Faut-il y voir un début de fin de vassalisation ? En revanche, on notera aussi un certain aveuglement, puisque le partenaire privilégié qu'envisage Macron est l'Allemagne. Attachée aux États-Unis, cavalier seul dans les programmes d'armement, l'Allemagne est pourtant la triomphale indifférente du prétendu « couple franco-allemand ». C'est un couple qui n'existe que dans les fantasmes de la France, qu'on voit ici dans le rôle du pauvre type suppliant, qui pense que séduire, c'est être gentil, et qui se dit « c'est sûr, elle va me rappeler ». Exit, également, la capacité expéditionnaire qui fit l'essentiel des interventions françaises des quarante dernières années. On s'oriente désormais vers la défense de l'outre-mer, probablement davantage dans le Pacifique qu'aux Caraïbes, d'ailleurs - suivez son regard.

Ce changement de stratégie s'accompagne d'un changement technologique : passage au « tout Rafale », modernisation de notre dissuasion, nouvelle gestion des stocks d'équipements, développement de capacités comme les drones ou les engins de défense sol-air... Sans oublier les objectifs de long terme, inchangés ceux-ci, comme le renseignement (dont le budget est augmenté de 60 %), la souveraineté (notamment industrielle) et la capacité à commander une opération d'ampleur (ce qui sous-entend peut-être que cette opération commandée par la France pourrait être multinationale). Il s'agit, pour le chef de l'État, d'« avoir une guerre d'avance », manière de réinterpréter le mantra de l'actuel chef d'état-major des armées, « gagner la guerre avant la guerre ».

Certes, ce budget que l'on prétend magnifique sera percuté par l'inflation, entre autres. Certes, l'absence de l'Afrique au rang des priorités françaises est une première, peut-être assumée, peut-être subie, avec la présence non désirée de la Chine et de la Russie sur le continent africain. Toutefois, ce discours équilibré, qui n'oublie par l'aspect humain des armées, sans doute le plus important, en accordant une attention particulière aux réservistes et à la fidélisation des engagés, est une bonne surprise pour les citoyens.

Échaudées par les cessions à l'Ukraine et le retrait de Barkhane, les armées voulaient peut-être plus ou mieux. Emmanuel Macron sait cependant bien ce qu'il leur doit : ce sont les seuls fonctionnaires qui n'aient pas fait grève sous son mandat, et pour cause, puisque cela leur est interdit statutairement. On peut donc présumer que l'arbitrage de ce projet de loi de programmation militaire a été plutôt favorable aux soldats français. Le Président n'a d'ailleurs pas oublié de leur témoigner sa fierté avant que ne retentisse « la Marseillaise ». Ce sera désormais à la représentation nationale de trancher.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 23/01/2023 à 7:46.

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21 janvier 2023 à 12:30

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52 commentaires

  1. Faire la cour à madame Merkel , mais c’est bien Macron qui attend seul au point de rendez-vous de l’Histoire .

  2. 82% de naïfs au sondage. Macron veut une guerre intérieure ou extérieure pour rester au pouvoir, le reste il s’en contrefiche

  3. 413 milliards, au mieux 50% pour la France, pour le restant il faut bien payer les armes offertes à l’étranger, vers l’Est de l’Europe si vous voyez ce que je veux dire…

  4. La commande exceptionnelle de véhicules anti-émeutes et celle d’une grosse quantité de bombes lacrymogène sont prévues dans ce cadre d’une nouvelle défense ?

    1. Ne racontez pas des bêtises en imitant celui qui se dit notre président. Les VBRG de la Gendarmerie nationale ont près de 50 ans, alors les remplacer ne semble pas si exceptionnel que cela.

  5. « Quand on croit à la nécessité de l’outil militaire, l’Histoire récente prouve qu’il vaut mieux voter à gauche ». On aura vraiment tout lu ici, sur boulevard Voltaire. Où avez-vous vu, M Florac, que Chirac et Sarkozy étaient de droite ? Prenons Sarkozy qui nous avait promis le karcher et, selon la formule consacrée, nous a amené Kouchner. La réalité, c’est que nous avons à l’Elysée, depuis des décennies, un défilé ininterrompu de nullités voire de parasites, gauche et droite confondues.

  6. Tout cela ne sera financé ou pas financé par le prochain président de la République et n’engage donc personne. Cela fait uniquement partie de l’opération médiatique indispensable, destinée à l’opinion publique pour la préparer à une guerre dans laquelle les États-Unis de Joe Biden veulent nous engager contre la Russie.

    1. Ce n’est pas tant le président qui finance mais le parlement, alors en 2025 il ne restera plus qu’aux Macron compatibles de Renaissance que 2 budgets à faire, ensuite cela relève effectivement de madame Soleil, surtout si……..

  7. Brouillon ! Encore un caprice à la Macron ! C’est désordonné . cela va aboutir à un gros gâchis… et de grosses dettes.

  8. Je crois qu’il faut être prudent et très attentif…Depuis plusieurs mois se dessine la doctrine de Belligérant soft  » en même temps » oui et non. Cette guerre par procuration s’accommode bien de cette ligne directrice qui nous conduira à être belligérant sans consultation de l’assemblée nationale. S’engager par la fourniture d’armes défensives puis offensives, ensuite l’envoi de troupes européennes ou américaines sous pavillon Ukrainien est apparu sur le terrain. Nous n’avons plus les capacités de production d’armement et récemment, la société Exxellia a été vendue aux USA alors que cette enveloppe de 400 Milliards était en préparation.
    Le coup tordu serait de  » contribuer  » à la défense des  » valeurs européennes  » en offrant aux belligérants directs des armes achetées aux USA…. Nous financerions ainsi une guerre sans que l’armée Française ne bénéficie effectivement des moyens offerts par ce budget pluriannuel. Nous commençons par les canons Caesar et finirons pas acheter des F35 et chars Abrahams à offrir à Taiwan et Kiev ou toute autre zone de conflits dans laquelle l’OTAN sera engagée. L’assemblée n’aura rien à dire, elle aura voté les budgets et les Français paieront.
    Un bon deal pour les US , comme cela est le cas pour l’énergie .

    1. Cette vérité doit « ruisseler » au plus vite pour espérer « nettoyer l’Assemblée Nationale » à la méthode du nettoyage des écuries d’Augias …

  9. Pour vous aider à résoudre le problème de notre souveraineté, lisez les dernières sorties d’Emmanuel Todd … « Ils (Allemagne+France) ne savaient pas que les Américains, les Britanniques et les Polonais pouvaient permettre à l’Ukraine de mener une guerre prolongée. L’axe fondamental de l’OTAN est désormais Washington-Londres-Varsovie-Kiev ».

    Finalement il souligne que l’Allemagne et la France sont devenues des partenaires mineurs de l’OTAN et n’étaient pas au courant ou ne voulait pas voir ce qui se tramait en Ukraine sur le plan militaire.

    Alors notre souveraineté ?

    L’interview est dans le Figaro (page 22) à l’occasion de la sortie d’un livre d’Emmanuel Todd au Japon et non pas en France. On peut s’interroger sur le niveau de vassalisation de notre pays, de nos politiques, de nos économies ….

  10. Tous ses « plans » et autres « lois » sont à prévision 2030 … Quelle est donc cette fixation pour cette date ? … Vu qu’il est « imbu » de sa personne dans les tables de l’HISTOIRE du Monde, que s’est t’il passé en 1930 ? en 1830 ?
    Que va devenir LA FRANCE d’ici 2030 ?
    Que n’a t-il donc fait dès sa « prise de pouvoir » en mai 2017 envers l’Armée française ? Encore une fois « Bla Bla BLa BLa BLA BLA » ! …
    Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?
    Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu’on enchaîne?
    Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c’est l’alarme
    Ce soir l’ennemi connaîtra le prix du sang et les larmes

    1. C’est la France qui va connaître le prix du sang et des larmes , fruits des gouvernances de ces 30 dernières années.

  11. Encore un coup de com’ à la macron , comme d ‘ habitude ;
    De toutes façons , de l ‘ Armée , ils ne reste plus grand chose , serait ce suffisant ?

  12. L’Allemagne va nous supplanter sur le plan militaire avec l’aide délibérée de l’Otan! Cela na lui suffit pas ? Ne comprend il pas que les américains non seulement veulent nous assujettir mais ne nous font plus confiance aux vues de la situation intérieur de la France . Ils veulent nous garder sous le coude juste parce que nous sommes la deuxième « puissance » maritime par le nombre de territoires que nous possédons sur l’ensemble de la planètes et sur lesquels lorgnent nos bons amis Anglo saxons qu’ils soient Anglais , Nouveaux Zélandais ou Australiens !!!

  13. « En toutes choses les Y A QU’À sont toujours suivis par les Y AVAIT QU’À PAS et les FAUT QU’ON par les FALLAIT PAS QU’ON. »

  14. « … Faut-il y voir un début de fin de vassalisation ? … »

    Prions !

    Mais hélas depuis 2003, on est au piquet, les mains sur la tête …. Et maintenant on veut nous envoyer sur le front russe … tout un programme de Barbe Rose.

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